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Mémorandum du CNDH relatif à la Cour Constitutionnelle Les propositions concernant la procédure d'élection des membres, l'organisation de la Cour et son fonctionnement, la configuration des attributions et l'organisation administrative
Le Conseil National des Droits de l'Homme a présenté à Sa Majesté le Roi, dernièrement, trois rapports thématiques, et ce en vertu de l'article 24 du Dahir portant création de ce Conseil. Ces rapports, adoptés à la quatrième session ordinaire, portent sur les contributions du Conseil à certaines réformes législatives induites par la nouvelle constitution. Le premier rapport est relatif à la Cour constitutionnelle. Il présente les contributions du CNDH relatives à l'organisation et au fonctionnement de la Cour, ainsi qu'au statut de ses membres et à la procédure à suivre devant cette haute juridiction, chargée de veiller au respect de la Constitution et à la régularité des élections législatives. Dans l'»exposé des motifs» précédant ses propositions, le CNDH affirme qu'il accorde un intérêt particulier et légitime à la question de la justice constitutionnelle. Le Conseil compte contribuer au débat public relatif à la réforme de la justice en présentant ce mémorandum qui porte sur la loi organique relative à la Cour constitutionnelle. Il précise que les propositions contenues dans le mémorandum ont été conçues sur la base des différents référentiels normatifs et déclaratifs aux niveaux national et international. Une étude de textes juridiques comparés régissant les cours constitutionnelles dans plusieurs pays démocratiques a été également effectuée, pour rapprocher les propositions présentées dans ce mémorandum des bonnes pratiques en vigueur dans ces pays. Le deuxième rapport porte sur les propositions du Conseil relativement aux modalités de fonctionnement de «l'exception d'inconstitutionnalité», qui permet à la personne partie à un procès de soulever l'inconstitutionnalité d'une loi. Le troisième rapport porte sur la réforme du tribunal militaire et présente des propositions relatives à la mise en conformité des textes en vigueur avec les dispositions de la Constitution et les engagements internationaux du Royaume. Propositions concernant la procédure de sélection des membres élus par le parlement Les propositions du CNDH portant sur la loi organique relative à la Cour constitutionnelle sont présentées ci-après : Le CNDH considère que toute proposition qui porte sur la procédure de sélection des membres élus par le parlement doit être basée sur les dispositions des articles 10 et 130 de la Constitution. Il est également proposé à ce que la procédure de sélection des membres soit introduite dans les règlements intérieurs des deux chambres parlementaires. Dans ce cadre, le CNDH propose deux scénarii décrits comme suit : Les étapes du premier scénario : - Lancement par le président de chaque chambre parlementaire d'un appel à candidatures - Dépôt de candidatures auprès du bureau de chaque chambre - Sélection préliminaire des candidats par le bureau et sur dossier en se basant essentiellement sur les qualifications requises par l'article 130 de la Constitution - Entretien avec les candidats ayant été admis par la sélection préliminaire Election des candidats présentés par le bureau (ratio 3 candidats pour chaque siège) et selon la majorité de 2/3 conformément aux dispositions de l'article 130 de la Constitution. En cas d'égalité il est proposé de prévoir des règles pour départager les candidats par âge ou par tirage au sort. La même procédure est applicable en cas de renouvellement. Le deuxième scénario est identique au premier sauf pour la première étape où le CNDH propose à ce que les candidatures soient soumises par les groupes parlementaires ainsi que par les groupements parlementaires Dans les deux scenarii, et pour la première élection, il est proposé de réserver un siège au moins aux femmes au niveau de chaque chambre parlementaire. Propositions concernant l'organisation de la Cour Constitutionnelle Vu l'approche adoptée dans l'élaboration de cet avis, le CNDH s'est contenté de formuler quelques propositions portant essentiellement sur la refonte des incompatibilités selon deux paramètres : - l'élargissement des incompatibilités déterminé par la constitutionnalisation des instances de protection, de promotion des droits de l'homme, de bonne gouvernance, de régulation, de promotion du développement humain et durable et de la démocratie participative. - la nécessité de prendre en compte les incompatibilités parlementaires (prévues dans la loi organique 27.11) comme un seuil à partir duquel il est proposé de reformuler les incompatibilités liées à l'exercice de la fonction de membre de la Cour constitutionnelle Sur la base des paramètres précités, le CNDH propose à ce que les fonctions de membre de la Cour constitutionnelle soient incompatibles avec : - Celles de membre du gouvernement, de la Chambre des représentants, de la Chambre des conseillers, du conseil supérieur du pouvoir judiciaire, du conseil économique, social et environnemental, des instances de protection, de promotion des droits de l'homme, de bonne gouvernance ,de régulation ,de promotion du développement humain et durable et de la démocratie participative. - l'exercice de toute autre fonction publique ou mission publique élective ainsi que de tout