Le gouvernement entend mettre de l'ordre dans la gestion des zones industrielles, afin d'attirer plus d'investissements. Quant aux zones d'accélération industrielle, le contexte actuel les favorise, à condition de donner une meilleure visibilité à la destination Maroc. Un plan national de zones industrielles et un régime général de gestion des zones industrielles : voilà les deux principales grandes nouveautés à prévoir dans le domaine de l'industrie. Ces chantiers seront enclenchés une fois la loi 102.21 adoptée par le Parlement. Pour sa part, le gouvernement a validé la copie présentée par le ministre de l'Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour. En plus de ces futures feuilles de route pour les zones industrielles, l'objectif de cette prochaine loi est, de façon globale, de mettre de l'ordre dans ces zones, en plus d'attirer plus d'investisseurs. Les dispositions réglementaires de cette loi ne concernent pas les zones franches d'exportation, régies, elles, par la loi n° 19.94 relative aux zones d'accélération industrielle. Gestion Dans les zones concernées, il est, par exemple, prévu de solutionner les « différentes problématiques liées au manque d'une réelle valorisation et l'incapacité en matière de gestion de certaines zones industrielles, à travers la mise en place d'un cadre juridique ». Pour ce qui est de l'investissement, le département de Ryad Mezzour entend l'encourager « grâce à la mobilisation du foncier aménagé et le renforcement de l'arsenal juridique lié à l'aménagement, la gestion et la valorisation des zones industrielles dans le but d'améliorer leur qualité et lutter contre la spéculation immobilière ». Promotion... compétitivité Pour le gouvernement, l'objectif est double : attirer à la fois les investisseurs nationaux et étrangers, pour renforcer la compétitivité du Royaume. « A l'heure actuelle, il faut reconnaître que l'essentiel a été fait sur les plans fiscal et physique au niveau des zones industrielles et des plateformes d'accélération industrielle. Il reste désormais à mieux tirer profit du contexte actuel en faisant davantage de promotion, pour attirer plus d'investisseurs », constate le fiscaliste et économiste Mohamed Rahj. Un exercice que tente de mener l'Agence marocaine de développement des investissements et des exportations (AMDIE), à travers son dispositif de branding « Morocco Now ». Spécialisation Mais pour en revenir aux zones industrielles, la réussite des zones franches tangéroises dédiées à l'écosystème automobile devrait, selon certains acteurs économiques, inspirer afin de mieux encourager l'émergence d'autres cadres spécialisés, le tout, dans une stratégie de captation des relocalisations actuelles. « Ce que nous avons réussi avec l'automobile c'est bien, mais nous pouvons aller encore plus loin en nous positionnant sur des secteurs qui seront incontournables dans le contexte de bras de fer entre Occidentaux et Russes », souffle pour sa part un analyste économique. Dans le Nord du Maroc par exemple, avec la fermeture de Sebta et Mellilia, de nouvelles zones d'activités économiques et industrielles spécialisées dans divers secteurs commencent à pousser. C'est notamment le cas à Tétouan, ou encore la ville mitoyenne de Sebta, Fnideq. Ce qui viendra renforcer le nombre de zones industrielles répertoriées au Maroc. 2.100 hectares aménagés Selon les indicateurs du gouvernement, le Royaume dispose actuellement de 2.100 hectares aménagés ou en cours d'aménagement en tant que zones industrielles. L'objectif est de porter le foncier industriel à 13.000 ha durant les 6 prochaines années. Le ministère de l'Industrie travaille actuellement sur 136 zones industrielles à l'échelle nationale. Avec l'adoption du projet de loi 102.20, le gouvernement entend prendre en considération des aspects qui semblent aujourd'hui ralentir certaines de ses ambitions en matière de développement des zones industrielles. C'est pour cela qu'il sera notamment question de la mise à disposition de l'aménageur et des investisseurs des mécanismes qui leur garantissent une gestion durable et efficace de ces zones. Abdellah MOUTAWAKIL Repères Régime des zones franches : rien que pour l'export ! Selon la loi 19.94, on entend par zones franches d'exportation des espaces déterminés du territoire douanier où les activités industrielles et de services qui y sont liées sont sous-traitées. Elles sont destinées à l'export. Ces activités bénéficient, en outre, en ce qui concerne les bénéfices et revenus qu'elles génèrent, d'avantages fiscaux. En cas de suspension éventuelle du régime, les entreprises qui en bénéficient disposeront d'un préavis d'une durée de 20 ans courant à compter de la date de suspension du régime.
