Comme chaque 14 août, depuis 1979, le Maroc célèbre dans les règles de l'art la récupération de la province d'Oued Eddahab. Retour sur les tenants et aboutissants de cet épisode historique du processus de parachèvement de l'intégrité territoriale du Royaume. Perpétuellement menacée par le Polisario, implantée dans une Mauritanie affaiblie et dont le gouvernement Ould Mohamed Salek se montrait de plus en plus complaisant à l'égard de l'Algérie, la province d'Oued Eddahab fut finalement réclamée par le Maroc au nom d'un impératif que feu SM le Roi Hassan II avait vite compris : la stabilité régionale et la lutte contre les prétentions hégémoniques du pays voisin, comprenez l'Algérie.
Ainsi, le 14 août 1979, les délégués de la totalité des Tribus de cette province se sont déplacés à Rabat pour faire acte d'allégeance au Roi du Maroc, feu SM Hassan II, signant de manière définitive leur retour à la mère patrie, soulevant le courroux de l'armée algérienne, dans un décor quasi onirique en cette fin de journée, la cérémonie d'allégeance a été si magistralement mise en couleur, avec le Roi et les princes - Sidi Mohammed et Moulay Rachid - tout de blanc vêtus et des dignitaires sahraouis, pour la plupart en bleu et blanc, donnant à la Beyâa toute sa dimension patriotique.
Mais la perspective politique, diplomatique, militaire et historique du retour de Oued Eddahab au Maroc n'a échappé à personne. Surtout pas au regard torve du voisin de l'Est, amèrement désappointé, car, après la Marche Verte, il a été une fois de plus étonnamment surpris par ce que l'on appelait déjà le « deuxième coup de maître » d'Hassan II. Le 14 août 1979, le Maroc réalise la réunification de son Sahara, quatre ans après la plus grande marche de son Histoire et de l'Accord de Madrid, et à peine à un an et quelques mois après le célèbre Sommet de l'OUA (Organisation de l'Unité Africaine) organisé à Nairobi en 1980, lorsque feu le Roi Hassan II a annoncé de façon percutante Son accord de principe pour l'organisation d'un référendum au Sahara. Il prend soin de souligner qu'il s'agira d'un "référendum confirmatif", dont le but sera ni plus ni moins d'entériner l'indéniable rattachement du Sahara au Royaume.
Un climat politique trop fragile
Dénommée Rio de Oro comme Dakhla fut baptisée Villa Cisnéros, sous la colonisation espagnole, cette province extrême-méridionale du Royaume avait été une première fois intégrée à la Mauritanie, suite à l'Accord tripartite, signé le 14 novembre 1975, (quelques jours seulement après le succès de la Marche Verte) par l'Espagne, le Maroc et la Mauritanie. L'Accord de Madrid octroyait ainsi la région du Rio de Oro( Oued Eddahab) à la Mauritanie, alors dirigée par Mokhtar Ould Daddah, qualifiée de « père libérateur de la Nation », renversé en été 1978 par un de ses hauts officiers de l'armée, Moustapha Ould Mohamed Salek.
L'accord tripartite de Madrid a eu la valeur d'une décolonisation finale parce qu'il était tout à fait en phase avec la doctrine des Nations Unies, et en premier lieu avec les demandes de la 4ème Commission, qui prônait une solution politique concertée entre la puissance coloniale, l'Espagne, et l'ayant-droit, le Maroc. Elle illustre ainsi la parfaite adéquation de la revendication marocaine avec le droit international, et donc la décolonisation définitive du Sahara.
Selon la lecture de l'historien Nourdine Belhaddad, fin connaisseur de l'Histoire du Sahara marocain, « le retour de Oued Eddahab est le résultat d'une volonté impérieuse de toute la population locale qui ne concevait plus son appartenance et son affranchissement sous la domination mauritanienne ». Aussi, ajoute-t-il que « l'accord de Madrid, qui les avait exclus du Maroc et forcés à vivre sous le régime mauritanien, était leur plus grande et leur plus douloureuse frustration ».
Toujours selon notre historien, « Une telle conjoncture, plus ou moins prévisible, ne pouvait échapper à la lucidité du Roi Hassan II qui, logique et loi historique obligent, a récusé le fait accompli. Il était tout à fait informé des grands axes stratégiques de la région ». Aujourd'hui, 44 ans après sa libération, Oued Eddahab vit au rythme d'une dynamique soutenue, à l'échelle locale et régionale, dans plusieurs secteurs. Parmi ses mégaprojets, nommons en tête du peloton le port de Dakhla Atlantique, la voie express Tiznit-Dakhla, le projet West Africa Free Zone et le projet d'irrigation de 5.000 ha par dessalement de l'eau de mer, sans oublier les défis liés aux énergies renouvelables.
Trois questions à Nourdine Belhaddad « Les Tribus d'Oued Eddahab restent attachées aux traditions ancestrales hassanies » Pour en savoir davantage sur les tenants et aboutissants de la rétrocession d'Oued Eddahab, nous avons tendu le dictaphone au Pr Nourdine Belhaddad, expert de l'Histoire du Sahara marocain.
