La nouvelle Constitution marocaine, adoptée par voie référendaire le 1er juillet 2011, a produit une forte impression du fait de l'importance des changements qu'elle a apportés à plusieurs titres du texte de 1996. Par-delà sa taille et sa formulation précise et circonstanciée, la nouvelle Charte fondamentale du Royaume fait écho quasiment à toutes les doléances portées de longue date par les acteurs de la société civile et les formations politiques du pays. Loin de dresser un inventaire exhaustif de tous les acquis nouvellement introduits par le constituant, il est question ici de mettre en exergue ceux jugés substantiels. Tout d'abord, du point de vue identitaire, la diversité de la nation a connu un enrichissement sans précédent avec l'officialisation constitutionnelle de l'amazighe comme composante essentielle de l'identité nationale et la consécration d'autres affluents identitaires comme les cultures, saharo-hassanie, hébraïque, africaine et méditerranéenne. Concernant les droits de l'Homme, on observe une extension du référentiel normatif y afférent en l'occurrence, la consécration de la primauté des traités internationaux dûment ratifiés par le Royaume, la promotion du choix démocratique comme constante irréversible de la nation et la constitutionnalisation des principes et instances de la bonne gouvernance. De ce fait, la lecture du nouveau texte constitutionnel permet de dénombrer une série de nouveaux droits consacrés par le constituant. On peut citer, dans ce cadre, les droits civils et politiques comme le droit à la vie, le droit à la sécurité, le droit à l'information, la présomption d'innocence, la liberté de presse mais aussi les droits sociaux, tels le droit à l'habitat décent, aux soins de santé, à la protection sociale, à la couverture médicale, à la formation professionnelle, à l'éducation physique et artistique, à l'accès à l'eau ou à l'environnement sain (art. 31). La nouvelle Charte constitutionnelle se distingue également par la consécration des droits des catégories sociales spécifiques. A titre non exhaustif, la femme dont l'égalité et la parité par rapport à l'homme sont désormais étendues à tous les domaines (art. 19) ; les jeunes dont la représentativité va être prise en charge par un Conseil consultatif de la jeunesse et de l'action associative ; la protection contre la vulnérabilité des personnes et des catégories à besoins spécifiques (art. 33) ; la défense des droits et des intérêts légitimes des citoyens marocains résidant à l'étranger (art. 16 et 17). La citoyenneté active sera, par ailleurs, stimulée par des mécanismes qui habilitent les citoyens à agir directement pour sauvegarder leurs droits, soit en présentant des pétitions aux pouvoirs publics (art. 15), soit en saisissant indirectement, via le juge ordinaire, la Cour Constitutionnelle au sujet d'une loi, si l'une des parties au litige estime qu'elle porte atteinte à ses droits et libertés, garantis par la Constitution (art. 133). Concernant le pouvoir législatif, et par-delà la référence aux droits de l'opposition parlementaire comme composante essentielle des deux Chambres (art. 10 et 60), le Parlement a vu s'étendre son domaine d'action en matière législative (art. 71), budgétaire, financière (art. 75 et 76) et de contrôle sur le Gouvernement (art. 100 à 106). Plus encore, l'organe législatif est habilité, en vertu des articles 70 et 101 de la Constitution, à évaluer les politiques publiques menées par le Gouvernement et à auditionner les responsables des administrations et des établissements et entreprises publics, en présence et sous la responsabilité des ministres dont ils relèvent (art. 102). La structure bicamérale du Parlement a été reconsidérée à l'avantage de la première Chambre. La raison en est évidente. La Chambre des Représentants, procédant seule du suffrage universel direct et jouissant ainsi de la légitimité populaire, il lui appartient de bénéficier d'une certaine prééminence par rapport à la seconde Chambre. Cette prééminence est repérable à un triple niveau au moins, à savoir, la priorité donnée à la première Chambre s'agissant du dépôt des projets de loi, l'investiture du Gouvernement par cette seule Chambre et le vote de la motion de censure, qui est une révocation parlementaire de l'exécutif, n'est plus une prérogative de la seconde Chambre. Un autre acquis, et non des moindres, a été la consécration constitutionnelle de la bonne gouvernance en lui réservant un titre entier du nouveau texte. Cette constitutionnalisation a visé non seulement les principes généraux de la bonne gouvernance, dont la neutralité, la transparence, la probité, l'intérêt général, la responsabilité, la reddition des comptes et la déclaration de patrimoine (art. 154 à 159), mais aussi les principales instances en charge de sa mise en application. On en veut dans ce cadre, sans prétendre à l'exhaustivité, le Conseil national des droits de l'Homme, le Médiateur, le Conseil de la communauté marocaine à l'étranger, l'autorité chargée de la parité et de la lutte contre toutes formes de discrimination, la Haute autorité de la communication audiovisuelle, le Conseil de la concurrence, l'Instance nationale de probité et de lutte contre la corruption. Ceci dit, soucieux de donner corps à l'engagement de renforcer les pouvoirs du Parlement en matière de contrôle et d'évaluation des politiques publiques, le constituant a pris soin de préciser que toutes les instances en charge de la bonne gouvernance visées dans le titre XII de la Constitution ont l'obligation de présenter, pour discussion et débat, des rapports sur leurs activités au moins une fois par an (art. 160). * Le Centre d'Etudes Internationales (CEI) est un groupe de réflexion et d'analyse basé à Rabat. Acteur actif du débat sur l'intégration maghrébine, le CEI s'intéresse également aux nouvelles problématiques liées à la sécurité internationale, notamment l'immigration, le terrorisme et la fragmentation étatique. En l'an 2010, le CEI a publié, auprès des éditions Karthala, un ouvrage collectif intitulé : « Une décennie de réformes au Maroc (1999-2009) ». En janvier 2011, le CEI a rendu public, auprès du même éditeur, un second ouvrage titré, « Maroc-Algérie : Analyses croisées d'un voisinage hostile » et y publiera, au mois de septembre de l'année 2011, un troisième ouvrage libellé, « Le différend saharien devant l'Organisation des Nations Unies ». Le CEI a à son actif plusieurs supports électroniques parmi lesquels figure un journal du web, créé récemment, dénommé Ibn Khaldoun et consultable sur le lien électronique : HYPERLINK “http://www.ibn-khaldoun.com” www.ibn-khaldoun.com.