La prison de Oukacha à Casablanca connait une surpopulation carcérale avec un total de 7572 prisonniers alors que sa capacité d'accueil ne dépasse guère 5800 détenus, indique un rapport débattu mardi par la Commission de la Justice, de la législation et des droits de l'Homme de la chambre des représentants suite à une visite d'inspection effectuée à cet établissement pénitencier. Ce rapport, réalisé par une commission parlementaire composée de 12 députés en vertu de l'article 40 du règlement intérieur de la Chambre des représentants et en réponse à une demande des groupes parlementaires de la majorité, indique que chaque prisonnier a droit à une superficie de 1,2 mètre carré, tandis que les normes internationales en la matière avancent un minimum de 9 mètres carrés pour chaque détenu et que dans un certain nombre de cas, 56 prisonniers partagent une superficie se situant entre 3 et 5 mètres carrés. Face à cette situation, il est «difficile d'évoquer la possibilité d'accorder aux détenus leurs droits élémentaires tels que inscrits dans les législations nationale et internationale», note le rapport qui se réfère aux données recueillies par la commission, précisant que le surpeuplement à la prison de Oukacha est du en grande partie à «la détention provisoire» qui concerne 80 pc des détenus, au retard enregistré dans le jugement des affaires, à la non-application de la liberté conditionnelle et à l'absence de normes objectives dans la procédure de Grâce. La commission parlementaire a relevé, en outre, un manque d'infrastructure de base dans la prison et l'absence des «conditions de santé adéquates» ainsi que la qualité de la nourriture qui laisse à désirer. En dépit du budget important alloué à la restauration, les prisonniers comptent principalement sur la nourriture qu'ils reçoivent de leurs familles, déplore le rapport qui fait état par ailleurs de disfonctionnements liés aux programmes de formation et de réinsertion, à «l'absence d'une stratégie claire, d'objectifs spécifiques et de délais fixés pour les cursus de formation et à l'exécution des programmes. La commission a noté également que le nombre des ressources humaines employées dans la prison (517 employés) ne suffit pas à dispenser des services en comparaison avec la moyenne internationale qui est d'un employé pour trois prisonniers, outre l'absence remarquée de formation de ces employés, particulièrement dans les domaines des droits de l'Homme et des normes internationales de traitement de prisonniers, ainsi que la nécessité d'améliorer leur situation financière et morale. Un certain nombre de recommandations ont été formulées par la commission, à savoir la nécessaire mise en oeuvre de mécanismes de contrôle selon le principe de la reddition des comptes, l'application du principe de responsabilité et de sanction dans les cas de violations et d'abus et l'adoption de mesures nécessaires pour l'ouverture d'une enquête sur la corruption dans les établissements pénitentiaires en général et la prison de Oukacha en particulier, souligne en substance le rapport. Lancement d'un dialogue national sur les prisons et la situation des prisonniers Le ministère chargé des relations avec le parlement et la société civile a annoncé le lancement d'un dialogue national sur la situation dans les prisons et les conditions de détention des prisonniers. Le ministère a précisé, dans un communiqué, qu'il a été convenu avec les organisations des droits de l'homme, qui forment le comité de coordination sur les prisons, d'ouvrir un dialogue national responsable sur la situation dans les prisons et les conditions de détention des prisonniers, avec la participation d'organisations gouvernementales et non-gouvernementales et d'institutions nationales ainsi que le parlement. Il a été également convenu d'adopter pour les besoins de ce dialogue une plateforme contractuelle englobant les objectifs généraux, les axes, les mécanismes et les propositions législatives et réglementaires, ajoute la même source. Un agenda exécutif de mise en Âœuvre et de suivi des conclusions et recommandations de ce dialogue a été élaboré en concertation entre les deux parties, indique le communiqué, qui souligne également que cet accord a été conclu lors d'une réunion entre le ministre chargé des relations avec le parlement et la société civile, Lahbib Choubani, tenue le 27 juin denier avec une délégation représentant le comité de coordination sur les prisons. Le comité comprend l'association des barreaux du Maroc, la Ligue marocaine de défense des droits de l'homme, l'Association marocaine des droits de l'homme, l'Organisation marocaine des droits de l'homme, le Forum vérité et justice, l'Observatoire marocain des prisons, Amnesty International-Maroc, le Forum «Al Karama» pour les droits de l'Homme, le centre des droits de l'homme, l'association Adala, le centre marocain des droits de l'homme, l'association médicale de réhabilitation des victimes de torture, l'Instance marocaine des droits de l'homme et l'Observatoire de la justice. Le lancement de ce dialogue est le fruit d'une discussion franche et responsable autour de la question de la situation dans les établissements pénitentiaires, ainsi que les dispositions prévues par la nouvelle constitution en ce qui concerne la relation entre le gouvernement, la société civile et les institutions nationales, affirme le ministère. Le communiqué insiste en outre que le dialogue national reflète la volonté du gouvernement et de la société civile de lancer une nouvelle dynamique pour un dialogue national responsable visant l'échange d'opinions et la contribution à la mise en place de mécanismes susceptibles de garantir le respect des droits des prisonniers et des prisonnières et les règles minima pour le traitement des détenus établies par les Nations Unies, de la loi 98/23 réglementant les prisons à travers la prise de mesures visant la réhabilitation et l'intégration des prisonniers et des prisonnières, y compris les mineurs. Ce dialogue est également conforme aux nouvelles prérogatives dévolues par la constitution aux organisations non-gouvernementales et à la société civile, et reflète la prise de conscience des parties quant à l'importance du dialogue et leur détermination à traiter les questions qui revêtent un caractère urgent.