Le McKinsey Global Institute (MGI) a passé au crible une centaine d'innovations technologiques et retenu les douze dont l'impact d'ici 2025 devrait être le plus significatif sur l'emploi, la consommation et la croissance. Chacune d'entre elle fait l'objet d'une analyse approfondie dans un nouveau rapport intitulé «Disruptive technologies: advances that will transform life, business and the global economy». Dissiper le «buzz» technologique Un large éventail de technologies potentiellement «révolutionnaires» se profilent à l'horizon ; des progrès exponentiels bouleversent le domaine des technologies de l'information, des biosciences, des matériaux et de l'énergie. Mais toutes ces technologies ne présentent pas le même «potentiel de rupture». Toutes ne portent pas en germe le pouvoir de transformer de façon déterminante la manière dont vivent les gens, dont travaillent les entreprises, et dont sont générés croissance et profits. Afin d'aider les entreprises et les pouvoirs publics à anticiper les principales mutations technologiques à venir, le McKinsey Global Institute (MGI) a passé au crible une centaine d'entre elles. Il en a identifié douze qui sont les plus susceptibles de rebattre les cartes. Il en décrit les applications potentielles, en analyse les bénéfices et défis associés, et en expose les implications pour les dirigeants d'entreprises et les responsables politiques. L'analyse du MGI repose sur quatre critères : la célérité avec laquelle évoluent ces technologies, leur portée (par exemple le nombre de citoyens ou de consommateurs touchés), la valeur économique créée ou déplacée, et enfin, leur impact disruptif–défini comme leur capacité à transformer des secteurs économiques ou technologiques adjacents. Certaines technologies émergentes laissent d'ores et déjà entrevoir ces quatre caractéristiques, mais n'ont cependant pas été retenues car leur horizon de déploiement se situe au-delà de 2025. Evaluer des retombées multiformes Ensemble, ces douze technologies offrent un potentiel économique considérable. La valeur créée par un certain nombre d'applications imaginables aujourd'hui serait comprise entre 14 000 et 34 000 milliards de dollars (entre 11 000 et 26 000 milliards d'euros) par an en 2025. Mais d'autres applications pourraient voir le jour, qu'il n'est pas aisé de prévoir à l'heure actuelle. Par ailleurs, il est difficile d'anticiper sous quelle forme ce potentiel économique se matérialisera : une large partie pourrait bénéficier aux consommateurs qui jouiraient de nouveaux services gratuits, une part pourrait se déplacer d'un secteur d'activité à un autre, une dernière portion enfin se traduirait par de la croissance économique, c'est-à-dire du PIB additionnel. Hormis les effets économiques directs, ces technologies comportent aussi nombre de bénéfices induits : produits de meilleure qualité, plus sains, moins polluants. Pourraient en résulter une amélioration de la santé et de l'espérance de vie, par exemple grâce à l'adoption de véhicules autonomes (sans conducteurs) qui, selon le MGI, permettrait de réduire les accidents de la route de 77 à 90 %. Ces douze technologies sont, par ordre décroissant de potentiel économique : - L'internet mobile : «smartphones», tablettes et autres appareils mobiles de formes diverses vont continuer à inspirer des applications personnelles et professionnelles qui facilitent la vie et accroissent la productivité des salariés. Ces applications devraient également inciter 3 milliards de personnes supplémentaires à rejoindre la sphère numérique dans la décennie à venir, en majorité dans les pays émergents. - L'automatisation des métiers du savoir : grâce à l'augmentation de la puissance de calcul, aux progrès des algorithmes d'apprentissage automatique, à l'exploitation des données informatiques (le «big data») et à de nouvelles interfaces utilisateurs, il devient possible d'automatiser certaines tâches des «travailleurs du savoir» que l'on pensait jusqu'ici hors de portée des ordinateurs. La gestion, la médecine, l'éducation, la finance ou le droit, par exemple, vont être profondément transformés. - Le cloud computing : l'informatique «dans les nuages» ne se contente pas de modifier l'équation économique de l'informatique des entreprises, elle ouvre la voie à une large palette de services fournis via Internet et à de nouveaux modèles d'activité. - L'Internet des objets : la mise en réseau de capteurs implantés dans les objets du quotidien, les machines, les infrastructures et tout type d'actifs physiques offre un énorme gisement de valeur économique et sociétale. Un exemple : le suivi permanent de pathologies chroniques telles le diabète pourrait grandement améliorer la qualité de vie des malades. - La robotique de pointe : les robots deviennent suffisamment intelligents et polyvalents pour réaliser un éventail élargi de tâches de production et de service, mais aussi augmenter les capacités physiques. Grâce à la technologie robotique, il devient par exemple possible de fabriquer des prothèses et exosquelettes motorisés pour les personnes handicapées. - La génomique de nouvelle génération : la combinaison des technologies de séquençage du génome et de l'analyse des grands volumes de données pourrait déboucher sur de nouveaux traitements pharmaceutiques, des avancées dans l'agriculture et la création de biocarburants à partir de micro-organismes. - Les véhicules autonomes ou semi-autonomes : ils augurent d'une révolution pour les transports au sol. A l'avenir, des colonnes denses de voitures et camions sans conducteur pourraient défiler sur l'autoroute à grande vitesse et en toute sécurité, avec à la clé, gains de temps et vies épargnées. - Le stockage d'énergie : grâce aux progrès des batteries, les véhicules hybrides pourraient rivaliser avec les véhicules traditionnels en termes de coûts. Le stockage devrait également contribuer à satisfaire la demande en électricité dans les périodes de pointe, à faciliter le développement des