Après plus de neuf ans de présence militaire en Afghanistan, les pays occidentaux, et à leur tête le Royaume-Uni et les Etats-Unis, se préparent à marquer un changement important de leur politique dans ce pays, ou le mouvement des Taliban continue de poser une réelle menace. .-Par Abdelghani Aouifia-. La conférence internationale sur l'Afghanistan, que le Premier ministre britannique présidera jeudi à Londres, sera l'occasion pour les dirigeants des pays de l'OTAN de tracer les contours de cette nouvelle stratégie s'articulant sur la force militaire et des récompenses pour les combattants talibans qui acceptent de rendre les armes. Le recours à cette approche, qualifiée par certains observateurs de "politique du bâton et de la carotte", traduit la conclusion à laquelle sont parvenus les dirigeants occidentaux quant à l'impossibilité de remporter la guerre contre le taliban par la seule force militaire. Intervenant la semaine dernière devant le parlement de son pays, le ministre britannique des Affaires étrangères, David Miliband, a appelé à une nouvelle stratégie politique fondée sur un équilibre entre force militaire et effort politique. Ces efforts devraient impliquer la tenue de négociations de paix avec le mouvement taliban, comme l'a laissé entendre lundi le commandant des forces de l'OTAN en Afghanistan, le général Stanley McChrystal. D'après le général Stanley, l'augmentation des effectifs de l'OTAN en Afghanistan devra conduire à des négociations de paix avec ce mouvement évincé du pouvoir vers la fin de 2001 par les forces de l'OTAN dans le sillage des attentats du 11 septembre contre les Etats-Unis. Les participants à la conférence de Londres iront même jusqu'à mettre en place une structure devant servir de canal de dialogue avec le mouvement Taliban, rapporte la presse londonienne, qui se réfère à un projet de communiqué final devant sanctionner les travaux de la conférence. C'est dans ce même cadre que Kai Eide, plus haut responsable onusien à Kaboul, a appelé à retirer les noms de certains hauts dirigeants des Taliban de la liste de sanctions de l'Onu comme prélude à des négociations directes avec le groupe. Le Président afghan Hamed Karzai a adopté l'appel, soulignant, lors d'une escale lundi à Istanbul en route vers Londres, qu'il allait faire une déclaration officielle dans ce sens, lors de la conférence de Londres. Les dirigeants de l'OTAN veulent, toutefois, envoyer un message évitant toute interprétation de la nouvelle approche comme un signe de faiblesse face à un mouvement qui semble intraitable et qui inflige de lourdes pertes aux forces de l'alliance transatlantique. C'est ainsi que le général Nick Carter, commandant des troupes de l'OTAN dans le sud de l'Afghanistan, a annoncé que ces forces se préparent à lancer une vaste offensive dans la très périlleuse province d'Helmand, fief du mouvement Taliban dans le sud afghan. Les observateurs s'attendent à ce que d'autres pays membres de l'OTAN suivent l'exemple de Londres et Washington et envoient des renforts en Afghanistan. Actuellement, quelque 113.000 soldats des forces internationales sont déployés en Afghanistan, auxquels s'ajouteront 30.000 nouveaux soldats américains conformément à une annonce faite en décembre par les responsables de la Maison Blanche. Toujours sur le plan militaire, l'OTAN poursuivra les efforts pour renforcer l'armée et la police afghanes. Brown a fait savoir lundi que "les succès" réalisés sur ce plan seront annoncés lors de la conférence de Londres, avec une hausse notable du nombre de troupes régulières afghanes. L'OTAN entend porter cette année le nombre des forces afghanes à 134,000 soldats et celui de la police à 90.000 agents, a dit le chef du Downing Street. Outre l'offre de solution politique à la question afghane et la détermination militaire de ne pas lâcher prise face aux taliban, la conférence de Londres marquera le lancement d'un autre plan ciblant les combattants talibans, en leur offrant argent et privilèges pour les convaincre de quitter les rangs du mouvement et rejoindre le processus de reconstruction de leur pays. De telles initiatives devront se heurter, selon les observateurs, à plusieurs facteurs dont le caractère complexe de la société tribale en Afghanistan ou les allégeances religieuses et les loyautés idéologiques l'ont toujours emporté. Les commentateurs de la presse internationale et londonienne soulignent l'importance du rôle de la nébuleuse Al-Qaïda dans l'équation afghane, soulignant que le réseau d'Oussama Ben Laden ne ménagera aucun effort pour faire échouer les tentatives occidentales. Al-Qaïda fera prévaloir, d'après eux, les relations de loyalisme qu'elle a pu tisser avec les chefs de tribus non seulement en Afghanistan mais surtout dans la zone tribale pakistanaise de Waziristân pour maintenir l'Afghanistan en première ligne de sa confrontation avec l'Occident.