Prévu ce lundi et demain mardi, le Sommet G5 Sahel est appelé à jeter de nouvelles bases dans la lutte contre le terrorisme, le renforcement de la coopération entre les cinq pays sahéliens (la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad (le pays hôte). Le président français ne sera pas présent, il assistera par visioconférence au huis clos des chefs d'Etat, fermeture des frontières oblige. N'Djamena accueille ce lundi et mardi le Sommet du G5 Sahel, regroupant la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad (le pays hôte) avec la participation des partenaires internationaux. Il intervient dans un contexte particulier au-delà de la crise sanitaire, liée à Coronavirus. En effet, engagée dans la lutte contre le terrorisme et forte de plus 5000 hommes, la force Barkhane fait face, ces derniers temps, à de vives critiques des populations notamment au Mali, où les attaques jihadistes ne connaissent pas de répit. A cela s'ajoute, l'action et la communication. Au Sahel, où la France est engagée militairement depuis 2013, se joue aussi une bataille informationnelle dont l'issue lui est actuellement plutôt défavorable. Entre une opinion sahélienne sensible aux discours anti-coloniaux, la communication active des jihadistes et la désinformation orchestrée par certaines grandes puissances, le combat est devenu plus vif sur les réseaux sociaux. Ceci fait dire à Denis Tull, de l'Institut allemand pour les relations internationales et la sécurité (SWP), que l'issue du combat est incertaine. Si le Mali a réclamé l'intervention de Paris, les braises anti-françaises restent rouges et faciles à enflammer. La multiplication des attaques des jihadistes liés à Al-Qaïda ou au groupe Etat islamique fragilise l'image de Barkhane dont les résultats ne sont pas perceptibles pour le Malien lambda, constate Denis Tull. A juste titre, on peut évoquer la frappe aérienne de Bakhane, menée depuis le 3 janvier dans le Nord du Mali. Autour de cette opération, deux récits s'affrontent. L'armée affirme avoir tué des terroristes, mais dans cette zone où les jihadistes sont fortement implantés, les villageois parlent d'un mariage et de victimes civiles. Ce qui ne conforte pas l'image de la force Barkhane. Un sujet qui sera, sans nul doute, au centre des discussions des Chefs d'Etat et délégations attendues dans la capitale tchadienne. Sursaut politique et développement Un autre dossier brûlant attend les conférenciers, et qui concerne la diminution progressive du nombre de militaires de Barkhane. Beaucoup d'informations circulent à ce sujet même si Paris ne s'est pas ouvertement prononcé à ce sujet. Pour Wilfrid Ahouansou, chercheur en droit international, spécialiste des questions liées à la paix et la sécurité, Barkhane devrait être davantage axé, à l'avenir, sur la formation des forces sahéliennes. Autrement, il faut former les armées locales pour assurer la relève. Dans le même sillage, il est bon de souligner que si les membres du G5 Sahel attendent de la communauté internationale et la France, en particulier davantage d'appui, Paris de son côté affirme que le Sommet de Pau a été celui du sursaut militaire. Le rendez-vous de N'Djamena devrait être celui du sursaut diplomatique, politique et du développement. Autrement, pour venir à bout du terrorisme, il faut lutter à la racine en investissant massivement dans le développement socioéconomique, instaurer la bonne gouvernance. Car la pauvreté et la misère sont les terreaux du terrorisme et de l'islamisme radical. Les dirigeants de cet espace sahélien en ont conscience. Par exemple, le gouvernement malien cherche à rétablir la stabilité et à reconstruire les institutions du pays instable après une série de revers depuis le début de 2012 qui ont fracturé le pays, notamment un coup d'Etat manqué, la reprise des combats entre les forces gouvernementales et les rebelles Touaregs, et la saisie de courte durée du Nord du territoire par des extrémistes radicaux. Mieux, la visite du président de la transition malienne, Bah N'Daw, au Burkina Faso, samedi 13 février, à la veille du Sommet en est la parfaite illustration. Puisqu'il a eu des échanges avec son homologue Roch Marc Christian Kaboré sur la situation sécuritaire et la coopération au sein du G5 Sahel. Renforcement des forces militaires Aujourd'hui, force est de constater que l'expansion du terrorisme n'est pas uniquement une affaire d'ordre militaire, elle a également de profonds encrages dans les inégalités, dans les ressentiments que certaines populations ont par rapport à leur gouvernement. Dans ces conditions, il peut être intéressant d'opérer davantage dans le renforcement des forces militaires mais également d'outiller les forces de la société civile, comme le soulignent certains spécialistes. Enfin, soulignons que le président français, Emmanuel Macron, ne se rendra pas au Tchad, il participera au huis clos par visioconférence. Selon l'Elysée, il a préféré annuler sa venue au Sommet du G5 Sahel en raison du contexte sanitaire. Cette absence a été justifiée, par l'Elysée, par le fait que les frontières sont fermées pour les Français. Emmanuel Macron s'est appliqué les mêmes contraintes. Pour rappel, la force conjointe a été mise sur pied en 2017 et compte 5 000 soldats issus des forces armées des Etats membres et poursuit sa montée en gamme avec 21 opérations à son actif – dont des opérations civiles et militaires. Elle se déploie dans les zones frontalières d'un espace qui s'étend sur 3 300 kilomètres d'Ouest en Est et sur 1 600 kilomètres du Nord au Sud. Le Conseil des ministres et le Sommet des Chefs d'Etat sont les instances politiques du G5 Sahel. Wolondouka SIDIBE