Le Conseil consultatif des droits de l'Homme (CCDH), qui a été chargé par SM le Roi Mohammed VI de veiller au suivi de la mise en Œuvre des recommandations de l'Instance Equité et Réconciliation (IER), a lancé le chantier de l'application de ces recommandations dès achèvement des travaux de l'IER. Selon un rapport présenté jeudi à la presse sur le bilan du travail accompli dans le cadre de cette mission, le CCDH indique avoir réussi à concrétiser un grand nombre de recommandations de l'IER, grâce notamment à l'existence d'une volonté politique appuyant et soutenant ce processus et lui garantissant la réussite dans le contexte de la transition démocratique que connait le Royaume. De nombreux mécanismes et instruments ont été ainsi mis en place pour accompagner la mise en oeuvre de ces recommandations, évaluer les actions réalisées, préserver les acquis, mettre en place des garanties visant à immuniser l'avenir contre toute répétition de ces violations et réaffirmer le choix du Maroc dans le domaine des droits de l'Homme et des libertés, souligne le document. Le CCDH précise, dans ce cadre, avoir élaboré un mémorandum sur "la mise à niveau de la justice et le renforcement de son indépendance", et mis en place une commission spécialisée qui a proposé d'ériger la justice en pouvoir dans la Constitution, de garantir son indépendance par rapport aux pouvoirs législatif et exécutif et de veiller à ce qu'ils n'entravent pas le travail judiciaire. Concernant l'organisation du Conseil supérieur de la magistrature, le CCDH a proposé l'adoption d'une loi organique qui fixe ses prérogatives, sa méthode de travail et l'élection de ses membres, ainsi que les critères de promotion et de sanction des magistrats. S'agissant des dossiers non élucidés, le CCDH affirme que le parachèvement des investigations sur ces dossiers a revêtu une "urgence absolue ", afin de déterminer les circonstances de décès et les éventuels lieux d'inhumation. Ces travaux avaient également pour objectif de faciliter le contact entre les familles des victimes et le Parquet, dans les cas qui exigent l'intervention de cette instance, afin de déterminer l'identité des victimes et résoudre les problèmes juridiques et administratifs y afférents. Evoquant les dossiers de disparition, parvenus au Conseil après la fin du mandat de l'IER, le CCDH a déploré le fait de n'avoir pas pu achever ses investigations pour manque de temps et en raison de la faiblesse des données relatives à des cas relativement anciens. Le rapport, qui détaille toutes les actions réalisées par le CCDH dans le cadre de sa mission, rappelle notamment que suivant le programme de réparation communautaire proposé par l'IER et qui vise la réhabilitation des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux des régions ayant connu des violations graves des droits de l'Homme, le CCDH a signé dix huit conventions entre 2006 et 2009 avec des partenaires publics et privés en vue d'appuyer la mise en oeuvre des différents plans de réparation qui portent sur la préservation de la mémoire, le renforcement des capacités, la création de projets générateurs de revenus, et la promotion des droits humanitaires des femmes. Toujours dans le cadre de la mise en Œuvre des recommandations de l'IER, la commission de suivi de ces recommandations a arrêté les principales missions qui lui incombent dans le cadre de la réparation individuelle. Il s'agit notamment de la finalisation des volets techniques et administratifs relatifs aux décisions d'arbitrage et des différentes dispositions de leur exécution, l'actualisation de la base de données, la préparation des dossiers de couverture médicale, l'établissement de la liste des bénéficiaires des recommandations de l'IER dans le domaine de l'intégration sociale, ainsi que la détermination des cas concernés par la régularisation de leur situation administrative et financière. Le CCDH rappelle à cet égard que le nombre de dossiers traité par l'IER et dont la mise en oeuvre a été poursuivie par la commission de suivi, a atteint 18457 dossiers auxquels s'ajoute celui des victimes du bagne de Tagounit qui ont bénéficié d'une recommandation spéciale de l'IER. Concernant l'intégration des victimes dans un système de couverture médicale de base, la coopération entre le CCDH et le gouvernement a été couronnée par l'adoption d'une proposition permettant aux victimes de bénéficier de l'assurance maladie obligatoire dont la gestion a été confiée à la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS). Dans ce cadre, le CCDH a traité 5011 dossiers et Œuvre actuellement à la distribution de 3605 cartes d'adhésion à leurs bénéficiaires. Le CCDH a également mis en oeuvre une recommandation de l'IER portant sur la régularisation de la situation administrative et financière de 514 dossiers qui ont été soumis à la Primature et aux secteurs concernés. 152 de ces dossiers ont été résolus. D'autre part, le CCDH se penche sur l'élaboration d'un avis concernant la mise en oeuvre des recommandations de l'IER dans le domaine de la rationalisation de la gouvernance sécuritaire,, en prenant en considération la complémentarité entre l'ensemble des recommandations relatives aux réformes économiques et institutionnelles, la promotion de la culture des droits de l'Homme, le développement de politiques publiques basées sur l'implication des acteurs politiques et civils, ainsi que des institutions nationales, des experts et des chercheurs scientifiques. S'agissant de la préservation de la mémoire, le rapport rappelle que le CCDH a constitué un groupe de travail en vue d'approfondir la réflexion sur cette question et de poursuivre le chantier de modernisation des archives nationales. Le Conseil a ainsi organisé des consultations avec les services de la Primature et du ministère de la Culture en vue d'accélérer l'adoption des décrets d'application de la loi sur les archives 69/99 en date du 30 novembre 2007, qui organise les conditions de la préservation des archives, les délais de leur ouverture au public, les conditions de leur consultation et les sanctions encourues en cas de leur altération. Dans ce même cadre, le CCDH et la délégation de la Commission européenne ont signé, le 19 novembre 2009 à Rabat, une convention de financement, d'un montant de 8 millions d'euros, portant sur le programme d'accompagnement aux recommandations de l'IER en matière d'histoire et de mémoire. Le CCDH a aussi signé une convention de partenariat avec le Centre Cinématographique Marocain en avril 2009, qui a pour objectif de promouvoir la culture des droits de l'Homme et d'encourager la création des productions cinématographiques relatives à la préservation de la mémoire et aux violations passées des droits de l'Homme. Le rapport souligne par ailleurs les positions du CCDH dans le cadre de l'examen et de la discussion du projet du Code de la presse et des journalistes professionnels, notamment sur les aspects relatifs aux libertés publiques et aux droits de l'Homme, rappelant le mémorandum adressé au Premier ministre dans lequel le Conseil insiste sur la nécessité d'approfondir l'examen du projet en prenant en considération le rôle et les responsabilités des média dans l'information des citoyens dans le processus de construction démocratique, la consolidation des acquis constitutionnels en matière de liberté d'expression et la nécessité de développer un environnement professionnel à même de suivre les dynamiques de développement social que connaît le Maroc.