Une grève générale paralyse mercredi l'Espagne, la première du genre depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement socialiste en 2004, pour protester contre la réforme du marché du Travail et la politique économique du gouvernement. -Par Jalila Ajaja- Convoquée à l'appel des deux principales centrales syndicales , l'Union Générale des Travailleurs (UGT) et la confédération syndicale des commissions ouvrières (CC.OO), la grève générale a été décidée pour protester contre la réforme du marché du Travail adoptée récemment par l'Exécutif espagnol, une réforme qui facilite la flexibilité horaire et le licenciement économique. Selon les défenseurs des travailleurs, cette réforme est " la plus grande attaque contre les droits des travailleurs jamais enregistrée en cinquante ans ". La réforme du marché du Travail a été adoptée le 9 septembre dernier par le Congrès des députés espagnol (Chambre basse) après deux longs mois d'âpres discussions. Considérée par l'Exécutif de Jose Luis Rodriguez Zapatero comme extrêmement nécessaire dans l'un des secteurs les plus touchés par la crise économique, -l'Espagne souffre du niveau de chômage le plus élevé de la zone Euro-, la réforme, qui semble satisfaire le Patronat, est catégoriquement rejetée par les syndicats qui dénoncent une réforme qui encourage les licenciements " low-cost " et constitue une régression sociale très sérieuse. Cette réforme fait partie d'un paquet d'autres mesures d'austérité adopté par l'Exécutif socialiste pour faire sortir le pays de la crise économique, notamment le gel des pensions, la baisse des salaires des fonctionnaires, la réduction des budgets ministériels, la suppression de certaines aides sociales comme le fameux " chèque-bébé " ou les aides aux chômeurs de longue durée. La grève générale, qui devra paralyser le pays ou presque, étant donné que syndicats et gouvernement sont parvenus la semaine dernière à un accord considéré comme " historique " sur le service minimum à garantir, sera un franc succès, assurent les deux principales centrales syndicales du pays (CC.OO et UGT), alors que le patronat, plus circonspect, lui prédit un échec retentissant. Polémique sur l'opportunité de la grève et son timing Mais, la date de cette grève générale soulève une large polémique en Espagne. Les deux centrales syndicales, considérées comme des alliées du gouvernement socialiste, ont essuyé de sévères critiques sur leur " duplicité" en décidant de convoquer une grève qualifiée comme de " la poudre aux yeux", alors que la réforme objet de la grève a déjà été adoptée. De leurs côtés, les deux syndicats (UGT et CC.OO) s'en défendent et affirment que cette grève pourrait amener le gouvernement à " la réflexion et au retrait de la réforme polémique ", se disant convaincus du succès du débrayage. Pour sa part, la confédération espagnole des organisations entrepreneuriales (CEOE-Patronat) prédit à cette grève un échec fracassant, affirmant que tout succès éventuel de la grève serait du à " la présence de piquets de grève sauvages et à un service minimum insuffisant". Une grève généralisée qui ne fait pas l'unanimité Le mot d'ordre de grève générale lancé par UGT et CC.OO ne semble pas convaincre d'autres syndicats notamment ceux des travailleurs autonomes qui ne voient aucune utilité à cette grève qui arrive " trop tard ". Pour la Fédération nationale des associations des travailleurs autonomes (ATA) cette grève est " inutile " et " ne changera rien ". La fédération, qui affirme ne pas suivre cette grève, estime que le débrayage " aura un coût économique, mais aucun coût politique ". " Ni la réforme du marché du Travail sera modifiée, ni le plan d'ajustement économique, encore moins la politique du gouvernement. Pourquoi dès lors suivre une grève générale inutile ", assure-t-on depuis l'ATA qui se défend d'être défaitiste. La Fédération assure également ne pas être d'accord avec une grève qui arrive trop tard et qui ne fera que "paralyser l'économie du pays et porter atteinte à l'image extérieure de l'Espagne, pour ne rien récolter en fin de compte ". Cette même crainte pour l'image de l'Espagne à l'extérieure est partagée par l'Institut espagnol de l'Entreprise familiale (IEF), qui a annoncé qu'il ne suivra pas une grève qui aura "un effet négatif sur l'image de l'Espagne chez les investisseurs internationaux". L'IEF, qui regroupe une centaine d'entreprises leaders en Espagne, ne voit pas d'un bon Âœil cette grève qui dénonce une réforme du marché du Travail, d'une extrême nécessité alors que le pays enregistre un taux de chômage frôlant le 20 pc.