emploi salarié dans les sociétés dont le capital appartient pour plus de 50% à une ou plusieurs personnes morales de droit public , ou de toute autre fonction dans une société anonyme dont le capital appartient directement ou indirectement pour plus de 30% à l'Etat, ou à une ou plusieurs personnes morales de droit public, ou dans les sociétés et entreprises dans lesquelles l'Etat , les établissements publics, ou les collectivités territoriales possèdent, séparément ou conjointement, directement ou indirectement, un pouvoir prépondérant de décision. - l'exercice de fonctions non représentatives rémunérées pour un Etat étranger, une organisation internationale ou une organisation internationale non gouvernementale - l'exercice de la profession d'avocat Le CNDH propose à ce que les membres peuvent exercer, à titre bénévole, des fonctions d'enseignement et de recherche qui, de l'avis de la Cour, ne seraient pas incompatibles avec l'obligation de réserve. Cette proposition vise à permettre aux membres de contribuer au développement de la doctrine, à l'enrichissement de la jurisprudence par la recherche académique et au développement de l'enseignement de droit constitutionnel Propositions concernant le fonctionnement de la cour constitutionnelle S'inscrivant dans la logique de l'élargissement d'accès à la justice constitutionnelle, et après étude de plusieurs expériences comparées, le CNDH propose de maintenir la règle de la tenue des audiences de la Cour constitutionnelle à huis clos avec l'exception de publicité de l'audience réservée à l'examen de l'exception d'inconstitutionnalité par la Cour constitutionnelle, sauf dans des cas exceptionnels à définir dans le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle. La deuxième proposition vise à doter la future cour constitutionnelle d'outils lui permettant de mieux gérer les défis interprétatifs liés à la mise en oeuvre de la constitution, Cette proposition consiste à accorder aux membres de la Cour constitutionnelle le droit de publier leurs opinions individuelles. En ce qui concerne la mise en oeuvre de cette proposition, le CNDH propose la publication des opinions individuelles dans un recueil annuel édité par la Cour constitutionnelle Propositions concernant la configuration des attributions Le CNDH a identifié un «bloc hérité» des compétences qui doivent être attribuées conformément à la constitution à la future constitutionnelle : Il s'agit des décisions de conformité à la constitution (lois organiques, lois ordinaires, RI des deux chambres), l'examen des cas prévus à l'article 73 de la constitution, l'examen des fins de non recevoir prévu à l'article 79 de la constitution, le contentieux des élections des membres de la Chambre des représentants et de la Chambre des conseillers, la perte de la qualité de membre du Parlement et le contrôle de la régularité des opérations du référendum. Le CNDH constate également que des nouvelles attributions ont été dévolues à la Cour constitutionnelle, à savoir l'exception d'inconstitutionnalité et le contrôle de régularité de la procédure de révision de la constitution par voie parlementaire. Ainsi, et afin de garantir la conformité constitutionnelle des actes des institutions à créer par des lois organiques (ex : le conseil national des langues et de la culture marocaine, le CESE) et le règlement intérieur du conseil supérieur de sécurité, le CNDH propose d'attribuer explicitement cette compétence à la Cour constitutionnelle dans sa loi organique, sachant que dans l'état actuel, et en vertu de l'article 37 de la loi organique n° 60-09 le règlement intérieur du conseil économique et social est soumis au conseil constitutionnel pour s'assurer de sa conformité à la constitution et à la loi organique régissant le conseil économique et social. Conscient de fait que l'élargissement des droits constitutionnellement garantis, constitue une opportunité stratégique pour fixer des «objectifs de valeur constitutionnelle» qui constitueront, à travers la dynamique créatrice de la jurisprudence constitutionnelle, des vecteurs pour la production législative, le CNDH propose d'étendre le domaine des décisions de conformité à la constitution à l'examen des « omissions inconstitutionnelles » afin d'assurer l'effectivité et la mise en oeuvre par la loi , des dispositions constitutionnelles prévoyant les objectifs précités. Propositions concernant l'organisation administrative de la Cour constitutionnelle Afin de gérer la forte demande sur la justice constitutionnelle, le CNDH propose la création d'un corps d'assistants des membres de la Cour constitutionnelle à l'instar des référendaires de la cour constitutionnelle belge et le corps des letrados du tribunal constitutionnel espagnol. Cette proposition capitalise également sur la pratique actuelle basée sur l'article 41 de la loi organique relative au conseil constitutionnel qui prévoit la possibilité de placer des magistrats et des fonctionnaires en position de détachement auprès du conseil constitutionnel. Dans le même sens, et afin de renforcer la dimension managériale dans l'administration de la justice, le CNDH propose de renforcer le rôle du Secrétariat général de la cour constitutionnelle notamment en matière de la gestion des requêtes adressées à la Cour. Nous publierons, dans notre prochaine édition, le mémorandum du CNDH relatif à l'exception d'inconstitutionnalité.