Depuis le début de 2022, la Marine Royale a mené plusieurs exercices maritimes aux côtés de l'US Navy. Des exercices indispensables à l'expérimentation des frégates récemment acquises par le Maroc. Détails Depuis des années, les Etats unis et le Maroc ont renforcé leur coopération dans le domaine de la défense maritime. Les exercices navals s'enchaînent d'une année à l'autre. Nombreuses sont les manoeuvres organisées conjointement entre l'US Navy et la Marine Royale lors de ces dernières années et qui se tiennent de façon de plus en plus fréquente. On parle ici de « Atlas Handshake » et « Lightinig Handshake », qui s'ajoutent à African Lion, ayant une composante maritime. Des exercices devenus des piliers fondamentaux de l'amélioration des capacités défensives de la Marine Royale, engagée depuis longtemps dans un vaste chantier de modernisation. Un chantier appelé à perdurer, en partenariat étroit avec les Etats Unis. Ceci a fait l'objet d'une rencontre entre le contre-amiral Jeffrey Spivey, directeur du programme de partenariat maritime, Forces navales américaines en Afrique, et le CVM Mohamed Tahin, directeur de l'emploi au quartier général de la Marine Royale marocaine, ainsi que d'autres délégués de la Marine Royale marocaine, au bord du destroyer de « Arleigh Burke USS Porter ». Selon le compte rendu publié, mardi, par la sixième flotte américaine sur sa page Twitter, cette réunion a été l'occasion de réaffirmer l'engagement des deux pays à raffermir leur partenariat « dans la région du Sud de la Méditerranée et de l'Atlantique Est ». Les participants ont examiné les capacités de la flotte marocaine en visitant des navires tels que « Moulay Ismail », une frégate multifonctions de classe Sigma, qui s'ajoute à « Allal Benabdellah » et « Tarik Ibn Ziyad ». Ces derniers renforcent la flotte des six frégates dont dispose la Marine Royale, toutes acquises entre 2002 et 2014. Les frégates SIGMA par exemple sont caractérisées par leur capacité à mener des missions de combat anti-littoral et sont équipées de matériel sophistiqué avec des radars, des canons « Otobreda 76 mm « et des missiles sol-air d'autodéfense « Mistral » et antinavire Exocet. Atlas Handshake : le test de la Frégate « Allal Benabdellah » L'exercice Atals Handshake, tenu les 18 et 19 mai dernier, au large d'Agadir et Tan Tan, a été l'occasion d'expérimenter les capacités manoeuvrières de la frégate « Allal Benabdellah » qui a été déployée aux côtés du destroyer américain "USS Roosevelt". Les détails de cet exercice, précédant African Lion d'un mois, ont été divulgués dans le numéro 409 de la Revue des FAR. Les deux bâtiments ont mené une série de manoeuvres conventionnelles, incluant des procédures opérationnelles et tactiques, notamment l'exécution de tirs réels d'artillerie navale contre des objectifs flottants et terrestres, ainsi que les actions combinées de lutte anti-sous-marine (ASW) et antisurface (ASUW). Parmi les avantages d'un tel exercice, l'entraînement des équipages aux opérations de tirs et surtout l'évaluation de la performance des armes à bord. En somme, l'exercice est qualifié de succès par le Commandant de la Frégate "Allal Ben Abdellah", Capitaine de Vaisseau Hicham Terfas. La Marine Royale apprend à lutter contre les sous-marins La particularité de cet exercice reste sa composante liée à la lutte sous-marine. Il a été procédé à des simulations d'attaques coordonnées contre une cible fictive, mobile aux allures d'un sous-marin. Cette opération a été faite par la cellule de lutte sous-marine à bord de la frégate qui a pu, à cette occasion, raffermir sa capacité opérationnelle pour mieux détecter les échos sous-marins et intervenir plus efficacement dans un milieu opaque. En évoquant cet exercice, la Revue des FAR fait état de « montée en puissance de la frégate ». Anass MACHLOUKH Trois questions à Hicham El-Hafidi « La modernisation de la Marine Royale traduit une volonté de mieux s'approprier l'espace maritime national »
Hicham El-Hafidi, ex officier et expert dans les questions de défense, a répondu à nos questions sur les enjeux de modernisation de la Marine Royale. - Le Maroc a modernisé ces dernières années sa marine, comment jugez-vous l'état actuel de la Marine Royale ? - La Marine Royale suit sa logique propre. Elle est parfaitement outillée pour accomplir les missions qui lui sont dévolues par le Haut commandement, notamment en matière de renseignement, de surveillance, de protection et d'intervention. Mais il est intéressant de noter la montée en puissance de la composante maritime des FAR à travers l'acquisition de nouveaux bâtiments et la construction de nouvelles bases sur la façade atlantique et méditerranéenne. Cela traduit incontestablement une volonté de mieux s'approprier l'espace maritime, à mesure que le statut du Maroc en tant que puissance régionale se confirme. - La délimitation des frontières maritimes va-t-elle stimuler davantage cet effort de modernisation ? - La délimitation des frontières maritimes nationales appelle à mobiliser des ressources supplémentaires pour garantir la souveraineté marocaine sur l'ensemble de la zone économique exclusive et éventuellement sur le plateau continental qui la prolonge. De même, l'initiative marocaine de constituer une Alliance atlantique africaine suggère une vision à long terme de se projeter de manière plus prononcée dans l'Atlantique plutôt que dans la Méditerranée. En comptant sur la mutualisation des efforts, cette Alliance est de nature à permettre la structuration d'un large espace géopolitique qui recèle d'importants enjeux qui devront être adressés par la Marine Royale, de concert avec ses partenaires africains. - Quelle est la plus-value que l'Armée américaine peut donner aux Forces Armées Royales en matière de doctrine et stratégie militaire ? - L'apport que l'Armée américaine peut donner aux Forces Armées Royales n'est pas à chercher au niveau de la doctrine militaire. Les exercices combinés entre les forces armées américaines et marocaines constituent une opportunité pour améliorer la capacité des cadres des FAR à planifier des opérations militaires interarmées, ainsi que leur aptitude à la conduite de ces opérations en combinant l'action des unités engagées pour obtenir l'effet recherché. De même, au niveau subalterne, ces exercices constituent l'occasion de jauger le degré de préparation opérationnelle des unités, ce que les américains appellent le « Combat Readiness », et aussi la possibilité pour les militaires d'acquérir les automatismes nécessaires pour l'accomplissement de leurs missions à travers le drill dans des conditions réalistes. Recueillis par A. MACHLOUKH