En ce début d'été, le Covid-19 fait un retour en force partout dans le monde. Le Maroc n'échappe pas à la règle, mais sa situation reste maîtrisée ...pour le moment ! Il se pourrait bien que ce soit l'invité surprise de cette saison estivale. Le Covid-19 et ses multiples variants font leur grand retour, ramenant avec eux leurs lots d'angoisse et d'incertitude. En Europe et en Asie, les contaminations reprennent de manière alarmante. Si dans des pays proches, tels que la France ou l'Espagne, les nouveaux cas sont comptabilisés par milliers, mais sans danger sur le système de Santé, d'autres pays comme le Japon enchaînent les records en matière de nouvelles contaminations, retardant davantage le très attendu retour à la vie «normale». Avec un corps médical à bout de souffle et des hôpitaux toujours sous pression, Tokyo se retrouve donc obligée d'orchestrer une reprise très progressive pour ne pas braquer une population toujours inquiète. Une inquiétude qui trouve place également en Allemagne, en Italie ou encore en Suisse, où les indicateurs vont dans le mauvais sens. Au Maroc, la situation épidémiologique n'est pas encore dans le rouge, néanmoins, le taux de positivité augmente progressivement pour la cinquième semaine consécutive. Après une période intermédiaire, de trois mois, caractérisée par une circulation communautaire faible à très faible du virus depuis la première semaine de mars 2022, «la propagation du virus est passée du niveau vert (faible) au niveau orange (moyen)», selon les autorités sanitaires. Un rebond qui trouve racine dans plusieurs facteurs, dont on citera, et non des moindres, la levée de presque toutes les mesures sanitaires, au moment où le baromètre Covid est passé au code vert. Les gens se réunissent davantage, partent aux festivals, remplissent les stades et ne sont que trop heureux de tomber les masques.
Le nombre d'hospitalisations et de décès devrait rester relativement faible ». A cela s'ajoute le mutant Omicron qui est toujours en circulation avec le sous-mutant BA.2, sans oublier le début de propagation du sous-mutant BA.5, ainsi que de faibles pourcentages d'autres sous-mutants. Enfin, il y a une possible diminution de l'immunité due au manque d'adhésion à la booster. «L'immunité acquise par les anciennes infections ou par la vaccination - surtout incomplète - s'érode avec le temps», explique Tayeb Hamdi, chercheur en politiques et systèmes de santé, ajoutant que si cette immunité post-maladie ou post-vaccinale persiste et renforce l'immunité populationnelle contre les formes graves, elle est de moins en moins efficace contre les infections et les réinfections. Le Maroc entre le marteau et l'enclume ! Malgré ce rebond épidémiologique, le nombre de cas critiques reste faible, selon le dernier bilan dressé par le coordonnateur du Centre national des opérations d'urgence de santé publique au ministère de la Santé et de la Protection sociale, Mouad Mrabet, qui note que la situation «n'est plus aussi confortable qu'auparavant». C'est ainsi que la tutelle a appelé les citoyens à reprendre le port du masque dans les lieux fermés ou à forte fréquentation. Une annonce choquante vu les avancées réalisées par le Royaume ces derniers mois, mais qui reste nécessaire selon Moulay Saïd Afif, membre du Comité national technique et scientifique consultatif de vaccination, qui souligne qu'il y a de quoi s'inquiéter. Une position partagée par Tayeb Hamdi, qui affirme que la vaccination et la vigilance sont les meilleurs alliés, aujourd'hui et demain, contre la hausse légère de nouveaux cas du Covid-19. Toutefois, le nombre d'hospitalisations et de décès devrait rester relativement faible dans l'ensemble, grâce à la protection assurée par la vaccination, les médicaments et les infections antérieures. Cela devrait également être le cas pour d'éventuels futurs variants du virus, notent les différents experts. «Aujourd'hui, les autorités sanitaires sont dans une situation délicate, car il faut à la fois préserver la situation épidémiologique et laisser la reprise se poursuivre sans interruption, surtout que des secteurs comme le tourisme commencent à peine à respirer», plaide Saïd Afif, qui estime qu'il ne faut surtout pas restreindre les mouvements de la population, car l'impact psychologique des restrictions est beaucoup plus important que les effets épidémiologiques. Cela dit, les virologues sont sur leurs gardes. Pour eux, les espaces fermés, non aérés, sont propices pour la propagation du virus, il faut donc revenir à la règle qui s'est montrée efficace jusque-là : aérer les espaces clos, les éviter au maximum ou s'y masquer dans l'incapacité de ce faire, essayer d'y passer le minimum de temps possible. Car oui, nous ne pouvons pas encore parler d'une nouvelle vague, mais elle n'est pas du tout exclue ! Saâd JAFRI 3 questions à Moulay Saïd Afif « Il y a de quoi s'inquiéter » !
Nous avons contacté Moulay Saïd Afif, membre du Comité scientifique et technique de la vaccination anti-Covid-19, pour nous expliquer la hausse des contaminations au Maroc.
