La Russie a annoncé lundi l'expulsion pour espionnage de diplomates polonais en représailles à celle de diplomates russes de Varsovie, juste avant une réunion de l'Union européenne, qui pourrait aboutir à de nouvelles sanctions contre Moscou pour son rôle dans le conflit en Ukraine. Depuis quelques semaines, les combats ont redoublé d'intensité dans l'Est séparatiste et Kiev accuse la Russie d'envoyer des troupes de combat et du matériel militaire en renfort aux rebelles prorusses, ce que l'Otan et les observateurs de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) déployés dans la zone ont confirmé. Mais de son côté, Moscou nie catégoriquement, le président Vladimir Poutine affirmant que les rebelles se procurent des armes par eux-mêmes. Ces dernières 24 heures, six soldats et trois policiers ukrainiens ont été tués dans l'Est de l'Ukraine, selon les autorités. Dans ce contexte tendu, les ministres des Affaires étrangères de l'UE se rencontraient lundi afin de débattre de leur «stratégie». De nouvelles sanctions économiques sont à ce stade exclues. Mais les ministres européens devraient décider d'élargir la liste des personnalités dont les avoirs sont gelés et qui sont interdites d'entrée dans l'UE, visant des individus appartenant à la hiérarchie des séparatistes prorusses qui tiennent les bastions de Donetsk et Lougansk. La réunion a lieu non seulement au lendemain d'un G20 où les Occidentaux ont durement critiqué le président russe Vladimir Poutine, mais aussi après que Moscou a annoncé l'expulsion pour espionnage de diplomates polonais. «Plusieurs diplomates polonais ont déjà quitté le territoire de notre pays en raison d'activités incompatibles avec leur statut», un terme faisant généralement référence à des activités d'espionnage dans le jargon diplomatique, a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. Moscou n'a précisé ni la date ni le nombre de responsables expulsés. Réagissant, la diplomatie polonaise a néanmoins semblé calmer le jeu annonçant qu'il s'agissait d'une «réponse symétrique» à une mesure analogue de Varsovie. «Pour nous, cette affaire est close», a dit aux médias à Bruxelles le chef de la diplomatie polonaise Grzegorz Schetyna, ajoutant que les diplomates polonais expulsés seraient au nombre de quatre. «Qui aurait cru que 25 ans après la fin de la guerre froide, après la fin de la division de l'Europe (...) une telle chose pouvait se passer au c?ur même de l'Europe», avait lancé la chancelière allemande, Angela Merkel, lors d'un discours à Sydney. De son côté, le président américain Barack Obama a prévenu que «l'isolement» de la Russie «se poursuivra» si Vladimir Poutine ne fait pas en sorte que les accords de Minsk du 5 septembre, qui ont permis le cessez-le-feu et prévoient des pourparlers de paix, ne sont pas respectés. Pourtant, l'UE veut aussi tendre la main au président russe, qui a écourté sa visite au G20 en Australie après l'accueil glacial qui lui a été réservé, afin de le ramener à la table des négociations. «Les sanctions ne sont pas un objectif en soi. Elles peuvent être un instrument si elles viennent avec d'autres» solutions, a ainsi expliqué lundi la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, à son arrivée à la réunion des ministres des Affaires étrangères. «Il faut maintenir la pression, mais aussi parler (avec Poutine, ndlr), aussi difficile que cela soit», a résumé le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Bert Koenders. L'UE a déjà lourdement sanctionné la Russie pour son implication dans le conflit, interdisant notamment à des banques et entreprises du secteur de la défense et du pétrole, dont le géant Rosneft, de se financer en Europe, et listant 119 personnalités, dont de hauts responsables russes. Ces mesures, prises en juillet et septembre, ont contribué aux difficultés de l'économie russe, mais elles n'ont pas infléchi l'attitude de M. Poutine. En Ukraine, le président ukrainien Petro Porochenko s'est lui dit prêt à «un scénario de guerre totale», et l'armée affirme que rebelles et troupes russes «se préparent à une offensive». «Il est clair que nous ne sommes pas prêts pour une guerre à grande échelle avec l'armée russe, qui est cent fois meilleure que la nôtre. Mais nous n'abandonnerons pas notre territoire sans lutter», a souligné lundi le ministre ukrainien de l'Intérieur Arsen Avakov sur sa page Facebook. Parallèlement, l'évacuation des débris de l'avion de Malaysia Airlines, abattu en juillet faisant 298 morts, devait se poursuivre lundi. Des fragments du Boeing doivent être envoyés aux Pays-Bas -qui ont payé le plus lourd tribut avec 193 victimes- pour être examinés par le Bureau d'enquête néerlandais pour la sécurité (OVV), chargé d'enquêter sur les causes du drame.