On sort un brin sonné de la projection de «Zanka Contact/Burning Casablanca», premier long métrage d'Ismaël El Iraki. On est emporté par un punch dévastateur et refroidi par l'inspiration trop soulignée de quelques pépites qui font grandir cinématographiquement le jeune réalisateur. A la louche : «Reservoir Dogs», «Sailor et Lula», «True Romance», Quentin Tarantino, David Lynch, Tony Scott... et une cuillerée de western spaghetti. On a envie d'enchaîner sur de sérieuses lenteurs et une mise en bouche douloureuse, une attaque hachée. Et puis, ça s'illumine avec l'apparition de Rajae (Khanssa Batma) en fille de joie touchante, éraflée par la vie. Cette baston de rue commence par un contact inopiné entre la prostituée et un rocker déchu et drogué, Larsen Snake (le poignant Ahmed Hammoud), un accident de la circulation. Le film, brut et brutal, renferme une romance faite de peurs, d'hésitations, de fuites et de... musique -un rock lourd bienvenu et rafraîchissant, notamment celui des Berlinois Kadavar qu'on voit dans l'une des scènes du film. Il nous le fallait ce «Zanka Contact», un film mené avec coeur, une fiction mêlant violence et compassion, une lecture mesurée des bas-fonds d'une ville, Casablanca, submergée d'une haine surmontable. En 2003, le cinéaste Mohamed Asli nous disait qu'«A Casablanca les anges ne volent pas». Ici, ils volent avec fureur. Un film troublant de sincérité mettant en scène le majestueux Saïd Bey, un monstre parmi les monstres. Les autres acteurs sont loin de démériter. Un casting époustouflant pour une oeuvre largement traversée par la grâce. Anis HAJJAM