La pression internationale monte contre Israël, avec l'appel à une écrasante majorité de l'Assemblée générale des Nations Unies à un "cessez-le-feu humanitaire" dans la bande de Gaza, devenue "l'enfer sur terre" selon l'ONU en raison des bombardements et des conditions humanitaires terribles. Pour la première fois depuis le début de la guerre, le président américain Joe Biden a critiqué publiquement le gouvernement israélien pour son opposition à une "solution à deux Etats" et l'a mis en garde contre une érosion du soutien de l'opinion publique mondiale à cause de ses bombardements "aveugles" sur Gaza. Prenant le relais d'un Conseil de sécurité paralysé, l'Assemblée générale de l'ONU a réclamé mardi "un cessez-le-feu humanitaire immédiat", dans une résolution adoptée par 153 voix pour, 10 contre, et 23 abstentions. Mais le texte, non-contraignant, ne condamne pas le Hamas, une absence fustigée par Israël et les Etats-Unis qui ont voté contre. La population dans la bande de Gaza, où 85% des 2,4 millions d'habitants ont été déplacés et des quartiers entiers détruits par les bombardements, vit "l'enfer sur terre", a lancé le directeur de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini. Dans le sud du territoire soumis à un blocus israélien depuis plus de 15 ans et à un siège total depuis deux mois, de nouveaux raids meurtriers ont visé mardi Khan Younès et Rafah. Des frappes sur deux maisons à Rafah ont fait 24 morts, selon le ministère de la Santé du Hamas. "Ils (les militaires israéliens) ont dit eux-mêmes que le sud est sûr, Rafah est sûre. Où est la sécurité à Rafah ? Chaque jour il y a des frappes à Rafah ici", a lancé Tawfiq Abou Brik, au milieu des ruines. L'armée israélienne a déclaré la guerre au Hamas après une attaque d'une violence et d'une ampleur sans précédent menée le 7 octobre contre Israël par ses commandos infiltrés depuis la bande de Gaza voisine.
Deux corps d'otages découverts
Le 7 octobre, les combattants palestiniens ont emmené aussi environ 240 personnes en otage à Gaza, où 135 sont toujours détenus, selon l'armée, après plusieurs libérations dont une centaine à la faveur d'une trêve fin novembre. Mardi, l'armée a annoncé avoir "durant une opération à Gaza, découvert et ramené en Israël les corps des otages Eden Zakaria et (du soldat) Ziv Dado". Les combats au sol accompagnés de frappes aériennes font rage à Khan Younès, où s'étaient réfugiés des centaines de milliers de civils fuyant la progression des troupes israéliennes dans le nord de Gaza. Le Hamas a fait état aussi de combats dans le centre du territoire. Et des tirs d'artillerie ininterrompus et plusieurs frappes ont ciblé la ville de Gaza (nord). Les soldats israéliens ont lancé le 27 octobre une offensive terrestre dans le nord de Gaza, avant de l'étendre à l'ensemble du territoire. Selon l'armée, 105 soldats y sont morts dont 13 tués par des "tirs amis". Les combattants palestiniens ont, eux, continué à tirer des roquettes en direction d'Israël dont la grande majorité ont été interceptées, selon l'armée.
« Il reste des gens sous les décombres »
Après avoir fui leurs maisons dans le nord puis leurs abris à Khan Younès, des dizaines de milliers de Palestiniens s'abritent désormais à Rafah, plus au sud, devenue un gigantesque camp avec de centaines de tentes montées avec des bouts de bois, des bâches en plastique et des draps. Après une frappe nocturne qui a creusé un énorme cratère dans un quartier de Rafah, des survivants fouillent les ruines, à mains nues ou à l'aide de pelles. "Il reste des gens sous les décombres. La Défense civile nous aide mais nous n'avons pas assez d'équipements pour les sortir", a témoigné Abou Jazar, 23 ans. Des blessés, enveloppés dans des couvertures, sont emmenés dans le coffre des voitures vers un hôpital de la ville. D'autres sont transportés, une fois tirés des décombres, sur de grandes couvertures tenues par des jeunes hommes qui courent au milieu de personnes couvertes de poussière. Depuis le siège imposé le 9 octobre à Gaza, Israël contrôle l'entrée de l'aide internationale dans le territoire via l'unique point de passage ouvert de Rafah, avec l'Egypte. Selon l'agence de l'ONU chargée de la coordination humanitaire (Ocha), 100 camions transportant de l'aide sont entrés depuis lundi soir via Rafah, de même que 120.000 litres de carburant, une assistance qui reste d'après elle très en deçà des besoins. De plus, en raison des combats, l'aide est très difficilement acheminée au-delà de Rafah où la nourriture se fait rare. Israël cherche réellement à expulser les Palestiniens de leur Terre D'après un communiqué des Affaires étrangères égyptiennes, toutes les pratiques israéliennes sur le terrain confirment son intention de déplacer les Palestiniens de leurs terres. Le communiqué vient en réponse aux déclarations faites mardi du ministre israélien des Affaires stratégiques, Ron Dermer, concernant « l'encouragement de la migration volontaire depuis la bande de Gaza ». Le porte-parole du ministère égyptien des Affaires étrangères, l'ambassadeur Ahmed Abu Zeid, a réitéré dans le communiqué : « la position de l'Egypte rejetant complètement toute tentative israélienne visant à déplacer les Palestiniens hors de Gaza, volontairement ou par la force ». Il a, en outre, estimé que "toutes les pratiques israéliennes sur le terrain confirment les intentions israéliennes de provoquer le déplacement forcé des Palestiniens hors de leurs terres". Depuis le début de la guerre, le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi a, à plusieurs reprises, mis en garde contre les répercussions de toute tentative de déplacement des Palestiniens de Gaza vers le Sinaï égyptien, notamment la possibilité de liquider la cause palestinienne. Quelque 2,4 millions de Palestiniens vivent dans des conditions catastrophiques à Gaza, même avant cette guerre, en raison du siège israélien continu depuis que le mouvement Hamas a remporté les élections législatives de 2006. Plus tôt mardi, le Premier ministre palestinien Muhammad Shtayyeh a déclaré, lors de la session hebdomadaire du gouvernement, que le projet de déplacement du peuple palestinien « est toujours sur la table » pour les Israéliens.a