Il y a moins de 6 mois, un vent d'optimisme soufflait sur le Royaume, 2022 était censée être l'année de la reprise économique tous azimuts avec des perspectives de croissance variant entre 3 et 6%, une perception qui paraît bien loin aujourd'hui. Preuve en est les dernières prévisions de croissance de Bank Al-Maghrib qui ont vu les projections d'inflation passer de 1,8% à 4,7% en l'espace de 3 mois, idem pour les prévisions de croissance qui ont fondu de 2,9% à 0,7% lors de la même période, ou encore le déficit qui devrait davantage se creuser pour atteindre les 6,3% contre les 5,9% prévus en début d'année. « Nous vivons une situation inédite, où les prévisions sont entourées d'incertitudes à un niveau encore plus élevé que celui de la pandémie », a signifié Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib, lors du traditionnel point de presse qui suit le Conseil de BAM. Ce dernier n'a pas exclu un nouveau changement dans les projections de la Banque centrale vu la volatilité de la conjoncture. Pour l'heure, tous les scénarios restent ouverts, l'exercice en cours s'annonce périlleux et dépend de l'évolution de la situation en Ukraine comme des précipitations. Là où un retour des pluies pourrait sauver la campagne agricole et par ricochet soutenir la croissance, l'adoption de nouvelles sanctions à l'encontre de la Russie, notamment un embargo généralisé sur les produits énergétiques, pourrait aggraver encore plus la situation. Bien que les bénéfices record de l'OCP et les financements innovants devraient permettre d'équilibrer les budgets de l'Etat et assurer le financement de la Caisse de Compensation et des mesures de soutien sectorielles (tourisme et transport), il est fort probable que l'Exécutif se retrouve obligé de renégocier une nouvelle Ligne de précaution de liquidité. Plus que de soutenir la croissance, l'objectif principal du Royaume pour cet exercice sera de sauvegarder sa souveraineté et éviter de se retrouver dans les « griffes du FMI et autres bailleurs de fonds internationaux ». Une évolution négative de la conjoncture pourrait, par ailleurs, pousser l'Exécutif à faire, en guise de damage control, des sacrifices, notamment en ayant recours à la privatisation d'assets publics en position de faiblesse, ce qui en temps de guerre économique généralisée signifierait une perte considérable de souveraineté et serait préjudiciable à l'économie nationale à long terme. Amine ATER