Zones franches : l'automobile montre la voie Toujours selon les dispositions de la loi 19.94, les zones franches d'exportation sont créées et délimitées par un acte réglementaire qui fixe la nature des activités des entreprises pouvant s'y installer. Ainsi, peuvent être autorisées dans les zones franches d'exportation toutes activités exportatrices à caractère industriel ou commercial ainsi que les activités de service qui y sont liées. C'est le cas par exemple de Tanger Med Zones (TMZ). Elle comprend 5 zones d'activités, à savoir Tanger Free Zones (TFZ), Tanger Automative City, Tétouan Shore, Tétouan Park, et une zone dédiée au retail et aux services. L'info...Graphie Zones industrielles Plan et régime général de gestion
Le projet de loi n° 102.21 relatif aux zones industrielles prévoit l'élaboration d'un plan national de zones industrielles considéré comme un document de référence. Ce document est appelé à définir « la politique générale et les orientations stratégiques dans le domaine des infrastructures industrielles ». Il est également question de veiller à la mise en place d'un système de création, de développement et de commercialisation des zones industrielles définissant les exigences, les normes et les spécifications techniques liées à la préparation, le développement et la commercialisation desdites zones. Pour le ministère de l'Industrie et du Commerce, il est aussi prévu la mise en place d'un régime général de gestion des zones industrielles. Selon le gouvernement, ce régime devra préciser les exigences et les règles à respecter par l'organisme gestionnaire ou l'aménageur pour la gestion de ces zones. L'ensemble de ces dispositifs sera enrichi lors de l'adoption de la loi au Parlement.
Zones industrielles L'exemple du Nord du Maroc
La région Tanger-Tétouan-Al Hoceima est un modèle de réussite en matière de zones industrielles. Elle vient récemment de lancer les activités de Zone d'activités économiques d'Assilah. Ce nouveau pôle d'Assilah vient enrichir le maillage en zones industrielles (ZI) et en zones d'activités économiques (ZAE) de la région du Nord. A Tétouan, un projet de ZAE est sur les starting-blocks. Avec une surface de 5 hectares, il devrait coûter un investissement de 126 MDH, et se déclinera sur plusieurs lots, compris entre 200 et 1000 m2. A quelques encablures de Tétouan, une autre ZAE a, elle, déjà émergé à Fnideq depuis quelques mois. 53 commerçants ont d'ores et déjà été sélectionnés pour exercer depuis février dernier. Située à quelques encablures de Sebta, elle est appelée à jouer un rôle de contre-poids et d'autonomiser les commerçants locaux, face aux flots de la contrebande en provenance de la ville voisine de Sebta. Lors du dernier Conseil d'administration du Centre Régional d'Investissement (CRI) de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima, il a été acté la création de 14 nouvelles zones industrielles de 630 hectares à travers la région. Soit un budget de 2,7 MMDH, avec pour objectif de créer quelque 88.000 emplois. La Commission régionale unifiée de l'investissement (CRUI) a tenu 91 réunions l'année dernière, au cours desquelles 307 projets ont été approuvés, avec une augmentation du volume d'activité de 75% par rapport à 2020. L'investissement réalisé dans ces projets en 2021 s'est élevé à 35 MMDH, soit une augmentation de 120% par rapport à l'investissement réalisé un an auparavant.
3 questions à Mohamed Rahj « Sur le plan fiscal, on ne peut pas faire mieux pour les zones franches »
Pour le fiscaliste Mohamed Rahj, les zones franches d'exportations offrent tout ce qu'il faut pour être fiscalement attractives. En outre, ajoute-t-il, le royaume dispose d'atouts considérables, comme la disponibilité d'une main-d'oeuvre compétitive et d'un encadrement capable de répondre aux attentes des investisseurs. Par conséquent, insiste-t-il, il faut jouer sur la promotion. - Comment rendre nos zones franches encore plus compétitives dans le contexte actuel ? - Nous avons aménagé un ensemble de zones franches. A l'heure actuelle, il faut reconnaître que l'essentiel a été fait sur le plan fiscal et physique au niveau des zones industrielles et des plateformes d'accélération industrielle. Il reste désormais à mieux tirer profit du contexte actuel en faisant davantage de promotion pour attirer plus d'investisseurs. La crise en Ukraine nous ramène dans une ère de confrontation. Je pense que nous devons en profiter pour montrer que le Maroc est une destination compétitive pour les relocalisations. Nous l'observons déjà dans le secteur automobile, mais on peut faire mieux dans d'autres secteurs. - Donc, sur le plan des incitations fiscales, les marges de progression sont-elles épuisées ? - Pour la partie fiscale, on peut presque dire que les sociétés implantées dans les zones franches évoluent dans des paradis fiscaux. Je ne pense pas que l'on puisse faire mieux. Au-delà de 200 MDH d'investissements, les sociétés peuvent même négocier leurs avantages fiscaux avec l'Etat, en vertu de la loi. Donc, c'est dire à quel point il est avantageux d'investir dans les zones franches au Maroc. Comme je l'ai dit plus haut, il faut vraiment agir sur la réussite de la promotion de la destination Maroc sur le plan de l'investissement. Le Royaume dispose d'atouts de qualité, notamment en termes de main-d'oeuvre et d'encadrement. - De quoi les autres zones industrielles ont-elles besoin pour gagner elles aussi en compétitivité ? - Contrairement aux zones franches d'exportation, les autres zones industrielles s'adressent aux consommateurs nationaux. Cela dit, elles ont également besoin d'avantages pour être plus compétitives et attirer plus d'investisseurs. Dans ce contexte, la concrétisation de la loi sur leur gestion serait une très bonne chose. Cela rendrait leur fonctionnement mieux organisé. Recueillis par A. M.