La crise de l'électricité en Afrique du Sud s'aggrave et augure d'un hiver froid et sombre. Les délestages électriques peuvent atteindre jusqu'à 12 heures par jours, suscitant ainsi l'ire des populations et des entreprises. Depuis plusieurs mois déjà, les coupures électriques, appelées localement «loadshedding», ne font qu'empirer dans ce pays d'Afrique australe pourtant considéré comme l'un des plus industrialisés du continent. En effet, les unités de production d'électricité de la compagnie publique d'électricité «Eskom» tombent successivement en panne comme par effet domino, ce qui nécessite d'imposer des coupures de courant drastiques pour protéger le système d'un effondrement total. Selon la compagnie en détresse, les pannes récurrentes combinées avec le programme de maintenance planifiée de ses centrales à charbon vieillissantes ont fait perdre au réseau national près de 23.000 MW sur une capacité de production totale estimée à 40.000 MW. Rien qu'en 2022, les Sud-africains ont subi plus de 1.900 heures de coupures de courant, alors que depuis le début de 2023, les choses se sont corsées davantage, le pays n'ayant passé presque aucun jour sans délestages. Clyde Mallinson, un expert de l'énergie, a estimé à ce propos que pour éviter le pire durant l'hiver, Eskom devait augmenter la capacité de sa flotte de charbon à plus de 50 %. «Si la production continue de trainer en juin prochain (au pic de l'hiver), les délestages devraient dépasser la phase 8, le niveau maximum dans le calendrier de la compagnie», a-t-il mis en garde. Lire aussi : Crise de l'électricité en Afrique du Sud : Un plan de 18 mois pour éviter l'effondrement de l'économie Face à cette situation délicate, le Président Cyril Ramaphosa a déclaré que la résolution de la crise énergétique croissante restait une priorité absolue pour son gouvernement. Il a souligné avoir pris, en février dernier, une série de mesures pour tenter de remettre Eskom sur les rails, notamment en déclarant l'état de catastrophe nationale et en créant un nouveau ministère dédié au portefeuille de l'Electricité. Alors que le temps presse à l'approche de l'hiver, le ministre nouvellement nommé, Kgosientsho Ramokgopa, a annoncé la semaine dernière un plan de 18 mois pour revoir à la hausse l'approvisionnement électrique du pays. «Le plan consiste à introduire plus de 12.000 MW de capacité supplémentaire, diminuer le sabotage des infrastructures électriques et acheter du diesel d'une valeur de 30 milliards de rands pour une utilisation d'urgence lorsque les centrales électriques au charbon ne fonctionnaient pas», a-t-il expliqué. Toutefois, les partis de l'opposition ainsi que de nombreux analystes ont exprimé leur méfiance vis-à-vis de ces mesures qui, pour eux, demeurent des vœux pieux face à une réalité têtue qui dure depuis plus d'une décennie. Dans ce sillage, l'Agence internationale de notation Fitch Raitings a estimé que «les antécédents généralement médiocres en matière d'exécution des plans et les problèmes de gouvernance de la compagnie d'électricité suggèrent que de nouveaux retards sont possibles». En outre, plusieurs rapports médiatiques font état de conflits de pouvoir entre le nouveau ministre de l'Electricité et ceux des Ressources minérales et de l'Energie, Gwede Mantashe, et des Entreprises publiques, Pravin Gordhan, deux puissants alliés du Président Ramaphosa. Selon les médias, les deux ministres ont refusé de confier certaines de leurs pouvoirs à Ramokgopa, ce qui constitue une entrave pour s'acquitter pleinement de ses fonctions. En somme, les coupures de courant, conséquence de mauvais choix politiques, de la corruption et d'une mauvaise gestion de la compagnie publique, semblent être là pour rester. Les Sud-africains doivent, par conséquent, chercher des solutions alternatives pour répondre à leurs besoins en électricité et éviter de passer un hiver froid et sombre. Avec MAP