Matthias Fekl a annoncé lundi l'abandon du vote électronique pour les Français de l'étranger pour les élections législatives de juin, invoquant des raisons de sécurité dans un contexte électoral marqué par des soupçons de cyber-déstabilisation imputée notamment à la Russie. Cette décision a été prise « sur la base des recommandations des experts de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes informatiques (ANSSI) et en tenant compte du niveau de menace extrêmement élevé de cyberattaques qui pourrait affecter le déroulement du vote électronique », explique le secrétaire d'Etat chargé des Français de l'étranger dans un communiqué du Quai d'Orsay. « En raison de ce contexte, il a été jugé préférable de ne prendre aucun risque de nature à compromettre le scrutin législatif pour les Français de l'étranger », ajoute-t-il. Le vote électronique a été instauré en France en 2012, uniquement pour les élections législatives – pour les électeurs inscrits dans l'une des 11 circonscriptions électorales à l'étranger – et pour les élections des conseillers consulaires. En dehors de ces deux élections, le vote se fait en personne au bureau de vote ou par procuration. « L'exercice du droit de vote de nos compatriotes à l'étranger pour les législatives se déroulera donc dans des conditions identiques à celles de l'élection présidentielle », souligne le Quai d'Orsay. « A cette fin, les Français inscrits sur les listes électorales pourront exercer leur droit de vote à l'urne dans les mêmes conditions que lors de l'élection présidentielle. » « Les votes par correspondance et par procuration seront facilités et encouragés », ajoute-t-il. Selon des données provisoires publiées par l'Insee ce lundi, 1,3 million de Français de l'étranger étaient inscrits sur une liste consultaire au 15 février. Lors d'une audition devant le Sénat le 18 janvier, le directeur de l'ANSSI Guillaume Poupard avait exprimé des réserves sur le vote électronique, disant notamment ne pas y être favorable. « Aujourd'hui, quand on met en regard les capacités de sécurisation que l'on a, même en faisant beaucoup d'efforts, même avec des gens très sérieux, et le niveau des attaquants potentiels (…), on a du mal à totalement rassurer », avait-il dit. L'annonce de la suspension du vote électronique a été critiquée par plusieurs élus, notamment Frédéric Lefebvre, député LR des Français d'Amérique du Nord, qui a dénoncé une « mesure inacceptable » et lancé une pétition en ligne invitant le gouvernement à revenir sur sa décision. L'ancienne secrétaire d'Etat au Numérique et à l'Innovation Axelle Le Maire, qui a démissionné le 27 février pour rejoindre l'équipe de campagne du candidat socialiste à l'élection présidentielle Benoît Hamon, a pour sa part dénoncé sur Twitter « un déni démocratique ». « Modifier sans débat un mode de scrutin à 3 mois d'une échéance électorale, amateurisme ou autoritarisme ? », écrit-elle. La menace d'une cyber-déstabilisation a surgi ces derniers mois en France, avec en toile de fond les soupçons de piratage russe qui ont entaché les élections américaines de novembre dernier. L'équipe de campagne d'Emmanuel Macron s'est notamment alarmée de la multiplication d'attaques visant le site du mouvement « En Marche! » et a appelé les autorités françaises à prendre des mesures pour apporter les garanties d'un déroulement « normal » du scrutin présidentiel. La question a été évoquée lors d'un conseil de défense la semaine dernière – une première – au cours duquel François Hollande a demandé la mobilisation de tous les moyens face aux cybermenaces dans la perspective des élections présidentielle et législatives du printemps. En février, les Pays-Bas avaient eux aussi annoncé leur décision de ne pas avoir recours au vote électronique lors des élections législatives prévues le 15 mars prochain, invoquant de possibles piratages informatiques.