Le 2 mai prochain, soit dans quelque quatorze jours, le président de la République algérienne, Abdelmajid Tebboune entamera une visite officielle en France sur invitation de son homologue Emmanuel Macron. Programmée depuis quelques mois, organisée de part et d'autre, elle consacrera en effet une normalisation difficile proclamée lors du voyage du président français en Algérie au mois d'août dernier. Les deux présidents avaient, si l'on peut dire, scellé des retrouvailles spectaculaires avec un protocole gestuel inédit, des embrassades et accolades et, bien entendu une loghorrée de gentilles phrases. Tant et si bien que, trois mois après, Mme Elizabeth Borne, Première ministre française a effectué une visite à Alger à la tête d'une délégation de pas moins de quinze ministres et au cours de laquelle avaient été signés plusieurs accords de coopération. Autrement dit, un champ très large de celle-ci avait été redéfinie couvrant la politique, l'économie, l'éducation, une dimension technique et, bien entendu, l'armement. Car, bien évidemment, si le gouvernement algérien – fidèle à sa vocation – s'était jusque là approvisionné surtout auprès de la Russie, il a donc décidé de changer de fusil d'épaule. Le bouillonnant général Saïd Chengriha s'est rendu, à cet effet, à Paris le 23 janvier dernier où il a été reçu comme un chef d'Etat, signant ensuite des accords de livraison d'armes françaises à l'Algérie, entérinant dans la foulée ce qu'on appellera un tournant militaire dans leurs relations. On peut en effet souligner qu'en moins de cinq mois, eu égard aussi à la mauvaise tournure prise dans les relations de la France avec le Maroc, le rapprochement franco-algérien s'est effectué sur des critères, la passion triste de Macron aidant, d'un opportunisme de mauvais aloi. Conséquence directe ou non de la guerre d'Ukraine, la hausse vertigineuse du prix du pétrole et du gaz a fourni à l'Algérie d'orgueilleux arguments de chantage, aussi bien à l'égard de la France que de l'Espagne. Une peur panique a saisi d'emblée Emmanuel Macron qui, reniant tout à son passage, a bradé l'honneur de la France pour un baril de pétrole et des mètres cube de gaz. Il s'est transfiguré ce faisant en fossoyeur de la coopération maroco-française, jouant sur de médiocres registres comme le blocage des visas, une tonitruante campagne médiatique ahurissante contre le Royaume de ses stipendiés au Parlement européen, donnant du grain à moudre à la junte algérienne et à sa presse aux ordres, enfin montant de toutes pièces l'affaire de Pegasus sans apporter la moindre preuve, en en faisant un argumentaire mensonger de politique d'Etat. Paternalisme, infantilisme grotesque, arguties et mauvaise foi ont caractérisé l'attitude de Macron à l'égard du Maroc. C'est se méprendre en effet sur les effets du retour de bâton en perspective, lié d'une part à la désastreuse conjoncture dans laquelle il a jeté la France, d'autre part aux échecs patents et irréversibles de sa politique étrangère, en Afrique, en Asie, en Europe même, sans compter la tragique relation avec les Etats-Unis. C'est dire que la fameuse phrase de « l'en-même-temps » qui est à Macron ce que l'honnêteté serait au juste et bon visionnaire, constitue à vrai dire l'implacable désillusion. « Jupiter » semble brûler de ses propres feux, déclenchés à tours de bras, ruinant les espoirs investis en lui, jetant par-dessus bord le capital de sympathie international qui lui fut témoigné. On ne peut pas ne pas souligner le sentiment de désenchantement – y compris au sein de son gouvernement – qui nourrit et enrage tout à la fois les cœurs d'un peuple français désemparé. Aux plans intérieur et extérieur, la chute de Macron est sans précédent dans l'histoire de la Vème République. Nous prenons note de ce déboulonnement qui n'a d'égal qu'une maladie chez lui appelée infantilisme, un jeu de quilles doublé de cette arrogance qu'il porte à l'égard des autres. Nous mesurerons également le degré de fidélité aux principes sacrés de la France de l'engagement. La fin du mois d'avril sera marquée par le vote du Conseil de sécurité sur l'affaire du Sahara où, membre permanent parmi les cinq autres pays, la France a toujours adopté une attitude à tout le moins neutre, voire adopté les résolutions en faveur de la solution politique prônée et défendue par le Royaume du Maroc. Non qu'il faille désespérer d'un retournement, mais convenons néanmoins que le conflit maroco-algérien est en grande partie le mauvais fruit, le grain de sable d'une décolonisation française inachevée et mal réalisée qui a été transformée en machine de guerre par le pouvoir de Boumediene, aujourd'hui réactivée par Tebboune. Celui-là même qui ne connait rien de rien au problème, tout au plus instrumentalisé par une junte militaire hargneuse et revancharde.