C'est à l' occasion de l'exposition organisée dans la grande salle de la porte Bab Mansour à Meknès, dans le cadre du premier récital International de la Ferme et du Développement par l'AFAK Marocain en Mars 2013 que se sont croisées les œuvres du Belgo-marocain Harwan et de Jacky Belhaj. Tout semblait les séparer et voilà qu'on les retrouve ensemble, exposées dans l'espace galerie du Théâtre Mohammed V à Raba (jusqu'au 2 Mars prochain). C'est un événement bien sûr, et le rapprochement de deux magnifiques personnalités contrastées en couleurs, mais dont les traits communs sont le don de la communication et le génie artistique qui peut définir notre temps et situer l'art comme un lien nécessaire entre le « moi isolé et notre univers ». Une personnalité attachante que Harwan, entreprenant et intéressant qui partage son temps entre Rabat et Bruxelles, producteur d'évènements TV, réalisateur et artiste plasticien, écrivain aussi. Ne signait- il pas, fin Mars 2013, un livre au titre prometteur de « Mariage et traditions », Introduit à Bab Mansour par une série de toiles représentant des visages de femmes déclinées en gamme chromatiques ? Elle faisait face à une autre série brossés, expression non figurative accroissant la circulation des couleurs par les surfaces colorées qui se répondent et se croisent apportant un caractère expansif à la toile elle-même, pulsion de l'artiste pour sortir du cadre habituel d'une technique éprouvée et une image exploitée par les peintres au fil des années sachant que ce qui est visible et simple en peinture dissimule comme la nature, de l' invisible compliqué. Ce peintre, dont on a dit « que les coups de pinceau et couteau sont nos pas et les images que suggèrent ses toiles de rythme, l'énergie qui nous propulsent dans les sublimes méandres d'un monde féérique «, s'exprime sans épaisseur ni relief et comme l'écriait si bien le poète Tazi Khalid » « la magie du réel est immense et le mystère est en moi. » Tout autre apparait l'œuvre de Jacky Belhaj, qui s'exprime dans de vastes compositions d'une densité chromatique et matérielle qui la rend unique dans le courant pictural marocain, évocation surréaliste d'un folklore pertinent, vision quasiment cinématographique, visions brèves, images superposées et gros plans ou parfois l'ingénuosité l'emporte sur toute raison. Les échos de la mémoire, les pulsions du désir et du rêve, l'amour, ces méprises de l'âme, sont la trame secrète de ce tissu rêvé d'images. C'est bien automatiquement que se compose la toile formant un relief insolite lacis hérissé et non hostile qui accroche les sens et fascine. Entre Paris où il expose régulièrement et Rabat que le milieu artistique reconnait comme tel, Jacky Belhaj poursuit son ascension et conforte sa notoriété. Cette exposition commune et contrastée sera, j'en suis certain, une découverte et un sujet de réflexion positive pour tous les amateurs d'art marocain qui prendront là, conscience de la puissance de l'image. *Ecrivain, galeriste, critique d'art, Saumur, France