Selon le dernier sondage publié par l'institut Averty et le réseau Tarik Ibnou Ziad Initiative (TIZI), le chef du gouvernement a vu sa cote de confiance baisser de 60 à 48,5%, et sa cote de satisfaction de 54 à 45%. Les chiffres restent élevés et encourageants pour un chef de gouvernement aux affaires depuis 4 ans. Mais à y voir de plus près, ces chiffres ont un sens. Ainsi, que l'on analyse les données livrées par les deux organismes sous l'angle de la géographie des répondant, de leur sexe, de leur CSP ou de leur âge, la seule certitude est que le chef du gouvernement préserve sa popularité chez les seniors (55 ans et plus), au sein de la CSP B (classe moyenne urbaine), et au nord du pays. Ainsi, le discours plutôt réducteur sur les femmes, déroulé par le chef du gouvernement, lui aura valu une chute de sa popularité chez elles de 55 à 45%. Il faut savoir que sur les 7 millions de ménages recensés au Maroc par le Haut-commissariat au Plan en 2014, 1,8 million sont gérés par des femmes seules. Elles ne sauraient donc apprécier les sorties sur les « lustres » ou sur le crime d'honneur prescrit par Mustapha Ramid dans son projet de Code pénal, ou encore les diatribes sur les femmes au foyer et autres positions sur l'égalité du genre. On relève aussi que si la popularité du chef du gouvernement a baissé de 13% en un an au sein de la CSP A, cette chute est bien plus marquée chez les CSP D et E, avec 20%. Pour les premiers, le récent positionnement clairement idéologique du PJD et de certains de ses ministres justifient cette décote de confiance, et pour les seconds, le coût de la vie et le panier de la ménagère expliquent la tendance baissière, et cela est confirmé par la récente polémique sur le prix de l'oignon, qui s'est invitée jusqu'au parlement… Pour les seniors, on peut également modérer le bon score du chef du gouvernement avec la question des retraites, pour lesquelles les cotisations devront augmenter, les pensions diminuer et l'âge de la retraire repoussé. Une grogne pourrait apparaître au sein de cette catégorie de population pour ces raisons. Il est à noter également que cette enquête a été menée auprès d'un public d'internautes, mais il faut savoir qu'il existe plus de 15 millions d'abonnés à internet au Maroc, dont 7 millions disposent de page sur les réseaux sociaux. Cette population est active et est susceptible de voter, puisque 55% de l'échantillon retenu affirment être sûrs d'aller aux urnes ce 7 octobre. Mais l'enquête a été menée en février/mars 2016, soit pendant la grève générale particulièrement et étonnamment réussie des syndicats, le 24 février, avant le débat lancé sur le kif par le président de la Région Tanger-Tétouan-al Hoceima Ilyas el Omari et les remous (et énervements au PJD) qu'il a suscités et surtout avant ce qu'on peut bien appeler le « naufrage » de Benkirane dans sa gestion de la question des diplômés chômeurs. On peut penser que si les répondants à l'enquête avaient eu ces données en tête, les chiffres de popularité du chef du gouvernement auraient été plus bas. Cela étant, il est indéniable qu'Abdelilah Benkirane continue de bénéficier d'une popularité et d'une confiance confortables, mais le mythe de son invincibilité électorale peut désormais être remis en question.