Le groupe istiqlalien « Pour l'Unité et l'Egalitarisme » à la Chambre des Représentants a organisé, mardi, une réunion d'étude sur le projet de loi relatif aux usages légaux du cannabis. Détails. Présidée par le Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal, Nizar Bakara, et le président du groupe istiqlalien, Noureddine Moudian, cette réunion s'inscrit dans le cadre de l'ouverture du groupe sur les événements extérieurs et concrétise son approche participative dans tout ce qui touche aux textes législatifs de grande importance, dans leurs dimensions économique, sociale, politique, juridique et environnementale. Différentes réalités à affronter La réunion d'étude a été encadrée par un groupe d'experts, de chercheurs, en vue d'approfondir la discussion sur ce projet, considéré comme un levier fondamental de développement économique et un pilier majeur du développement humain et durable pour les habitants des régions concernées. « L'organisation de cette rencontre vise à expliquer nos positions initiales sur ce projet et à rappeler les propositions de lois que l'équipe a préalablement soumises à cet égard. Il s'agit de la proposition de loi relative à la plantation, à la transformation et à la commercialisation du cannabis en 2013 et à la proposition de loi relative à une amnistie générale des condamnés et des poursuivis dans des délits liés à la plantation du kif en 2014 », souligne le chef du parti, Nizar Baraka. Il a souligné que cette rencontre vise également à se préparer pour l'avenir et à proposer des solutions aux problèmes présentés. « Le contexte dans lequel intervient ce projet nous oblige à exprimer les constats et faits suivants : la culture du chanvre à l'heure actuelle ne profite pas aux petits agriculteurs et aux habitants de ces régions. De même, ces régions souffrent des taux les plus élevés de pauvreté, de chômage et de graves inégalités », devait déclarer Nizar Baraka lors de cette rencontre. En effet, il s'agit de vrais problèmes, qui mettent à nu les différentes fragilités sociales dont souffrent ces régions. Importance de l'implication de toutes les parties concernées
A cette occasion, le Secrétaire Général du parti a appelé à l'ouverture d'un dialogue national dans les régions concernées par la culture du cannabis, pour expliquer le contenu de cette loi, en extraire les mesures d'accompagnement nécessaires à son succès, assurer l'implication des petits agriculteurs, et rechercher toutes les initiatives susceptibles de créer une atmosphère de confiance et de réconfort parmi les habitants de ces régions. Nizar Baraka a noté que le Parti de l'Istiqlal, à travers son groupe parlementaire, compte sur les résultats de cette réunion pour cristalliser les amendements nécessaires afin d'assurer l'amélioration de ce projet de loi, qui permettrait d'équilibrer le texte et de répondre aux questions soulevées, dissiper les préoccupations exprimées par les agriculteurs et élever le projet au niveau des aspirations et des attentes des habitants des régions concernées par cette culture. L'objectif est d'œuvrer pour le développement social et économique souhaité et l'appropriation collective de cette importante réforme juridique. Dans ce sillage, il a également souligné la nécessité de définir équitablement les domaines qui définiront cette culture de manière juste et équitable, d'amnistier les agriculteurs qui s'engageront au moins dans ce processus, et de réguler l'industrie liée au cannabis à des fins médicales et industrielles dans les zones concernées par la culture de cette plante. Le projet de loi sur la légalisation de l'usage légal du cannabis représente une étape sans précédent pour le Royaume. Elle vient poser les bases d'une industrie appelée à se hisser en locomotive économique du pays. Un secteur à forte valeur ajoutée dont les modes de production devront répondre à un cahier de charges exhaustif qui englobe une composante répressive non négligeable vu les spécificités de l'activité. En plus de cela, le trafic illégal du cannabis produit au Maroc nourrit un trafic international important, mobilisant des ressources humaines et financières importantes contre ses organisations criminelles et le blanchiment d'argent, sans pour autant que les saisies et les arrestations réduisent ce trafic. Le Maroc a plusieurs années de retard à rattraper pour se mettre au niveau des grands groupes de cannabis nord-américains et européens. 3 questions à Driss Benhima « Ce projet de loi est un geste de réconciliation et de solidarité avec les populations du Nord qui doivent saisir cette occasion » Driss Benhima, ancien ministre, ex-wali de la région du Grand Casablanca, ex-DG de la RAM et de l'ONEE, partage avec nous ses réflexions sur la légalisation du cannabis à usage médical. - Quelles sont les principales conclusions tirées de cette réunion d'étude ? - Trois principaux avantages sont présentés par le projet de loi. Sur le plan médical d'abord, il dote la médecine marocaine d'une multitude de produits pour lesquels nous découvrons tous les jours de nouvelles applications. Il s'agit d'un retour à la pharmacopée arabo-musulmane traditionnelle, qui a toujours inscrit le cannabis dans sa liste de médicaments. Le deuxième point est l'aspect économique, où le marché du cannabis à usage médical et industriel est encore petit mais grandit très vite. Le Maroc dispose des atouts traditionnels dans la culture de cette plante et doit se positionner dans ce marché sans tarder, parce que plus on tarde et plus de concurrents peuvent apparaître. Ce serait dommage de les laisser prendre la place que nous méritons. Le troisième point est qu'il s'agit d'une opportunité historique d'activité génératrice de revenu pour les zones montagneuses du Nord. Trois avantages sont attendus sur ce plan. D'abord une augmentation des revenus par rapport à la culture de la plante pour des usages illicites, parce que le marché légal permet d'avoir des revenus bien plus importants. Il sera possible d'appliquer les principes de la culture durable et améliorer la protection du milieu naturel dans les montagnes du Nord. Il est important que la culture du Nord s'inscrive dans le cadre du développement durable. Le troisième avantage est d'ordre local, car un nouveau climat de confiance va pouvoir s'instaurer entre les populations et l'ensemble de la société marocaine et ses institutions. - Pourquoi est-il nécessaire de trouver une solution d'urgence à la question de culture du cannabis ? - Trouver une solution au plus vite s'impose du fait que les tendances du marché vont contre les intérêts des agriculteurs, le marché n'est pas porteur et les prix baissent. De même, les produits sont de plus en plus menaçants pour l'environnement. Si nous n'agissons pas tout de suite, nous risquons de perdre nos avantages vis-à-vis des autres concurrents de ce marché qui est en train de se développer dans le monde. - Que représente ce projet de loi pour les populations du Nord ? - Il faut beaucoup insister sur le fait que ce projet de loi est un geste de réconciliation et de solidarité avec les populations du Nord qui doivent saisir cette occasion et s'intégrer dans ce projet malgré ses difficultés et les lenteurs qu'il risque de connaître.