Deux principaux facteurs génèrent une concurrence déloyale dans le secteur du transport routier de marchandises : l'existence d'une offre pléthorique de moyens de transport par rapport à la demande, du fait de la persistance d'une grande activité de l'informel et les pratiques tarifaires déloyales. C'est ce qui ressort de la lettre de saisine adressées par la Fédération du transport relevant de la CGEM au Conseil de la Concurrence en 2011pour avis sur des questions relatives à la concurrence dans le secteur. Ainsi, pour ce qui est du premier facteur, la réponse du Conseil est qu'en l'absence de statistiques officielles sur la demande de transport routier de marchandises (TMR), il serait difficile d'affirmer que le marché concerné est en situation de pléthore de l'offre. Néanmoins, poursuit le Conseil, on peut déduire de l'évolution du parc de véhicule de TRM que ledit marché présente une offre substantielle. Par ailleurs, le Conseil tient à confirmer que le marché de transport routier de marchandises pour compte d'autrui se caractérise par une offre atomisée, dominé par des transporteurs individuels. Celle-ci se traduit par l'existence d'un grand nombre d'entreprises individuelles de petite taille, gérées de façon artisanale, souvent dirigées par un transporteur indépendant, dont la majorité n'offre pas un service de qualité. Certes, les mesures réglementaires mises en place que ce soit dans le cadre de la loi 16-99 ou celui de la loi 52-05 portant code de la route créent l'environnement nécessaire à la transition vers un marché concurrentiel présentant des services de qualité. Toutefois, ces objectifs ne peuvent être atteints que par un contrôle rigoureux par tous les services concernés, du respect des réglementations routières, fiscale et sociale par toutes les entreprises en concurrence sur le marché, souligne le Conseil. S'agissant du second facteur générant une concurrence déloyale dans le secteur, à savoir les pratiques tarifaires anticoncurrentielles, la partie saisissante (Fédération de Transport) estime, entre autres, la baisse des prix enregistrée au niveau du Maroc, qui est de l'ordre de 30 % environ est due à une concurrence déloyale, puisque, selon elle, les prix pratiqués se situeraient en dessous des coûts de référence édités par le ministère de tutelle. Dans ce cas, le Conseil estime qu'en matière de baisse du prix de transport de marchandises, deux cas de figure seraient envisageables. En premier lieu, la baisse des prix serait due à des conditions normales de compétitivité (économies de charges, gestion des ressources humaines...) et il s'agit dans ce cas d'une concurrence loyale escomptée par la libéralisation du secteur concerné. En second lieu, la pratique de prix bas peut être le fait d'entreprises qui recourent à la fraude et/ou compensent leurs pertes à travers des activités informelles ou illégales (salariés non déclarés à la CNSS, défaut de facturation, surcharge, carburant issu de la contrebande...). Dans ce deuxième cas, la pratique de prix bas serait de nature à déstabiliser le marché concerné. Il s'agit d'une concurrence déloyale. Dans ces situations, et dans l'état actuel du droit de la concurrence, le Conseil souligne que la pratique de prix abusivement bas ne peut être sanctionnée que dans le cadre des ententes, si le prix contesté résulte d'une collusion entre entreprises, ou lorsque ce prix bas est la manifestation d'un abus de position dominante. Le Conseil tient à signaler aussi que parmi les faiblesses relevées, qui peuvent impacter négativement le développement d'une concurrence loyale dans le marché concerné figure: l'absence de données sur le secteur, la non utilisation du manifeste de fret par les Transporteurs et la vétusté du parc de véhicules en circulation. A noter que le secteur est régi par un contrat-programme 2011-2013 daté du 22 juin 2011, et signé entre le ministère de tutelle, la CGEM et 15 associations professionnelles dont la Fédération de transport. Ce contrat programme constitue l'un des contrats d'application sectoriels prévus par le contrat programme pour le développement de la compétitivité logistique 2010-2015, signé, sous la présidence effective de SM le Roi, le 20 avril 2010 entre le Gouvernement et le secteur privé représenté par la CGEM. Le secteur du transport routier de marchandises est un secteur clé de l'économie, notamment par le rôle qu'il joue au niveau de l'approvisionnement des marchés en marchandises et produits divers et par son incidence directe sur les coûts des transactions pour les agents économiques.