énergies renouvelables, et à amener le courant dans des zones actuellement non desservies. - L'impression en 3D : le champ d'application de « l'impression » d'objets ne se limite plus à un usage ludique et à la réalisation de prototypes, et son élargissement risque de modifier en profondeur le paysage de la production manufacturière. - Les matériaux de pointe : les efforts menés de longue date pour développer les nanomatériaux pourraient enfin porter leurs fruits, avec la mise sur le marché de médicaments à base de nanoparticules, de super-condensateurs pour batteries, de revêtements parfaitement antiadhésifs et d'écrans d'affichage ultra-minces. - Les techniques sophistiquées d'exploration et de récupération des hydrocarbures non conventionnels : le forage horizontal et la fracturation hydraulique permettent d'extraire du pétrole et du gaz de gisements non conventionnels, avec des implications importantes en termes de réserves d'énergie, en particulier en Amérique du Nord. - Energies renouvelables : parmi les énergies renouvelables, l'éolien et le solaire affichent le plus gros potentiel d'ici 2025. A cet horizon, ces deux sources pourraient représenter 16 % de l'approvisionnement global en énergie. Anticiper les transformations à venir L'étude d'impact de ces douze technologies met en lumière des enseignements communs à la plupart d'entre elles. Tout d'abord, les consommateurs pourraient en être les principaux bénéficiaires, surtout à long terme : ils pourraient capturer la majeure partie de la valeur créée sous forme de « surplus consommateur ». Les entreprises devront par conséquent innover non seulement sur le plan technologique, mais aussi dans leurs modèles économiques. Elles devront par exemple faire preuve d'ingéniosité pour monétiser les nouvelles applications de l'Internet mobile. D'autre part, il apparaît clairement que les avantages ne seront pas uniformément répartis géographiquement, et que les sources et le potentiel de valeur varient selon le degré de maturité des économies. Par exemple, dans les économies matures, le principal intérêt du stockage d'énergie pourrait résider dans sa capacité à rendre les véhicules électriques compétitifs. Dans les économies en développement, les nouvelles batteries permettraient surtout à des millions de personnes d'avoir enfin accès à l'électricité. Ce rapport entend focaliser la réflexion stratégique des dirigeants d'entreprises sur les opportunités et défis associés à ces ruptures technologiques. Ils devront appréhender l'impact de ces technologies sur leurs modèles économiques et veiller à ce que leurs équipes et fonctions stratégiques intègrent des managers dotés d'une solide culture scientifique. Autre conséquence de ces technologies émergentes : de nouvelles palettes de compétences seront nécessaires, combinant érudition scientifique et technique, flair marketing, et habileté à conduire le changement. Ces compétences seront rares, et la guerre des talents pourrait connaître une nouvelle intensification. Enfin de leur côté, les responsables politiques seront confrontés à de lourdes problématiques réglementaires et stratégiques. Des arbitrages sociétaux complexes devront être rendus, des dilemmes éthiques tranchés, des mutations accompagnées. Les véhicules autonomes, par exemple, ne pourront se développer qu'avec un cadre réglementaire bien défini. Les droits et les informations personnelles des citoyens, notamment leur génome, devront être encadrés juridiquement. Il incombera aussi aux pouvoirs publics de trouver des solutions pour former -et recycler- la main d'œuvre afin de développer les compétences dont les employeurs auront besoin. L'enseignement lui-même sera amené à évoluer : ainsi, l'informatique utilisée pour automatiser certaines tâches des «travailleurs du savoir» pourra être associée à l'Internet mobile pour dispenser dans le monde entier un enseignement interactif et adapté au rythme de chaque étudiant. Le rapport complet «Disruptive technologies: advances that will transform life, business and the global economy», un article plus détaillé sur les transformations induites par les technologies de l'information, ainsi qu'une série d'entretiens vidéo avec des experts, sont disponibles sur le site www.mckinsey.com A propos de McKinsey & Company Fondé aux Etats-Unis en 1926, McKinsey & Company est aujourd'hui implanté dans une cinquantaine de pays et compte plus de 9 000 consultants. Leader mondial du conseil aux directions générales, le cabinet accompagne des entreprises de premier plan appartenant à tous les grands secteurs de l'économie, des gouvernements et organismes publics, ainsi que des institutions à but non lucratif. Ses principaux domaines d'intervention portent sur la stratégie, l'organisation et l'efficacité opérationnelle. McKinsey est actif au Maroc depuis les années 70 et a ouvert un bureau permanent à Casablanca en 2004, où sont basés à l'heure actuelle près de 40 consultants. A propos du McKinsey Global Institute (MGI) Créé en 1990, le McKinsey Global Institute (MGI) est un centre d'études indépendant qui, au sein de McKinsey & Company, conduit un effort de recherche permanent destiné à analyser les mécanismes de l'économie mondialisée. Il a vocation à aider les décideurs, privés comme publics, à mieux comprendre les forces à l'œuvre dans la transformation de l'économie mondiale, les mécanismes d'amélioration de la performance des entreprises ou les fondements de politiques publiques plus efficaces à l'échelle nationale comme internationale. Le MGI présente l'originalité de conjuguer l'expérience du monde de l'entreprise d'un cabinet de conseil aux directions générales et la rigueur de la démarche universitaire pour apporter une base de réflexion factuelle au débat public. Ses membres sont recrutés, pour l'essentiel, parmi les consultants du cabinet, qui se consacrent pendant six à douze mois à un projet de recherche, auquel sont également associés des économistes et des universitaires de renom.