La presse française était unanime, vendredi, à souligner l'ampleur des émeutes sociales qui se sont étendues d'est en ouest et gagné en violence dans une Algérie "embrasée", comme le soulignent "Libération", "France Soir" ou "Le Monde" qui résume la profondeur du malaise sous le titre: "Une Algérie riche, des Algériens pauvres". Le correspondant de "Libération" rapporte que les manifestations et émeutes se sont propagées comme une trainée de poudre "dans toute l'Algérie, dressant le même constat que son confrère du +Monde+ sur place, qui a relevé que l'extension des émeutes d'est en ouest et dans de grandes villes, peut difficilement être banalisée". Certes, la hausse spectaculaire des prix des denrées de base a été le déclencheur de ce nouveau cycle de colère de la population, mais la presse française pointe d'autres causes du mal en plus de la vie chère: chômage, manque de logements et surtout ce "sentiment de mal vie" chez la jeunesse algérienne indignée de sa situation dans un pays riche, qui croule sous une masse monumentale de revenus des hydrocarbures. Car la population "ne comprend pas comment sa situation peut être si difficile dans un pays riche du pétrole qui se vante de disposer d'un confortable tapis de 120 milliards d'euros de réserves. Le sentiment d'injustice croît et les Algériens se sentent abandonnés", écrit +Libération+. Les journaux français font également le parallèle avec les émeutes de la faim d'octobre 1988 à Alger qui avaient fait plusieurs centaines de morts. Aussi, les promesses du gouvernement d'un retour à un +prix normal" de l'huile et du sucre paraissent "fortement décalées par rapport à un mouvement qui exprime un profond sentiment de mal vie chez la jeunesse algérienne", estime "Le Monde". Et ce "mal de vivre n'est pas prêt de disparaître", souligne le même quotidien dans un autre article intitulé: "Une Algérie riche, des Algériens pauvres". L'Etat algérien "baigne dans une opulence financière enviable" grâce aux prix élevés du pétrole qui lui ont permis de se constituer "un matelas de devises de 115 milliards de dollars de réserves de change". Mais cette "pléthore d'argent ne fait que masquer les maux chroniques du pays. Le régime politique est étouffant et sclérosé. Et le pays est mal géré", souligne "Le Monde". "L'argent public coule à flot, mais il est trop souvent mal utilisé. Au lieu de servir à gommer les disparités sociales, il les creuse au profit d'une caste de privilégiés proches du pouvoir". Pour "Libération" comme pour "Le Monde" la "gabegie est souvent la règle" et la corruption "omniprésente". Et les Algériens "savent tout cela" et se révoltent, car le "mal vivre n'est pas prêt de disparaitre", conclut "Le Monde". En écho, "Libération" cite le politologue Rachid Grim: "La jeunesse algérienne voit la richesse insolente de ceux qui ont le pouvoir, elle voit les scandales quasi quotidiens de corruption et la gabegie de ces mêmes milieux. Tout cela ne peut mener qu'à la rue. D'autant qu'il n'y a absolument aucune autre possibilité pour le peuple de s'exprimer".