L'institution royale, les constantes nationales, les valeurs sociales et religieuses, les assemblées élues, les partis politiques, les grands chantiers de réforme et de développement... tout y passe. L'attaque médiatique frontale non ou faussement argumentée, cette nouvelle mode hideuse et dégradante, ratisse large. La rigueur professionnelle cède le pas à un amateurisme décoiffant où la rumeur et la contre-vérité sont érigées en vérités établies et le nihilisme en ligne de conduite. Si c'est à ce genre de journalisme qui ignore tout de ce que peuvent signifier les termes “responsabilité”, “intérêt national supérieur”, “accompagnement des chantiers de réformes”, “patriotisme”, “géopolitique”... qu'a mené l'élargissement de l'espace des libertés dans le pays, il n'y a vraiment pas de quoi être fier. Ceux qui dénient au Maroc sa liberté de presse, réelle et irréversible, sont paradoxalement ceux-là mêmes qui en usent et abusent sans retenue. Le constat s'offre à nous au fil des livraisons de certains titres de presse dont les faiseurs ont visiblement mal saisi le sens de l'ouverture et de la liberté pour s'aventurer en terrain glissant fait de manquements répétitifs au B.A.-BA du métier à tel point que le mot “information” a perdu tout son sens et toute sa sacralité. A quoi assiste-t-on? Au spectaculaire, au sensationnel, au voyeurisme, à l'”effraction” et au populisme abrutissant avec en toile de fond du dénigrement à en revendre. On se permet même de transgresser la loi suprême du pays et de crier ensuite à “l'étouffement de la liberté de la presse” en cas de remise à l'ordre par qui de droit. On oublie dans la foulée que si une loi, n'importe laquelle, peut être contestée et même décriée, elle ne doit sous aucun prétexte être violée. L'enfreindre c'est se placer ipso facto hors la loi, donc tomber sous le couperet de la loi. Un journaliste qui ignore cette règle élémentaire du droit ferait mieux de changer de métier. A quoi assiste-t-on encore? Au peu de cas fait à la déontologie, à l'éthique et à la responsabilité. Ils ne sont pas vendeurs, pas faciles (parce que pas à la portée du premier venu) et ne rapportent pas gros. Et puis, ils ne font pas de leurs auteurs des “stars” et ne les sortent pas en un tour de main de l'anonymat. Au fait, c'est quoi le rôle de la presse? Tirer la société vers le haut ou bourrer les crânes par des contre-vérités, des allégations mensongères, des histoires à dormir debout, de faux “scoops” tout aussi ridicules que nuisibles et des campagnes maladives et antipatriotiques? La question, dans le cas d'espèce marocain, mérite amplement d'être posée. Une poignée de journalistes, profitant de l'aubaine de la démocratisation et de l'ouverture du pays (ils étaient où du temps des sacrifices pour que ces acquis deviennent réalité?), se sont engouffrés dans un activisme qui ne veut pas dire son nom mais dont les contours ne trompent personne. Un activisme totalement incompatible avec la notion de responsabilité des médias vis-à-vis de leur mission d'information et par lequel ses “héros”, des tireurs dans le tas, voire des “tireurs à gage”, tentent de prendre tout un pays en otage. Si dans toutes les démocraties du monde la liberté de la presse est perçue comme un outil de consolidation de la démocratie et un moyen d'accompagnement du développement, elle n'en demeure pas moins un appui à la stabilité et non un facteur de déstabilisation. L'avis prédominant aujourd'hui au Maroc est que ce qui se passe est une déviation dangereuse en ce sens qu'elle ouvre grandes les portes devant l'anarchie et ses risques incalculables. Dès lors que la liberté de la presse est exploitée dans une entreprise d'attaque systématique aux fondements de l'Etat et de la société, on n'est plus dans la pratique d'un métier sensé noble, mais devant une forme de subversion qui menace les équilibres de la société en ouvrant des brèches dans les constantes objet d'unanimité nationale et dans les facteurs de stabilité, d'unité et de pérennité de la nation. Ce petit jeu extrêmement dangereux doit cesser et la fin de la recréation doit être annoncée. Non pas par des procédés liberticides, ce serait pour nous de la réaction intolérable et inacceptable, mais par une organisation conséquente du secteur et surtout par un sursaut patriotique impliquant toutes les composantes et les forces vives. Car plus dangereuse encore est cette forme de passivité presque généralisée des faiseurs d'opinion dans notre pays parmi les politiques, les universitaires, les écrivains..., les intellectuels en général qui semblent, si l'on excepte quelque hommes du métier qui montent de temps à autre au créneau, intimidés ou qui se complaisent dans une attitude de spectateurs non concernés par le spectacle de massacre qui se déroule sous leurs yeux. La facture des acquis réalisés par notre peuple et par notre pays a été trop élevée et il serait impardonnable de les laisser à la merci des vents alors que nos élites se murent dans un silence qui, à la longue, risque de passer pour complice.