Etat des lieux satisfaisant dans le secteurs de l'énergie et nécessité de poursuivre les actions engagées dans ce domaine, tels sont l'objet et les recommandations du rapport que vient de publier l'Agence internationale de l'énergie (AIE), un rapport qui ne rend pas suffisamment compte de certains aspects de la politique énergétique et de la gouvernance dans ce secteur qui en constituent les goulets d'étranglement. L'étude de l'AIE constitue le premier examen par cette Agence de la politique énergétique du Maroc, ainsi que sa première étude d'un pays appartenant à la région du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord. La réalisation de cette étude a permis à celle-ci de mieux appréhender la situation énergétique du Maroc, ainsi que les politiques adoptées par le gouvernement. Elle a aussi permis d'améliorer ses données énergétiques. Le rapport note que, contrairement à certains de ses voisins dans la région, le Maroc est très fortement dépendant des importations d'énergie. Près de 91 % de l'énergie utilisée provient de l'étranger : le charbon, le pétrole et les produits pétroliers des marchés mondiaux ; le gaz d'Algérie ; l'électricité importée. Ceci pèse lourdement sur la balance des paiements et, dans la mesure où certaines fournitures d'énergie sont subventionnées, sur le budget de l'État. Cette dépendance vis-à-vis des importations soulève aussi la question de la sécurité d'approvisionnement énergétique, alors qu'une forte dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles maintient un niveau relativement élevé d'émissions de gaz à effet de serre (GES). Le réseau couvre maintenant 164 000 kilomètres et 98 % de la population Le Maroc partage donc nombre des défis énergétiques auxquels sont confrontés la plupart des pays membres de l'AIE, à savoir, comment garantir un approvisionnement énergétique fiable, abordable et durable. Le Maroc reconnaît de longue date qu'il est vulnérable aux conséquences du changement climatique. Le gouvernement a ratifié la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) en 1995 et le Protocole de Kyoto en 2002. En 1996 a été établi un Comité National sur les Changements Climatiques. En 2009, le Plan National de Lutte contre le Réchauffement Climatique a fixé les premiers objectifs de réduction des GES dans les secteurs de l'énergie et de l'industrie. Depuis les années 90, le gouvernement du Maroc insiste sur le rôle central de l'énergie dans le développement économique et social. Dès 1995, un programme ambitieux a été mis en place visant à généraliser l'accès à l'énergie à l'ensemble de la population rurale. Le réseau couvre maintenant 164 000 kilomètres et englobe 98 % de la population, par rapport à 18 % il y a seulement deux décennies. Ceci est une réalisation très impressionnante pour laquelle le gouvernement du Maroc mérite des éloges marqués. Ce développement a contribué à un taux de croissance régulier de 4 % à 5 % par an, bien qu'il ait aussi entraîné une forte augmentation de la demande d'électricité. Le Maroc a également largement libéralisé son marché des produits pétroliers. Il a privatisé le secteur de la distribution en 1995 et a permis les importations en franchise de droits à partir de 2002. Le premier accord portant sur un fournisseur d'énergie électrique à capitaux étrangers (à Jorf Lasfar) date de 1994 ; en 1995 a été élaboré un plan d'interconnexion électrique avec l'Espagne, qui est devenue pleinement opérationnelle (capacité de transit de 1 400 mégawatts [MW] en 2005). Cette même année, la première centrale électrique au gaz naturel a été mise en service à l'aide de gaz de redevance de transit provenant du gazoduc Maghreb-Europe. Le Maroc travaille avec ses partenaires de l'Union du Maghreb pour promouvoir l'intégration régionale des réseaux (par le biais du Comité Maghrébin de l'Électricité, établi en 1992) ainsi qu'avec ses homologues de l'Union européenne. La combinaison de la libéralisation du marché avec l'intégration régionale est un leitmotiv de la politique énergétique du Maroc, et le gouvernement espère qu'un marché européen plus intégré et libéralisé facilitera le moment venu de futures exportations d'énergie marocaine vers l'Europe. Le Maroc a également maintenu des conditions d'investissements très avantageuses pour favoriser l'exploration pétrolière et gazière en amont. Stratégie Énergétique en cinq axes En 2009, le gouvernement du Maroc a élaboré une Stratégie Énergétique Nationale qui a été déclinée en objectifs clairs et précis. Celle-ci porte sur cinq axes principaux, à savoir : optimiser le bouquet énergétique dans le secteur de l'électricité ; accélérer le développement des énergies à partir de sources renouvelables, particulièrement éolienne, solaire et hydraulique ; ériger l'efficacité énergétique en priorité nationale ; promouvoir les investissements de capitaux étrangers dans le pétrole et le gaz en amont ; et promouvoir une intégration régionale plus poussée. Cette stratégie a donné des résultats importants depuis son entrée en vigueur. Dans le secteur de l'électricité, des