Les récentes accusations de l'organisation internationale Amnesty ont provoqué l'ire du Maroc, qui a haussé le ton contre cette ONG, basée à Londres. Le Royaume a ainsi exigé « des preuves des allégations avancées contre le Maroc dans une présumée affaire d'espionnage ». Des propos diffamatoires qui peuvent donner lieu à « une action civile devant les juridictions du Royaume-Uni », selon Me Elajouti. Dans un rapport publié le 22 juin dernier, Amnesty International accuse le gouvernement et les services de renseignements marocains d'avoir utilisé un logiciel israélien afin d'espionner le téléphone du journaliste Omar Radi. Le rapport avance que le journaliste en question aurait fait l'objet d'une surveillance, grâce à un logiciel développé par la société israélienne NSO Group. Une technologie qui permettrait d'avoir accès à toutes les données du téléphone portable d'un individu et également d'en activer la caméra et le micro. Ladite ONG soutient dans son rapport « qu'il est difficile de savoir quels outils sont utilisés, vendus ou achetés et détournés de leur utilisation légitime, en raison de l'absence de transparence qui caractérise le secteur de la surveillance ». Autrement dit, Amnesty n'a aucun moyen de prouver l'existence d'un contrat de vente entre « NSO group » et le Maroc. Pour sa part, le Royaume dit rejeter catégoriquement les derniers rapports d'Amnesty International, étant donné qu' « ils sont dictés par un agenda n'ayant aucun lien avec la défense des droits de l'Homme en tant que valeurs universelles ». Le Gouvernement marocain considère ainsi qu'il s'agit d' "une campagne de diffamation internationale injuste" et exige de cette ONG "une réponse officielle, qui comprend toutes les preuves matérielles auxquelles cette organisation aurait eu recours pour porter préjudice au Maroc", c'est ce qu'a fait savoir un communiqué du porte-parole du gouvernement, Saaid Amzazi, le 2 juillet. En réaction à ces allégations, les autorités marocaines ont également demandé à Amnesty International de "présenter les preuves supposées qu'elle a adoptées pour élaborer son rapport du 22 juin dernier" et "sont toujours en attente d'une réponse à la lettre du Chef du Gouvernement". Face à l'absence d'une réponse officielle de la part de cette ONG, le Maroc pointe du doigt Amnesty, pour « acharnement systématique et continu depuis des années contre les intérêts du Maroc et le mépris des avancées et acquis qu'il a réalisés et qui sont reconnus mondialement, notamment dans le domaine des droits de l'Homme ». L'Etat marocain pourrait-il déposer plainte pour diffamation ? Pour Maître Mourad Elajouti, « le rapport publié par Amnesty international portant des allégations d'espionnage, comporte plusieurs propos diffamatoires qui peuvent donner lieu à une action civile devant les juridictions du Royaume-Uni », explique cet avocat au barreau de Casablanca, dans une note juridique, tout en rappelant que le rapport n'apporte « aucune preuve formelle » de l'utilisation de ce logiciel par les autorités marocaines pour espionner le téléphone de Omar Radi. Ainsi, ces allégations peuvent facilement être réfutées par des experts en sécurité informatique, selon la même source, « les arguments avancés se résument à des noms de domaines trouvés dans l'historique du téléphone suspecté, mais ne prouvent en aucun cas un lien avec les autorités marocaines ou les services de renseignements ». Dans le même registre, cet avocat estime que « l'analyse juridique initiale du dossier permet d'ores et déjà de dire que les chances de gagner cette action en réparation sont très prometteuses. Au-delà de la compensation financière, gagner ce procès permettra à la fois de discréditer cette ONG et ses rapports et revaloriser l'image de notre pays vis-à-vis de l'opinion internationale », indique-t-il. Notons qu'au Royaume-Uni, les personnes physiques, les entreprises légalement constituées et les associations peuvent intenter des poursuites judiciaires pour diffamation, suite à l'adoption par le parlement britannique d'une nouvelle loi de diffamation (Defamation Act). Celle-ci est entrée en vigueur en 2014. En vertu de la législation britannique, la question importante à prendre en compte n'est pas de savoir comment la déclaration diffamatoire a impacté la victime, mais l'impression qu'elle qui est susceptible de faire sur les personnes qui la lisent. Ainsi, Me Elajouti appelle à « intenter une action en justice à l'encontre d'Amnesty International pour diffamation devant les tribunaux anglais », conclut-il.