Après un procès en destitution vécu comme un « enfer » et une « humiliation« , le président américain Donald Trump a célébré son acquittement comme une victoire politique à même de booster ses chances en vue de rempiler pour un second mandat. En face, le clan démocrate fragilisé par l'échec de l'impeachment, se trouve divisé suite au cafouillage de la première étape des primaires dans l'Iowa. M. Trump a bénéficié de la loyauté totale de son camp républicain au Sénat. A l'exception de l'ancien candidat à la présidence, Mitt Romney, le Grand Old Party (GOP) est resté très soudé, à l'image de la base électorale du parti où moins de 10 pc était pour le procès. Le Sénat, à majorité républicaine, avait en effet innocenté M. Trump des accusations d'abus de pouvoir et d'entrave au travail du Congrès. En barrant la voie à la convocation de témoins, il a, très vite, mis fin à une procédure qui remet en question la gestion des relations entre Washington et Kiev et surtout qui a terni le parcours du 45ème président devenu le troisième de l'histoire américaine à être mis en accusation après Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998. Signe de la division extrême de la classe politique et, par-delà, de tout un pays, les législateurs ont voté selon les lignes partisanes – 48 à 52 et 47 à 53 – contre les deux articles d'accusation, loin des 67 voix exigées par la Constitution pour condamner le président et le démettre de ses fonctions. A huit mois de la présidentielle, les observateurs s'accordent que Donald Trump, désormais blanchi, se trouve sur une bonne passe. A la veille de son acquittement, son taux d'approbation a frôlé la barre de 50 pc, sa cote la plus élevée depuis son entrée en fonction début 2017. Ce gain de popularité est largement attribué à une augmentation du soutien de sa base républicaine mais aussi des indépendants. Un sondage Gallup, publié la semaine écoulée, a révélé que 94% des républicains approuvent l'action de Trump, contre 88% début janvier. Dossier crucial pour les Américains, l'économie est au beau fixe. Le pays se trouve dans le cycle de croissance le plus long de son histoire. Le chômage est au dessus de 3,5 pc et la bourse multiplie les records. A l'occasion du traditionnel discours sur l'état de l'Union, Donald Trump n'a d'ailleurs pas manqué l'occasion de vanter, sur un ton triomphaliste, « le grand comeback américain ». « Nous avons désormais l'économie la plus florissante du monde. Une économie que le monde envie », s'est-il réjoui. Dans une atmosphère tendue marquée par les dissensions partisanes, le Locataire de la Maison Blanche a défendu son bilan économique et social ainsi qu'en politique étrangère et s'en est pris à ses adversaires démocrates, dont son prédécesseur Barack Obama. « En seulement trois ans, nous avons brisé la mentalité du déclin américain et nous avons rejeté la réduction de la destinée américaine », a-t-il affirmé. « Nous avançons à un rythme qui était inimaginable il y a peu de temps et nous n'y retournerons jamais », a-t-il promis, les yeux rivés sur le 3 novembre prochain, date de l'élection présidentielle. Fustigeant le projet de couverture santé universelle « Medicare For All » défendu par plusieurs candidats démocrates à la présidentielle, il a plaidé en faveur notamment d'une interdiction des soins de santé gratuits pour les migrants clandestins et promis que le mur à la frontière mexicaine, une autre promesse de campagne, s'étalera sur 800 kilomètres l'année prochaine. En politique étrangère, Donald Trump a mis en avant la renégociation de plusieurs traités internationaux, dont l'accord commercial avec la Chine, le combat mené contre le terrorisme avec les raids contre l'ancien leader de « l'Etat islamique » Abu Bakr al-Baghdadi, et le général iranien Qasem Soleimani ainsi que l'engagement de mettre fin à la longue guerre en Afghanistan et rapatrier les troupes américaines. Dans une autre allocution de plus d'une heure lors d'un événement festif au lendemain du verdict du Sénat, M. Trump a de nouveau donné l'air d'un président en campagne. « C'est un jour de célébration parce que nous avons traversé l'enfer (…). Nous avons traversé l'enfer injustement – nous n'avons rien fait de mal. J'ai rien fait de mal », a-t-il soutenu avant de s'en prendre, de manière virulente, à la présidente démocrate de la Chambre basse, Nancy Pelosi et au président du comité du renseignement, Adam Schiff. « Ces gens sont vicieux. Adam Schiff est une personne vicieuse et horrible. Nancy Pelosi est une personne horrible », a affirmé le Locataire de la Maison Blanche. Déjà à son arrivée au Capitole pour le discours sur l'état de l'Union, M. Trump a refusé de serrer la main tendue par Mme Pelosi, laquelle s'est empressée, à la fin, de déchirer sa copie du discours présidentiel, traduisant l'ambiance délétère à Washington. Sans ménagement, le président américain s'est aussi vite débarrassé de deux responsables de son administration qui ont témoigné à la chambre des représentants en novembre dernier dans l'enquête pour sa destitution. L'ambassadeur des Etats-Unis auprès de l'Union européenne, Gordon Sondland, et le conseiller sur les affaires européennes au sein du Conseil de sécurité nationale (NSC) à la Maison Blanche, le lieutenant-colonel Alexander Vindman, ont été limogés. Soulagé du procès qui plane sur sa présidence, Donald Trump ne s'en est pas privé de se réjouir des déboires du clan démocrate qui peine encore à trouver un challenger à la hauteur. Et pour cause, le cafouillage qui a accompagné la première étape de la primaire dans l'Etat de l'Iwoa n'est pas pour rassurer. Les résultats définitifs dans les caucus de cet Etat du Midwest ont été anormalement retardés par des problèmes de dépouillement des voix, créant une confusion et une frustration généralisées. Plusieurs candidats à la primaire démocrate, électeurs et médias américains ont exprimé leur frustration. Et à la surprise générale, c'est le jeune maire de South Bend dans l'Indiana, Pete Buttigieg qui est arrivé en tête devant le sénateur du Vermont, Bernie Sanders, la sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren, alors que l'ancien vice-président Joe Biden, donné favori au niveau national, s'est contenté d'une modeste quatrième place devant la sénatrice du Minnesota Amy Klobuchar. En l'absence de favori clair et, à la veille de la primaire du New Hampshire, sept des principaux candidats du parti continuent à s'affronter, parfois sur un ton acerbe. L'enjeu est d'identifier le candidat qui serait le mieux placé pour vaincre le président Trump: un progressiste capable de galvaniser la base démocrate ou un centriste en mesure de fédérer une large coalition. L'ancien maire de New York, Mike Bloomberg, demeure la grande inconnue de cette course démocrate. Ayant choisi de faire l'impasse sur les débats et les quatre premières élections primaires, il continue à mener campagne à coups de millions de dollars et à s'attirer des soutiens de taille. Le milliardaire et magnat des médias entend se concentrer sur le Super Tuesday (Super mardi), lorsque 14 Etats, dont certains des plus peuplés et dotés de plus de délégués, organisent leurs primaires le même jour le 3 mars. Les démocrates allaient-ils s'entendre vite sur un candidat à la présidentielle ou plutôt maintenir un long et périlleux marathon électoral? En attendant, la base républicaine est confiante: Donald Trump est bien parti pour quatre ans de plus à la Maison Blanche.