accords ont été conclus pour le développement d'une capacité supplémentaire de 2 gigawatts (GW) des centrales électriques au charbon ; ceci devrait réduire considérablement le coût moyen de l'électricité de base. Dans le domaine des énergies renouvelables, l'objectif total de 2 GW de puissance éolienne, 2 GW d'énergie solaire et d'un relèvement de la capacité d'énergie hydraulique à 2 GW à l'horizon 2020 vise à tirer parti des conditions très favorables dont jouit le Maroc en matière d'énergie éolienne et solaire, ainsi que de son secteur hydraulique établi de longue date. Dans ce contexte, les énergies renouvelables devraient représenter 42 % de la capacité installée d'ici 2020. Les premiers parcs éoliens sont actuellement opérationnels (à hauteur de 600 mégawatts [MW], avec plus de 1 000 MW en projet ou en construction), et le premier projet de commercialisation d'énergie solaire concentrée a été lancé à Ouarzazate, grâce aux investissements étrangers et au soutien des agences de développement multilatérales. Parallèlement, il a été procédé à la mise en place d'un cadre juridique et institutionnel. Celui-ci a pour objectifs de mettre en oeuvre des normes plus strictes d'efficacité énergétique ; permettre à l'industrie privée d'alimenter le réseau (à haute tension au départ) ; jeter les bases d'une autorité de régulation du secteur de l'électricité et du gaz; soutenir les programmes d'efficacité énergétique et d'énergies renouvelables (Agence Nationale de Développement des Énergies Renouvelables et de l'Efficacité Énergétique) ; promouvoir l'énergie solaire (Agence Marocaine pour l'Énergie Solaire) ; et favoriser la recherche et développement (RD) en énergies renouvelables (Institut de Recherche en Énergie Solaire et Énergies Nouvelles). Ces programmes sont maintenant mis en place et financés ; ils commencent à avoir un impact sur le secteur de l'énergie renouvelable dans son ensemble, ainsi que sur l'activité de RD du pays. Pétrole et gaz : Intérêt considérable de la part de la communauté internationale En ce qui concerne le pétrole et le gaz en amont, les prix élevés enregistrés sur une période prolongée et certaines découvertes dans les pays voisins dotés d'une géologie similaire ont suscité un intérêt renouvelé et considérable de la part de la communauté internationale dans le littoral marocain. Le programme de forage devrait être très considérable cette année. L'existence d'importants gisements terrestres de schiste bitumineux pourrait aussi éventuellement attirer l'attention des investisseurs. Plus récemment, des mesures essentielles ont été prises à la fin de 2013 et au début de 2014 pour éliminer les subventions en faveur de l'essence et du fioul et réduire sensiblement la subvention en faveur du diesel, ainsi qu'en juin 2014 pour éliminer la subvention au fuel destiné à la production d'électricité. Bien que le niveau de subventionnement reste très élevé dans le domaine très sensible du gaz en bouteille (butane), les mesures annoncées jusqu'à présent auront un impact considérable sur le coût budgétaire des subventions et (à un degré moindre) sur la consommation énergétique. Enfin, un certain nombre de mesures ont été prises, afin notamment de réduire les émissions de GES dans le secteur de l'énergie. Le gouvernement a travaillé en collaboration étroite avec les agences de développement multilatérales et bilatérales afin d'instaurer non seulement des programmes d'amélioration de la gestion environnementale et de promouvoir un certain nombre de projets susceptibles de bénéficier du Mécanisme pour un développement propre des Nations Unies, mais aussi le Plan d'action technologique visant à identifier les technologies les mieux propices à l'atténuation du changement climatique. Le Maroc a soumis sa deuxième Communication Nationale au CCNUCC en 2010 ; la troisième communication prévue pour 2014 est en préparation. L'étude de l'AIE recommande au gouvernement du Maroc de maintenir les progrès récents en matière de réduction des subventions aux carburants et renforcer la stratégie d'efficacité énergétique actuelle par le biais d'une réglementation claire et d'incitations financières, tout en s'attachant à mesurer les progrès réalisés à ce jour et tirer les leçons des expériences des autres, par exemple de l'Union européenne. Elle recommande également d'optimiser le déploiement de l'énergie solaire : maximiser l'usage de l'énergie solaire concentrée aux heures de pointe et faciliter l'utilisation des technologies photovoltaïques, à travers l'accélération des chantiers de la moyenne et de la basse tension en cours de mise en place par le Maroc – y compris l'accès au réseau. L'AIE recommande d'accélérer la mise en place d'une autorité de régulation de l'énergie afin de superviser un marché de l'énergie encore plus ouvert et d'encourager une utilisation plus importante du gaz et de maintenir la confiance des investisseurs étrangers ainsi que de l'industrie nationale, tout en encourageant le développement de la RD dans les énergies nouvelles et le transfert de technologies.