Elle a quatre vingt ans et vient d'avoir, mardi à Errachidia, son acte d'un mariage, consommé pourtant depuis 68 ans. Lakbira Khouya, dont le mari vient de décéder en décembre dernier, en était fière et contente. Par Mustapha Elouizi
La campagne nationale d'authentification des actes de mariage, initiée partout dans le Royaume par le ministère de la justice, lui a été d'un grand profit. Elle, dont l'ainée de ses quatre enfants a l'âge de 51 ans, n'avait jamais cru devoir besoin d'un acte de mariage. Plusieurs procédés administratifs nécessitaient, en fait, l'existence d'un tel document. Venue tôt le matin au site où le tribunal de première instance a installé une tente, érigée en tribunal "ambulant", Lakbira, encore habillée de son costume blanc de deuil, avait besoin de l'aide de Mohamed, son petit fils de 24 ans, sur lequel elle s'appuyait. Elle a suivi méticuleusement l'audience "mobile", examinant une cinquantaine de dossiers relatifs à l'authentification d'actes de mariage. "A l'époque personne ne pensait authentifier son mariage par un acte administratif, il suffisait de témoins et d'une cérémonie à laquelle prenaient part tous les voisins et de lire la Fatiha", a-t-elle dit en langue amazighe et sur un débit très lent. Une fois le gouverneur de la province M. Mohamed Amghouz, présent lors de cette cérémonie, lui délivre son document, Lakbira a porté longuement son regard sur ce document, l'examinant de ses mains, comme si elle s'assurait de sa véracité, tellement elle s'attendait à un jour pareil. Son petit fils explique, lui, que toute la famille attend impatiemment ce document, plusieurs procédures administratives en dépendent. Outre Lakbira qui était apparemment la plus âgée des présents, plusieurs couples se sont présentés, parfois accompagnés de leurs enfants déjà à l'âge de scolarisation, pour tirer profit de cette campagne nationale d'authentification des actes de mariage, qui concernera des milliers de personnes au royaume. "Par cette campagne d'authentification des actes de mariage, le ministère vise essentiellement à rapprocher l'appareil judiciaire des citoyens et à leur démontrer que la justice est mise à leur disposition et leur service", a indiqué M. Abdelaziz Esserif, président du tribunal de première instance à Errachidia. Une centaine d'audiences a été tenue sur l'ensemble du territoire national, sous le signe "authentification du mariage: une protection de la famille", l'objectif étant de généraliser l'authentification des mariages, conformément à l'article 16 du Code de la famille. Par ailleurs, la coïncidence de cette campagne avec la date du 8 mars n'est point fortuite, mais bien ciblée, dans la mesure où l'on compte ainsi rendre hommage aux femmes marocaines qui restent souvent victimes de ces situations, et ne bénéficient souvent pas de leurs droits pourtant légitimes, du fait d'absence de documents juridiques et légaux.