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Entretien avec Khalid Cheddadi, Président Directeur Général de la CIMR : « C'est grâce à la réforme lancée en 2003 que la CIMR est devenue ce qu'elle est aujourd'hui »
Avec une progression de 11,2% de la réserve de prévoyance à plus de 40 milliards de dirhams en valeur comptable, la Caisse Interprofessionnelle Marocaine de Retraite (CIMR) affiche de bonnes performances en 2015. Le point sur les fondamentaux qui garantissent la pérennité de son régime avec M. Khalid Cheddadi, PDG de la CIMR. L'Opinion : Quels sont les facteurs qui ont le plus contribué à l'amélioration des résultats financiers de la CIMR en 2015 ? M. Khalid Cheddadi : L'année 2015 a connu une augmentation importante en pourcentage des entreprises adhérentes mais cela reste dans le même sillage des années qui l'ont précédée. Les résultats sont plutôt à mettre en perspective dans le cadre de la réforme du régime de la CIMR lancé en 2003 et qui continue à donner de bons résultats. L'Opinion : Comment pouvez-vous améliorer davantage la qualité des services aux affiliés suivant la stratégie numérique ? M. Khalid Cheddadi : La stratégie d'amélioration des services est une stratégie que nous avons adoptée il y a longtemps. Quand je suis arrivé à la CIMR en 2003, c'était un de mes principaux axes d'action et nous avons lancé énormément de projets dans ce sens. La partie système d'information a été la partie la plus importante puisque nous avons beaucoup capitalisé là-dessus. Nous avons mis sur le web beaucoup de prestations. Aujourd'hui, la quasi-totalité du travail que doit effectuer l'entreprise adhérente se fait sur le web. L'adhésion se fait directement sur notre système Internet avec la déclaration des premiers salariés. Après, les déclarations des salaires trimestriels se font également sur le site internet. Aujourd'hui, la totalité de nos adhérents passent par le site internet pour déclarer les salaires mais aussi pour le règlement des contributions. Plus de 96% des entreprises adhérentes le font. Les quelques exceptions sont des cas d'entreprises qui ont des contraintes particulières. Côté affilié, concernant les retraités, la liquidation des dossiers est initiée sur Internet. Nous avons mis sur notre site un logiciel auquel accède le responsable ressources humaines de l'entreprises pour initier l'opération de liquidation de la pension de ses collègues et à travers lequel on fait un certain nombre de contrôles pour s'assurer que toutes les données concernant l'intéressé sont exactes et puis il y a quelques options à prendre dans la liquidation qui sont choisies par la personne concernée. Par la suite, la liquidation devient une formalité. L'Opinion : Quel est donc l'avantage pour le retraité ? M. Khalid Cheddadi : Quand les gens partent en retraite, sur le plan psychologique, ils sont un peu fragilisés. Les modalités et les démarches se font dans un environnement familier à l'affilié et cela le rassure. Et puis, une fois que le travail est fait sur le site internet, la liquidation prend deux jours. En 48 heures, le dossier est liquidé et la personne concernée peut recevoir sa pension. Un des objectifs que nous nous sommes fixés au niveau de la CIMR pour la liquidation des pensions, c'est qu'une personne qui part à la retraite ne connaisse pas de rupture dans son revenu entre la période d'activité et la période de retraite. Si la personne arrête de travailler fin juin, il faut qu'elle touche sa pension fin juillet ou le 1er août. L'Opinion : Peut-on comprendre aujourd'hui que la CIMR s'est détournée des placements immobiliers ? M. Khalid Cheddadi : Quand on fait des investissements, on fait tout le temps des arbitrages. Parce qu'à un moment donné, certains investissements sont plus intéressants que d'autres. Aujourd'hui, le secteur immobilier est un peu en perte de vitesse parce que le marché n'est pas aussi dynamique qu'auparavant et parce que les marges deviennent de plus en plus étroites et que le foncier coûte plus cher... Nous avons fait l'arbitrage entre des placements dans l'immobilier et dans d'autres secteurs. Ceci dit, nous continuons à nous intéresser à des projets de développement immobilier et la constitution d'un portefeuille locatif en bureaux ou en locaux industriels. L'Opinion : Sur quoi vous vous basez pour mesurer la pérennité de la caisse ? M. Khalid Cheddadi : Nous utilisons des études spécifiques. Nous faisons des projections de la réserve de prévoyance sur 60 ans. Ce sont des calculs qui tiennent compte de l'espérance de vie, de l'augmentation des adhésions, des hypothèses de rendements des marchés financiers... Et puis nous faisons beaucoup de calculs pour faire des projections de cette réserve de prévoyance. A mon sens, c'est l'élément le plus pertinent pour juger de la pérennité d'un régime parce que la réserve de prévoyance en définitive, c'est la réserve dans laquelle on puise quand les contributions n'arrivent pas à couvrir toutes dépenses de pension ou bien quand il y a un excédent, on affecte l'excédent à la réserve. Alors quand la réserve augmente, cela veut dire qu'il y a un excédent tous les ans. Et chez nous, quand on fait la projection, la réserve augmente sur les 60 prochaines années. En d'autres termes, il y aura un excédent chaque année sur les 60 ans à venir. Ce qui est important quand on fait ce genre de prévisions, c'est de prendre en compte des hypothèses prudentes. Parmi les hypothèses les plus déterminantes, il y a la table de mortalité. Nous utilisons une table de mortalité prospective qui comporte une augmentation annuelle de l'espérance de vie. Nous sommes la seule Caisse à procéder ainsi. Il y a aussi l'augmentation des actifs cotisants. Nous prenons une hypothèse d'augmentation des cotisants de 0,5% par an alors que nous avons enregistré sur les cinq dernières années une moyenne de plus de 3%. Et puis la dernière hypothèse importante, c'est le rendement financier. Dans ce cas de figure, nous prenons une hypothèse de rendement financier de 6% sur la valeur comptable de la réserve. Sur les dix dernières années, nous enregistrons un taux de rendement moyen de 9%. Nous sommes largement au-dessus des hypothèses. C'est très important pour que ces projections soient fiables. L'Opinion : Quelle est la différence entre la CIMR et les autres caisses de retraite ? M. Khalid Cheddadi : Je pense que la différence est perceptible au niveau de la gouvernance du fait que la CIMR est une Caisse privée d'employeurs et qui a la capacité de prendre des décisions très rapidement. La majorité des autres Caisses souffrent de la lenteur de prises de décisions mais la sonnette d'alarme a été tirée suffisamment tôt pour dire qu'il y a nécessité de réformer. Dans les conseils d'administration de ces Caisses, il y a trois parties dont notamment l'Etat, ce qui rend la prise de décision pénible parce qu'il faut mettre la main à la poche, augmenter la contribution, diminuer la prestation... Et cela n'est pas bien accueilli par les gens. L'Etat joue un rôle d'arbitre et n'a pas vocation à mettre de l'argent dans les Caisses. Il y a aussi le fait que ces régimes sont régis par des textes de lois. Pour les modifier, il faut passer par le Parlement, ce qui fait que tout changement est très difficile à enclencher. Alors qu'à la CIMR, quand il y a problème, nous avons un conseil d'administration qui se réunit très rapidement et qui prend des décisions même quand elles sont pénibles. On passe ensuite à l'assemblée générale et le tour est joué. Et c'est grâce à la réforme lancée en 2003 que la CIMR est devenue ce qu'elle est aujourd'hui.