Ferme rappel de la raison d'être de la simplification des procédures d'investissement et des directives royales données à ce sujet, triste constat que cette étape primordiale pour le développement économique du pays n'est, regrettablement, pas encore entièrement franchie, le discours de SM le Roi, prononcé à l'occasion de l'ouverture de la 1ère session de la 1ère année législative de la 10ème législature, ne se veut pas simple critique d'une réforme administrative mal réalisée, mais d'abord et surtout l'éveil de la conscience citoyenne sur les nécessaires corrections à opérer sur la conception que l'on se fait du service public. Article 35 de la Constitution : « L'Etat garantit la liberté d'entreprendre ». Le Maroc ayant opté, depuis son indépendance, pour le libéralisme économique, cette liberté a toujours été garantie par les successifs textes fondamentaux du Royaume. En termes simples, cela veut dire que chaque citoyen désireux de prendre en main son destin et créer sa propre activité lucrative, oser se lancer dans une initiative prometteuse mais pas sans risques, investir son épargne personnelle et/ou faire appel au crédit bancaire pour financer son projet, créer des richesses et des emplois, est en droit de le faire. C'est un droit naturel que la loi ne fait qu'encadrer, et ce pour garantir la sécurité l'investisseur et la mise en jeu d'une concurrence saine et loyale. SM le Roi Mohammed VI a été intronisé le 23 juillet 1999. Le 12 octobre 1999, dans un discours prononcé à Casablanca, le Souverain insiste sur la promotion de l'investissement et l'amélioration de l'environnement de l'entreprise, revenant ensuite sur le même sujet le 25 septembre 2000, à Jorf Lasfar. L'accent est particulièrement mis sur le guichet unique dans le discours royal marquant l'ouverture de la session parlementaire d'octobre 2000. C'est, cependant, la lettre royale du 9 janvier 2002 qui est venue tracer le cadre détaillé des facilités et encouragements avec lesquels l'administration publique devrait accompagner l'acte d'investir. Il y était plus exactement question de la gestion déconcentrée de l'investissement, SM le Roi ayant alors appelé à la création des centres régionaux d'investissement (CRI). Quatorze ans plus tard, période suffisamment longue pour apporter une réponse tranchée sur le succès ou pas des démarches effectuées, le simple constat empirique permet de relever que beaucoup de choses ont effectivement changé, mais que, par rapport à l'effort consenti, assez peu de distance à été parcourue pour atteindre l'objectif ultime visé, à savoir rendre plus simple et plus rapide l'acte d'investir. Les CRI sont là, le guichet unique est là, mais la dynamique escomptée tarde à se concrétiser. Le gap entre les directives royales clairement exprimées, les moyens mobilisés et les résultats enregistrés reflètent les pesanteurs socioculturelles de l'administration publique, dont il ne semble pas facile de se débarrasser. La simplification et l'allégement des procédures liées à l'acte d'investir n'est pas un cadeau accordé par l'administration publique aux citoyens entreprenants, créateurs potentiels de richesses. C'est juste un retour à l'état normal des choses, le Maroc indépendant ayant hérité d'une culture administrative centralisatrice, procédurière et tatillonne. Le mot-clé qui doit être souligné en gros caractères, gravé au burin dans l'inconscient collectif des fonctionnaires, du simple exécutant au plus haut commis de l'Etat, est «délai». L'acte d'investir s'inscrit autant dans l'espace que dans le temps, c'est une opportunité à saisir, dans un lieu donné, à un moment donné. Le rôle du fonctionnaire ne va pas au-delà de l'immatriculation de l'entreprise, pour son encadrement juridique, l'autorisation administrative n'étant, en schéma simplifié, pas plus qu'un simple : «nous avons fini de tout consigner, vous pouvez y aller». Trouver des solutions réalistes et aisément réalisables pour palier aux manquements qui peuvent être constatés dans la constitution du dossier d'un investisseur et aux difficultés auxquels il peut être alors confronté découle d'abord d'une profonde prise de conscience du fonctionnaire qu'il s'agit là non seulement d'un devoir, mais aussi d'une participation motivée au développement socioéconomique de son pays. L'espace consacré aux procédures simplifiées relatives à l'acte d'investir existe, c'est le guichet unique. Il reste à consacrer l'esprit qui devrait le guider vers la prise de conscience de l'existence de la dimension temporelle et lui assurer la souplesse opérationnelle nécessaire pour stimuler la dynamique d'investissement. Le fondement premier est la liberté, celle d'entreprendre ayant la spécificité d'apporter emplois et richesse matérielle à la société. L'aboutissement final est justement cette prospérité tant escomptée par les Marocains. Entre les deux, en interface, l'administration publique, pressée par tous les échelons de la société d'évoluer pour s'adapter aux attentes des citoyens, qu'elle n'existe pourtant que pour servir. Les bastions de la bureaucratie résistent derrière une conception dirigiste de l'Etat qui se drape faussement des oripeaux du progrès, même si l'Histoire en a dévoilé toutes les tares intrinsèques et les tendances autoritaristes et liberticides, et ce pour éviter la perte de privilèges foncièrement nocifs au bon fonctionnement de la société. Comme le dit si bien l'adage marocain, il faut assainir l'eau avant de pouvoir en boire.