L'aviation soudanaise a lancé mardi de nouveaux raids aériens sur le Soudan du Sud, selon des responsables du Sud, menaçant un récent rapprochement entre les deux pays et suscitant une vive inquiétude de la France et des Etats-Unis. Dans la nuit de lundi à mardi, après de premiers affrontements, le Soudan a «suspendu» la visite de son président Omar el-Béchir au Soudan du Sud prévue la semaine prochaine dans le cadre de ce rapprochement. Mardi, pour la deuxième journée consécutive, l'aviation de Khartoum a lancé des raids sur le Soudan du Sud, dans des zones pétrolifères proches de la frontière entre les deux Etats, selon des officiels sud-soudanais. «Ce matin, nous avons entendu le retour de (bombardiers) Antonov, ils ont lâché deux bombes», a déclaré Gideon Gatpan, ministre de l'Information de l'Etat d'Unité. «Nous pensons que ces frappes aériennes visaient des champs pétroliers», a-t-il ajouté. «Les bombardements n'ont jamais cessé, il y a eu des combats au sol ce (mardi) matin et nous nous attendons que ce qu'ils (l'armée soudanaise) nous attaquent à d'autres endroits», a déclaré le chef d'état-major de l'armée sud-soudanaise, Philip Aguer. «Il est évident qu'il ne peut y avoir des combats de l'après-midi jusqu'au matin suivant sans pertes», a-t-il ajouté, tout en indiquant attendre des détails sur un bilan des morts et des blessés. Juba défendra son intégrité territoriale, a prévenu le ministre sud-soudanais de l'Information, Barnaba Marial Benjamin, tout en assurant que son pays ne voulait pas se voir entraîner dans une guerre «insensée» avec Khartoum. Le porte-parole du ministère soudanais des Affaires étrangères Al-Obeid Meruh a déclaré pour sa part que l'attaque était une réponse à une offensive «à l'arme lourde» contre un champ pétrolier «à l'intérieur du territoire soudanais». L'armée soudanaise a assuré que le calme était revenu mardi et que les forces du Nord «contrôlaient totalement la région de Heglig», disputée entre les deux pays. Le président sud-soudanais Salva Kiir avait accusé lundi le Soudan d'avoir attaqué son pays en bombardant des positions et en menant des attaques au sol dans l'Etat d'Unité. Il avait affirmé que les forces sud-soudanaises avaient contre-attaqué et traversé la frontière pour s'emparer de l'important champ pétrolier d'Heglig, situé en territoire soudanais mais revendiqué par les deux pays. Heglig est exploité par le consortium GNPOC, détenu à 40% par le chinois CNPC. Lundi soir, M. Béchir a suspendu une visite à Juba, prévue le 3 avril pour un sommet avec le président Kiir, qui devait faire baisser les tensions entre les deux pays et permettre de signer des accords. Le ministre sud-soudanais de l'Information a affirmé mardi que l'invitation était «toujours valable», mais le chef du service du renseignement de Khartoum, Mohammed Atta, a déclaré à des journalistes qu'»après les affrontements, l'atmosphère n'est plus propice à des négociations». Ces tensions ravivent le spectre d'un conflit à grande échelle entre le Nord et le Sud, qui se sont affrontés durant 20 ans, au cours d'une guerre civile qui a fait deux millions de morts et a pris fin en 2005 avec un accord de paix ayant abouti à l'indépendance du Soudan du Sud juillet 2011. Les Etats-Unis ont jugé «particulièrement alarmante» la poursuite des affrontements, soulignant que la situation pouvait «devenir de plus en plus dangereuse» et finir par «échapper à tout contrôle». La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton s'est dite «bouleversée» par la poursuite des affrontements, estimant que Khartoum en portait le «poids de la responsabilité». Très préoccupée», la France a appelé «instamment à la cessation immédiate des affrontements». Le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a lancé un cri d'alarme, appelant les 16.0000 réfugiés soudanais installés dans les environs du camp de Yida au Soudan de Sud à quitter les lieux en raison des récents affrontements dans la région.