Les faits sont têtus. L'année dernière, les achats du Maroc à l'étranger lui ont coûté la somme de 356 milliards de Dirhams. Alors que ses ventes à l'étranger ne lui ont rapporté que 171 milliards de Dirhams. L'arithmétique est simple, ce sont 185 milliards de Dirhams de déficit commercial à porter sur les comptes de la nation. Et le proche avenir s'annonce encore moins reluisant. L'achat de pétrole et des hydrocarbures représentent un cinquième des importations du Maroc. Même si les importations de pétrole brut ont reculé de 4,8% en volume, l'année écoulée, le montant facturé a, par contre, progressé de 24,8%, du fait du renchérissement du prix du baril. En tout, le Maroc a décaissé pas moins de 78 milliards de Dirhams pour l'acquisition de pétrole et dérivés, auxquels il faut ajouter 44 autres milliards de Dirhams que l'Etat a déboursé au titre des subventions. Vu le contexte politique très tendu au Moyen Orient, rien ne laisse penser que la pression devrait se relâcher à court terme sur le prix du baril de pétrole. La facture d'importation des céréales s'est chiffrée, quand à elle, à 11 milliards de Dirhams en 2011. Alors que la récolte a été plutôt bonne l'année précédente, c'est quand même une hausse de 16% du volume des céréales achetées à l'étranger que le pays a enregistré. Là encore, l'augmentation des prix des céréales à l'échelle internationale a fait que c'est près de moitié que le montant facturé s'est alourdi. En 2011, le Maroc a importé 3,7 millions de tonnes de céréales et les estimations tablent sur un volume de quelques 5 millions de tonnes en 2012. Sur les marchés internationaux, les prix des produits alimentaires ne semblent connaître actuellement aucune détente. Et rien ne présage que la situation devrait prochainement s'améliorer. Ce serait plutôt le contraire si l'on tient compte du fait que l'année agricole n'a pas été mauvaise que pour le seul Maroc. Combien y a-t-il dans les caisses de l'Etat pour payer ces indispensables achats à l'étranger ? 150 milliards de Dirhams, à peine de quoi couvrir cinq mois d'importations. Quand au budget public, il présente un déficit de 50 milliards de Dirhams. La politique économique du précédent gouvernement a été axée sur le marché intérieur, animé par une forte croissance de la consommation, de manière à faire face à la crise en Europe, qui absorbe 57,6% des exportations du Maroc. Sauf que c'est une solution qui n'est pas tenable à la longue, surtout que la situation économique des partenaires européens ne présente pas de signes de redressement prochain. Il est donc temps de brider les importations et de stimuler, en parallèle, les exportations pour éviter de siphonner entièrement les maigres réserves de change et de maintenir l'endettement de la nation dans les limites du raisonnable. C'est faire œuvre utile pour préserver l'autonomie financière du pays, l'un des piliers de la souveraineté économique, a estimé Adil Douiri, lors de son intervention, samedi dernier, au cours de la conférence économique tenue sous le thème «Quelle idéologie du développement économique au Maroc? Le défi de l'égalitarisme et les contraintes de la crise économique mondiale», organisée à Casablanca par le Parti de l'Istiqlal, dans le cadre de la préparation de son 16éme congrès général. Le sujet a été débattu par un aréopage de professeurs-chercheurs émérites et d'hommes politiques pétris d'expériences. Outre le ministre de l'Economie et des finances et membre du comité exécutif du Parti de l'Istiqlal, Nizar Baraka, et le président de l'Alliance des Economistes Istiqlaliens et ex-ministre du Tourisme, Adil Douiri, ont également apporté leur contribution académique l'ex-ministre de l'Economie et des finances du début des années soixante et membre du Conseil de la présidence de l'Istiqlal, M'hamed Douiri, ainsi que les professeurs et analystes économiques Driss Benali et El Arabi Jaidi. L'exemple grec est là pour rappeler toute la pertinence du concept de souveraineté économique, qui passe non seulement par la préservation de l'autonomie financière, mais aussi par le patriotisme économique, que M. Douiri a défini comme la création et la promotion des activités d'entreprises ayant leur centre de décision au Maroc, sans pour autant négliger l'attrait des investissements étrangers, l'essentiel à ce sujet étant de booster l'offre sur le marché du travail. Tout aussi important est le concept istiqlalien d'égalitarisme économique, lancé et développé par le parti dans les années soixante, qui se traduit actuellement par la création de plus de richesses en vue de leur répartition équitable entre les différentes couches sociales. La rigueur est désormais de mise pour ne pas réduire à néant les efforts et acquis de la dernière décennie.