Professeur, parlez-nous de l'Histoire de la colonisation d'Oued Eddahab par l'Espagne.
Lorsque Oued Eddahab, dont le nom a été traduit en espagnol par « Rio de Oro », a été occupé par l'Espagne en 1884, les Marocains de l'époque savaient déjà que cet événement n'aurait aucun impact sur leur militantisme concret et leur nationalisme inébranlable. Le colonisateur espagnol a tout essayé pour les mettre sous sa coupe : torture, corruption, intimidation, enlèvement et assassinat. Les Tribus d'Oued Eddahab, attachées aux traditions ancestrales hassanies et à la beyâa alaouite, savaient que leur fidélité à la terre de leurs ancêtres finirait par payer. Leur lutte a certes duré plus d'un siècle, mais elle a porté ses fruits.
Dans quelles conditions la ville a été rétrocédée à la mère patrie ?
La cérémonie du 14 août 1979 s'est déroulée dans un contexte politique et militaire délétère, supporté militairement et financièrement par les adversaires de la nation qui tentaient, tant bien que mal, d'occuper Oued Eddahab par la voie de la force. Le Roi Hassan II, après avoir réaffirmé la détermination du Maroc à ne pas laisser ses propres fils livrés à leur sort, ni à la merci d'une quelconque tentative d'agression, a fait livrer des armes et des fusils aux représentants des Tribus d'Oued Eddahab. Après ce geste symbolique, le Pacte d'allégeance mutuelle prend une signification emblématique : il réitère le serment du Roi et des populations d'Oued Eddahab à leur attachement commun.
Comment pourrait-on écrire l'Histoire de la ville, aujourd'hui ?
Aujourd'hui, grâce à la vision éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Souverain et Commandeur des croyants, diplomate de premier plan, le Maroc a su perpétuer l'attachement des Tribus sahraouies au trône alaouite. Grâce à ce lien indéfectible, les défis économiques, diplomatiques, politiques et stratégiques auxquels sont confrontés la ville et sa région, dont elle est le chef-lieu, avancent à grands pas et à vue d'oeil. Les pays les plus avancés à l'échelle mondiale croient dur comme fer à l'importance stratégique de la région Dakhla-Oued-Eddahab grâce à cette sagacité exemplaire qui est celle de notre Roi. Dakhla/Oued-Eddahab : Une région au mille et un défis écologiques La région de Dakhla-Oued Eddahab est l'une des douze nouvelles régions du Maroc instituées par le découpage territorial de 2015. Le secteur primaire emploie 34,5% de la population active de Dakhla-Oued Eddahab et contribue pour 26,9% au PIB régional en 2015, alors que le secteur tertiaire représente 64,6% du PIB régional et 54 % de la population active, dont 32,1% dans la Fonction publique et 13,1 % dans le commerce. La région dispose d'une multitude de potentialités naturelles qui sont de nature à conforter la position économique. Elle est localisée à l'extrême Sud du Maroc, ce qui est en soit une position stratégique importante. En effet, son emplacement géographique en fait le seul pont sur le territoire marocain entre la Mauritanie et le reste du Royaume, aussi bien sur terre que sur mer, ce qui lui permet un rapprochement de l'Atlantique, de l'Afrique et de l'Europe.
Ces provinces du Sud, ce qu'il est commun d'appeler le vaste Sahara atlantique, vont du pied du massif de l'Anti Atlas jusqu'à Lagouira. Cette région, ayant occupé une place historique particulière dans la construction et le ressourcement de l'Etat marocain, est, à bien des égards, l'une des bases de la physionomie et de l'identité territoriale du Royaume. Cependant, comme dans le corridor du Drâa, la pluviométrie est très faible (moins de 50 mm par an) dans cette région, et les réserves d'eau mobilisables sont insuffisantes pour permettre le développement d'activités agricoles non irriguées. A ce premier point s'ajoute un autre facteur d'homogénéité frappant : la densité très faible de la population. La ressource en eau potable est une denrée naturelle très rare dans cette contrée du Royaume, marquée par une distribution spatiale irrégulière. En effet, ces ressources n'apparaissent que tous les 4 à 5 ans, sous forme d'inondations pendant la saison des pluies. Pour répondre aux besoins en eau toujours croissants de la population, un certain nombre d'efforts ont été déployés. Face à cette situation alarmante, l'ONEE a entrepris plusieurs projets d'eau potable et d'assainissement liquide dans la ville, y compris la réalisation d'une nouvelle station de traitement des eaux souterraines d'un débit de 200 litres par seconde, et l'extension des installations de distribution. L'ONEE a également mis en place un programme de distribution par camion-citerne 14 heures par jour, en coopération avec les autorités locales. Finalement, et afin de remédier aux problèmes des eaux usées, rejetées dans la baie de Dakhla, l'Office a prévu la deuxième phase du programme d'assainissement en partenariat avec le Ministère de l'Intérieur, le Ministère de l'Energie et des Mines, l'Agence du Sud, les Wilayas de la région, les Conseils régionaux et provinciaux et la municipalité de Dakhla. Tout un programme en perspective.