Des rassemblements de soutien au nouveau pouvoir se déroulent dimanche en Ukraine pour l'anniversaire du poète et symbole de l'indépendance Taras Chevtchenko, notamment à Kiev et en Crimée contrôlée par les forces russes et au centre de la pire crise entre Occidentaux et Russes depuis la chute de l'URSS. Dans la capitale ukrainienne, un grand rassemblement est prévu dès 10H00 GMT dans le parc Taras Chevtchenko, dont l'Ukraine fête le 200e anniversaire de la naissance. Il sera suivi d'un concert au Maïdan, théâtre pendant trois mois d'un mouvement de contestation sévèrement réprimé par la police avec des dizaines de morts avant la chute du président Viktor Ianoukovitch et sa fuite en Russie. Les nouveaux dirigeants politiques ukrainiens, dont le président par intérim Olexandre Tourtchinov et le Premier ministre Arseni Iatseniouk, participent à ce rassemblement, une démonstration de force pour affirmer l'intégrité territoriale et la souveraineté de l'Ukraine alors que la péninsule de Crimée est passée fin février sous le contrôle de facto des forces russes. A Simféropol, capitale de la république autonome, et à Sébastopol, le grand port qui abrite l'état-major de la flotte russe de la mer Noire, des manifestations similaires - événement rare - sont également programmées. Les tensions restent vives dans la péninsule, où le Parlement local défie l'autorité de Kiev et organise le 16 mars un référendum pour la rattachement à la Russie, mais aussi à Donetsk, bastion russophone de l'est du pays, où une manifestation des partisans de Moscou est prévue. Leurs adversaires qui prônent la souveraineté de l'Ukraine pourraient également battre le pavé. Ces manifestations interviennent au lendemain de l'échec, le troisième en trois jours, des 54 observateurs internationaux dépêchés par l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à entrer dans la péninsule de Crimée. Le convoi de ces observateurs, civils et militaires non armés, avait dû rebrousser chemin samedi à l'approche du poste de contrôle d'Armiansk sur un des deux axes routiers permettant d'entrer en Crimée. Des hommes armés en treillis ont pointé leurs armes vers le convoi puis ont tiré en l'air trois fois. Cette mission, soutenue par le président américain Barack Obama, vise à tenter de réduire les tensions. START en question ? Sur la scène diplomatique, malgré d'intenses consultations, Occidentaux et Russes n'ont pas réussi à trouver une issue à la pire crise dans leurs relations depuis la chute de l'Union soviétique en 1991. Les chefs de la diplomatie russe et américain Sergueï Lavrov et John Kerry ont de nouveau parlé au téléphone samedi et ont convenu de «poursuivre leurs contacts intensifs», selon Moscou. «La poursuite d'une escalade militaire et de provocation en Crimée ou ailleurs en Ukraine, de même que les mesures pour annexer la Crimée par la Russie, fermeraient la porte à la diplomatie», a affirmé M. Kerry au cours de la conversation, en appelant à «la plus grande retenue», selon un responsable du département d'Etat. Le président Barack Obama s'est pour sa part entretenu avec plusieurs dirigeants européens, notamment les Premiers ministres britannique David Cameron et italien Matteo Renzi, ainsi que le président François Hollande. Tous ont réaffirmé leur «grave préoccupation devant la violation claire du droit international par la Russie», a indiqué la Maison Blanche. Selon la présidence française, Paris et Washington réfléchissent même, «faute de progrès», à des sanctions «qui affecteraient sensiblement les relations entre la communauté internationale et la Russie, ce qui n'est dans l'intérêt de personne», selon l'Elysée. Alors que chaque protagoniste réfute l'idée d'une nouvelle Guerre froide, le ministère russe de la Défense a indiqué samedi réfléchir à une suspension des inspections étrangères de son arsenal d'armes stratégiques, y compris les missiles nucléaires, en réponse aux «menaces» venant des Etats-Unis et de l'Otan. Ces inspections ont lieu dans le cadre du Traité de réduction des armes stratégiques (START) signé en 2010 par les Etats-Unis et la Russie, et dans celui du Document de Vienne entre les pays membres de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE). Signe que les forces russes sont loin d'un retrait de Crimée, une soixantaine de camions militaires russes sont entrés en Ukraine par voie terrestre et maritime, selon les garde-frontières ukrainiens. Le général Mykola Kovil, un haut responsable des garde-frontières, a récemment indiqué que 30.000 soldats se trouvaient désormais en Crimée, soit 5.000 de plus que le contingent autorisé par les accords entre Moscou et Kiev. Les garde-frontières ont fait état d'une incursion samedi soir de forces pro-russes dans un site militaire utilisé pour surveiller le trafic maritime où ils ont endommagé du matériel. Journalistes visés Samedi, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait assuré que la Russie était ouverte à un dialogue «honnête, d'égal à égal» avec les puissances étrangères. Pour sa part, Kiev a répété être prêt à «des contacts à tous les niveaux» avec Moscou. Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Grigori Karassine avait rencontré à Moscou l'ambassadeur d'Ukraine en Russie Volodymyr Eltchenko. Signe d'une détérioration du climat en Crimée, les journalistes ukrainiens et étrangers, accusés d'être à la solde des grandes puissances, sont désormais parfois la cible de militants pro-russes et plusieurs ont été passés à tabac ou dépouillés de leur matériel ces derniers jours.