- Le Maroc connaît une remontée des cas Covid-19. Quels sont les facteurs qui expliquent cette hausse ? - Nous constatons que les gens négligent toujours les gestes barrières et le port du masque, sachant que nous faisons face à un sous-variant d'Omicron BA.5 qui est en passe de devenir dominant quelques jours seulement après sa détection au Maroc. Il est donc tout à fait normal d'enregistrer une hausse des cas Covid, mais heureusement que ce dernier est moins virulent et moins mortel. Avec le non-respect des mesures barrières dans les mosquées durant le mois du Ramadan, la mobilité massive des personnes durant Aïd El Fitr, sans oublier l'afflux massif des supporters vers les stades, nous aurions pu enregistrer un rebond de contaminations encore plus important. Or, grâce aux effets de la vaccination, les dégâts étaient maîtrisés. La situation reste donc stable, malgré la hausse des nouveaux cas, puisque le taux de remplissage des services de réanimation n'atteigne pas le 1%. Toutefois, la vigilance est de mise, puisqu'on est passé d'un taux de positivité de 1% à 13%. Il faut donc accroître la vigilance. - Peut-on parler d'une nouvelle vague épidémiologique ? - Pour l'instant, nous ne sommes pas encore au stade de vague épidémiologique. Nous devrons voir l'évolution épidémiologique des prochaines semaines, surtout avec Aïd Al Adha qui approche et qui est caractérisé par une forte mobilité des citoyens. Cela dit, il y a de quoi s'inquiéter, parce qu'on assiste à une augmentation de cas en réanimation. Dans une semaine, nous sommes passés de 18 à 30 personnes en réanimation. Des chiffres faibles pour le moment, mais qui restent significatifs. - Faut-il vraiment renouer avec le port obligatoire du masque, sachant que nous sommes à plus de 23 millions de personnes vaccinées à la deuxième dose et 6 millions complètement vaccinées ? - Le port du masque dans les espaces clos est obligatoire, car ils sont favorables à la propagation rapide du virus. Il faut aussi plus d'adhésion à la troisième dose, en particulier des personnes âgées et celles qui souffrent de maladies chroniques. Les chiffres inquiètent. Quelque 300.000 personnes âgées de plus de 75 ans et plus d'un million de personnes âgées entre 65 et 75 ans n'ont pas reçu la booster. Il faut donc continuer à se faire vacciner pour être dans la même situation que certains pays comme la France, où des milliers de personnes sont touchées par le virus, mais très peu sont admises en réanimation. Ainsi, l'Etat ne se retrouvera pas obligé de durcir à nouveau les mesures sanitaires, surtout à l'approche de la saison estivale. Recueillis par S. J.
L'info en chiffres Un bilan qui frôle le rouge !
Après trois mois caractérisés par une circulation communautaire faible à très faible du Covid-19, le taux de positivité des analyses a progressivement augmenté pour la quatrième semaine consécutive, passant de 0,6% à 5% la semaine dernière, alors que l'indice de reproduction des cas s'est établi à 1,19. Les nouveaux cas dangereux et critiques admis dans les services de réanimation n'ont cependant pas connu d'évolution significative, le nombre ne dépassant pas les 20 nouveaux cas par semaine, soit moins de 1 pour 100.000 personnes. Le nombre de décès est, par ailleurs, toujours stable à un niveau bas, avec un total de 10 décès enregistrés au cours des quatre semaines allant du 11 mai au 7 juin. S'agissant de la campagne de vaccination, le taux de couverture de la dose de rappel a atteint 17,6%, avec un taux de continuité à 27,6%. Le ministère exhorte ainsi les personnes vulnérables à recevoir la dose de rappel pour augmenter leur niveau d'immunité, appelant aussi les citoyens à reprendre le port du masque dans les lieux fermés ou à forte fréquentation. De plus, les personnes qui présentent des symptômes respiratoires sont appelées à cesser toute activité professionnelle ou sociale et à se rendre aux établissements de santé pour diagnostic et traitement approprié.
Conseil de gouvernement
Des déclarations qui inquiètent
A l'issue du dernier Conseil de gouvernement, le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, a tiré la sonnette d'alarme quant à la situation épidémiologique. «Le gouvernement constate en effet une hausse des cas de Covid-19. Nous sommes passés d'une situation confortable à une autre qui n'est pas rassurante», a prévenu le ministre en réponse à une question lors du point de presse. Tout en réitérant les éléments de langage des autorités sanitaires sur le port du masque, Baitas a noté que le gouvernement suivra de près ce dossier à la lumière de la situation actuelle, caractérisée par l'arrivée de l'été et le retour des Marocains du monde. «Espérons que le gouvernement ne sera pas dans l'obligation de prendre des mesures non souhaitables» a-t-il déclaré, suscitant une vague de commentaires sur les réseaux sociaux, surtout avec l'approche de l'Aïd Al-Adha, où il est devenu de coutume pour le gouvernement de jouer la carte «prudence» en vue d'éviter le scénario cauchemardesque de la fête 2020, qui a connu une flambée sans précédent des cas de contamination. Cela dit, s'agissant des Marocains du monde attendus dans le cadre de l'opération Marhaba 2022, un dispositif sanitaire est mis en place par le ministère de la Santé pour éviter tout scénario catastrophique. Un système de surveillance qui servira également et surtout à faire face à la variole du singe (Monkeypox) et prévenir sa propagation.