Face à l'inaction du gouvernement et la répétition quotidienne d'actes discriminatoires, six associations françaises et internationales ont décidé de saisir le Conseil d'Etat pour dénoncer les contrôles au faciès opérés par certains membres de la Police, notamment en région parisienne. Six associations françaises et internationales ont saisi aujourd'hui le Conseil d'Etat pour faire cesser les contrôles discriminatoires sur l'apparence physique et l'appartenance ethnique des individus. Les associations ont basé leur saisine sur une longue enquête, riche des témoignages de six policiers, annonce France Inter, face au silence du gouvernement sur la question. Les six associations, à savoir la Maison Communautaire pour un Développement Solidaire ; Pazapas ; Réseau Egalité, Antidiscrimination, Justice Interdisciplinaire ; Amnesty International France ; Human Rights Watch et Open Society Justice Initiative, représentées par un avocat commun ont demandé au Conseil de «constater le grave manquement de l'Etat consistant à laisser perdurer la pratique généralisée des contrôles au faciès». La plainte réclame un meilleur encadrement juridique des contrôles, avec la délivrance d'un justificatif de vérification d'identité et la mise en place d'un mécanisme de plainte pour contester les contrôles jugés abusifs, sans compter la meilleure formation des policiers sur leurs interactions avec la population, jugée nécessaire. Certains fonctionnaires pensent également que la problématique du contrôle au faciès pourrait être améliorée par des dispositifs techniques comme la diffusion massive des caméras piétons. Longue de 220 pages, la requête est alimentée par les témoignages de victimes et de policiers témoins de ces dérives, désabusés face à leur incapacité de faire évoluer leur profession «de l'intérieur». Sabine Garnier, responsable du programme "Protection des populations" à Amnesty International France témoigne que ces policiers «ont estimé que pour l'instant, les choses n'avaient pas bougé avec leur simple parole interne et donc se vivent comme des lanceurs d'alerte». Des témoignages saisissants de policiers Un des gardiens de la paix, basé en région parisienne, témoigne à France Inter d'un racisme au sein de la police, certes «pas généralisé» mais représentant aujourd'hui «ce qui porte le plus atteinte à l'institution» policière. Il remonte l'absurdité de certaines situations, comme le fait de parler une langue étrangère à proximité d'une ambassade, motif «suffisant» pour certains de ses collègues pour motiver un contrôle. Dénonçant des clichés encore trop présents dans l'Hexagone, le gardien de la paix continue en affirmant «on se cantonne à se dire que le fait de vivre en banlieue, d'avoir une ghettoïsation, va favoriser la commission d'infractions. C'est là que l'on se trompe : lorsque l'on est vraiment un gardien de la paix et qu'on veut faire une affaire, généralement, on contrôle n'importe qui et c'est à ce moment-là que l'on se rend compte que le monsieur Tout-le-monde habillé avec un costume, une cravate avec sa petite valise, est peut-être trafiquant de stupéfiants et a peut-être une certaine quantité de cocaïne dans sa trousse». Alors qu'il a exercé son métier dans d'autres régions de la France, le jeune policier d'origine africaine à constaté que ces contrôles discriminatoires étaient plus fréquents sur la capitale, «si vous aviez un uniforme, on vous appellerait 'collègue'» dit-il, alors qu'en civil, il devient lui-même «potentiellement une personne qui pouvait avoir commis une infraction» aux yeux de certains de ses confrères et consœurs.