Les forces gouvernementales et les séparatistes pro-russes se sont livrés mercredi à des démonstrations de force dans l'est de l'Ukraine, sur fond de guerre de communiqués, à la veille de la rencontre quadripartite de jeudi à Genève. Sept véhicules blindés de transport de troupes, arborant le drapeau ukrainien, ont traversé dans la matinée la ville de Kramatorsk, où les troupes gouvernementales se sont déployées mardi soir à l'aérodrome militaire, dans le cadre d'une «opération spéciale» de reprise en main annoncée par le président ukrainien Olexander Tourtchinov. Mais à 15 km de là seulement, des hommes en armes, portant des treillis dépareillés, ont défilé mercredi dans la ville de Slaviansk à bord de six véhicules blindés, dont l'un arborait le drapeau russe et un autre l'emblème de la «république populaire de Donetsk», proclamée la semaine dernière par un groupe séparatiste. Les séparatistes, pour certains cagoulés, armés de kalachnikovs, de lance-grenades, de poignards et de pistolets, ont salué la population lors de leur défilé, et certains habitants les ont acclamés. Au-dessus d'eux, un chasseur de l'armée de l'air ukrainien a survolé la ville pendant plusieurs minutes. Les véhicules des séparatistes se sont arrêtés devant l'hôtel de ville, aux mains des leurs depuis plusieurs jours. Dans la grande ville industrielle de Donetsk, qui compte près d'un million d'habitants, au moins 20 séparatistes armés ont pris le contrôle de l'hôtel de ville, a déclaré un porte-parole de la municipalité. MOSCOU «EXPORTE LE TERRORISME», ACCUSE IATSENIOUK Ces démonstrations de force interviennent à la veille d'une réunion quadripartite prévue jeudi à Genève, où les ministres des Affaires étrangères de Russie et d'Ukraine, respectivement Sergueï Lavrov et Andrij Dechtchitsia, se rencontreront pour la première fois, en présence de diplomates américains et européens. La Russie, qui ne reconnaît pas le gouvernement pro-occidental arrivée au pouvoir à Kiev après la destitution du président Viktor Ianoukovitch le 22 février, s'emploie à dramatiser la situation en Ukraine avant cette réunion. Le président russe Vladimir Poutine a déclaré à la chancelière allemande Angela Merkel, lors d'une conversation téléphonique mardi soir, que Kiev était «engagé dans un processus non constitutionnel» en recourant à l'armée contre les séparatistes. «La forte escalade du conflit place le pays, de fait, au bord de la guerre civile», a-t-il dit. Au Vietnam d'où il se rendra à Genève, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a estimé que Kiev devait écouter le peuple ukrainien et éviter de recourir à la force. «Il est inacceptable d'utiliser les forces armées dans l'est de l'Ukraine», a-t-il dit à la presse à Hanoï. Le Premier ministre ukrainien, Arseni Iatseniouk, a rétorqué mercredi matin que la Russie «exporte le terrorisme vers l'Ukraine» en chargeant des forces secrètes d'organiser les séparatistes armés qui attaquent des bâtiments publics dans l'est du pays. «Le gouvernement russe doit immédiatement cesser ces menées, condamner les terroristes et exiger d'eux qu'ils se retirent des bâtiments (qu'ils occupent)», a dit Arseni Iatseniouk. «Cela, si la Fédération de Russie veut stabiliser la situation, ce dont je doute grandement», a-t-il ajouté.