Dr Khadija Moussayer jette une lumière diffuse sur cette maladie fréquente, encore sous-diagnostiquée A l'occasion de la Journée Mondiale de la Maladie Cœliaque, célébrée le 18 mai 2014, l'Association Marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) s'est associée à la communauté médicale internationale pour rappeler cette maladie fréquente mais encore sous diagnostiquée. Nous avons rencontré le Dr Khadija Moussayer, spécialiste en Médecine interne et en Gériatrie et présidente d'AMMAIS pour nous en dire plus. Entretien : L'Opinion : D'abord nous aimerions que vous nous définissiez en quelques mots Maladie Cœliaque... Dr Moussayer : La maladie cœliaque, mieux connue sous le nom d'intolérance au gluten, est une pathologie auto-immune au cours de laquelle le système immunitaire chargé normalement de nous défendre se dérègle et attaque les constituants sains de l'organisme. Le responsable en est le gluten, une protéine contenue dans les céréales (blé, orge, seigle...) qui provoque chez certaines personnes cette réaction anormale qui induit des dommages de la paroi de l'intestin grêle et des troubles de l'absorption du fer, du calcium, et des vitamines. La seule solution thérapeutique à ce mal est la suppression à vie du gluten de l'alimentation. L'Opinion : A quel âge cette maladie peut-elle attaquer et quel est son diagnostic? Dr Moussayer : Classiquement, elle était connue surtout comme une affection de nourrissons et d'enfants en bas âge avec des signes se limitant à l'appareil digestif alors qu'actuellement on la rencontre de plus en plus souvent chez l'adulte, même au-delà de 65 ans, avec des manifestations très étendues et rendant son diagnostic parfois difficile telles des douleurs articulaires, une ostéoporose, des anémies, des fausses couches à répétition, des aphtes buccaux, une dermatite ou même encore des maux de tête, une fatigue chronique, une anxiété, et une dépression. L'Opinion : Quel risque les victimes de cette maladie peuvent-elles courir à défaut de soins ? Dr Moussayer : En chiffres, on peut se permettre d'avancer que 15 à 25 % des cœliaques sont ou seront atteints d'une autre maladie auto-immune, comme le diabète de type 1, des thyroïdites ou des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin... L'Opinion : Quelles sont les réelles causes de cette maladie ? - Dr Moussayer : Il existe une forte prédisposition génétique à la maladie puisque les membres de la même parenté en sont touchés dans 10 % des cas. Cette héritabilité est en relation avec notre «carte d'identité biologique » (le système HLA - Human leucocyte antigen), un groupe de molécules situées à la surface de nos cellules et qui identifient et distinguent chacun de nous des autres. Certains marqueurs (nommés gènes DQ2 et/ou DQ8) sont présents chez pratiquement toutes les personnes souffrant de la maladie cœliaque et leur absence suffit à écarter ce risque. L'Opinion : Comment voyez-vous une réduction des risques de sa survenue ou au moins de son retardement ? Dr Moussayer : Au Maroc, la maladie reste encore peu connue malgré qu'elle atteigne environ 1% de la population, avec en particulier une prédisposition encore plus élevée dans les populations du sud marocain. Pourtant, une réduction des risques de sa survenue ou son retardement est possible chez l'enfant grâce à l'encouragement de l'allaitement maternel, l'introduction progressive du gluten dans la nourriture et une bonne hygiène pour prévenir les gastroentérites qui joueraient un rôle de facteur déclencheur de la pathologie.