Le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) alerte, dans son rapport thématique sur « l'effectivité du droit à la santé » présenté vendredi à Rabat, sur le manque flagrant des professionnels de la santé. En effet, le Maroc fait face depuis plusieurs années à une pénurie de professionnels de santé, mise en évidence par la pandémie de la Covid-19. S'appuyant sur les normes de l'Organisation mondiale de la santé, le Conseil national des droits de l'Homme a signalé que le déficit en nombre de cadres de santé s'estime à plus de 32.000 médecins, 23.000 étant seulement en exercice. Le Maroc a également besoin de plus de 65.000 professionnels de la santé (infirmiers, techniciens...), estime le Conseil. «Malgré les efforts consentis, l'Etat n'est toujours pas en mesure de garantir la sécurité sanitaire aux citoyens, dans toutes ses dimensions économiques, sociales, environnementales et culturelles, que ce soit en termes d'accès aux services de santé ou d'élaboration d'une stratégie sanitaire qui réponde aux besoins nationaux». Telle est la principale conclusion du rapport «Effectivité du droit à la santé : défis, enjeux et voies de renforcement», rendu public vendredi dernier par le CNDH. Réalisé suite à plusieurs réunions de concertation menées dans six régions, ce document expose les différents dysfonctionnements et contraintes entravant le droit d'accès à la santé. Il cite, à ce titre, l'absence d'un parcours de soin coordonné (PSC) ainsi qu'une gestion inadéquate des ressources humaines.
Les médecins du public concentrés dans la région de Casablanca-Settat Le rapport signale également que la répartition par région montre que les professionnels de santé sont concentrés essentiellement dans la région de Casablanca-Settat où leur nombre se chiffre à 2.990. Viennent ensuite les régions de Fès-Meknès (1.749), Rabat-Salé-Kénitra (1.688), Marrakech-Safi (1.658), l'Oriental (1.048) et Tanger-Tétouan-Al Hoceima (870). En revanche, les médecins sont moins présents dans les régions de Souss-Massa (584), Beni Mellal-Khénifra (575), Drâa-Tafilalet (395), Guelmim-Oued Noun (216), Laâyoune-Sakia El Hamra (181) et Dakhla-Oued Eddahab (80).
Par ailleurs, les professionnels paramédicaux sont regroupés essentiellement dans quatre régions, à savoir Rabat-Salé-Kénitra (4.962), Casablanca-Settat (4.862), Fès-Meknès (4.390) et Marrakech-Safi (4.080). Le Conseil ajoute qu'en raison de cette répartition inégale, de nombreux citoyens n'ont pas accès aux soins, ce qui contribue au phénomène d'abandon des services de santé.
Un besoin croissant Le CNDH a alerté, en outre, que ces besoins en cadres humains vont sans doute augmenter rapidement en raison de la généralisation de la couverture sanitaire, de la croissance démographique, du vieillissement de la société et de la propagation des maladies chroniques et de longue durée.
Le même rapport fait le point sur l'hémorragie de l'émigration des médecins et des cadres de santé. Les statistiques estiment que par rapport aux 23.000 médecins marocains exerçant au Maroc, il y a entre 10 et 14 mille qui exercent à l'étranger, notamment en Europe.
L'urgence de la formation Le CNDH estime qu'aujourd'hui le Maroc a le besoin urgent de former un grand nombre de médecins et de professionnels de santé annuellement, notant que le projet de formation de 3.300 médecins par an, qui a été approuvé par le gouvernement en 2007 à l'horizon de 2020, n'a pas atteint son objectif. En effet, en 2019 et 2020 le nombre de médecins formés oscillait entre 2.100 et 2.200 seulement, dont plus de 600 à 700 ont migré à l'étranger.