Depuis le 1er janvier, la Suisse permet aux fraudeurs du fisc qui se dénonceraient spontanément d'échapper aux poursuites et amendes mais les dossiers traités dans ce cadre ne portent pour l'instant que sur des montants "plutôt faibles", selon l'Agence télégraphique suisse (ATS). En trois mois, près de 50 dossiers sont parvenus aux autorités du canton (république) du Jura, qui proposent une procédure simplifiée. Les sommes sont relativement faibles, entre 50 mille et 200 mille francs (1FS =7 DH environ), mais il y a aussi quelques "gros poissons", ont indiqué les responsables jurassiens. "Nous sommes dans nos objectifs après un démarrage difficile" en raison de l'opposition de la Confédération helvétique "à notre procédure, qui a ensuite été avalisée", souligne Charles Juillard, ministre jurassien des finances, espérant voir ressurgir 300 millions de francs en cinq ans. Charles Juillard précise que l'amnistie fiscale suscite un "intérêt énorme" de la population. "Nous avons eu de nombreuses demandes de renseignements et les personnes concernées nous contactent directement ou le font anonymement via un notaire ou des intermédiaires financiers", a-t-il expliqué. Dans le canton de Berne, 110 cas étaient pendants à la mi-mars, a indiqué Yvonne von Kauffungen, porte-parole de l'administration fiscale. Presque tous concernent des personnes physiques et dans 80 pc des cas, il s'agit de fortune non déclarée. A Zurich, 133 annonces spontanées ont été enregistrées en deux mois et demi, selon le porte-parole de la direction des finances Roger Keller. En guise de comparaison, il signale que même avant l'amnistie, entre 250 et 300 personnes s'auto-dénonçaient chaque année. Les 56 cas déjà réglés ont permis à l'Etat et aux communes concernées de récupérer quelque 8 millions de francs. A Lucerne également, seuls 22 cas sont en cours de traitement, des petits montants pour la plupart. Le conseiller national zurichois Hans Kaufmann (UDC), qui a participé à l'élaboration du projet, explique ce maigre butin par le manque d'information. A l'exception du Jura en effet, les cantons se sont montrés plutôt réservés sur la communication. Dans le canton du Tessin, les fraudeurs sont également dans l'expectative car, seules une quinzaine de personnes se sont manifestées, peut-être à cause de la discussion sur une amnistie fiscale cantonale. Pour Lino Ramelli, chef de l'office tessinois des impôts, "l'intérêt est manifeste mais bien peu de personnes se sont annoncées jusqu'ici". Quant au ministre vaudois des finances, Pascal Broulis, il estime que l'amnistie fiscale n'est "éthiquement pas acceptable" par rapport à ceux qui paient correctement leurs impôts. Le grand argentier vaudois dit toujours être "très dubitatif sur cette opération très compliquée", affirmant ne pas avoir connaissance de fraudeurs qui se seraient dénoncés spontanément depuis janvier. La "mini-amnistie fiscale", qui permet à chacun de déclarer leurs avoirs sans être amendés ni poursuivis, oblige néanmoins les contribuables à rembourser les intérêts sur une période de dix ans. La dernière amnistie fiscale en Suisse date de 1969. Acceptée en votation populaire (référendum), elle avait fait remonter à la surface quelque 11,5 milliards de francs, soit l'équivalent actuel de 35,4 milliards. D'autres opérations de ce type avaient déjà eu lieu en 1945 et 1940.