Jugée importante avant la vaccination contre le Covid-19, la consultation pré-vaccinale ne figure pas parmi les procédures obligatoires fixées par le ministère de la Santé. Eclairage sur les pertes et profits de cette exclusion. Le Maroc entamera cette semaine la très attendue campagne nationale de vaccination contre le Coronavirus. Celle-ci est désormais réalisable grâce à la réception de quelque deux millions de doses du vaccin AstraZeneca, qui sera suivie par une deuxième livraison d'environ 500.000 doses de celui produit par Sinopharm, annoncée pour le mercredi 27 janvier. Pour assurer le bon déroulement de cette opération, un système de gestion a été mis en place, dont les premiers détails ont été dévoilés par le ministère de la Santé : démarche de prise de rendez-vous, lieux de vaccination, personnes concernées par cette première phase... tout y est. Mais l'une des étapes qui brille par son absence, c'est celle relative à la consultation pré-vaccinale qui est en vigueur dans plusieurs pays, notamment en France. Fondée sur le principe de l'évaluation de la situation clinique du patient, la consultation pré-vaccinale vise à renseigner l'information sur les bénéfices et les risques du vaccin et sur les préférences, les questionnements et les craintes qu'exprime le patient. «Les équipes médicales doivent normalement avoir des informations sur les personnes candidates au vaccin, et doivent procéder à une évaluation et à une observation de leur état de santé pour éviter les contre-indications », nous indique Jaâfar Heikel, épidémiologiste et spécialiste des maladies infectieuses. Néanmoins, il a indiqué que «la consultation médicale préalable à la vaccination n'est pas obligatoire et ne sera pas forcément exigée lors de la prochaine campagne de vaccination, pour la simple raison qu'elle doit se faire instantanément au niveau des centres de vaccination par les équipes en place». Cela dit, l'exclusion de cette étape du circuit vaccinal implique que chaque personne souhaitant effectuer les consultations devrait les faire à sa charge. Les raisons de l'exclusion Bien que l'objectif de cette étape s'avère fondamental, du fait qu'elle consiste à identifier l'absence de contre-indication temporaire ou définitive à la vaccination et de déterminer le risque de la vaccination pour les personnes, le Maroc a pris la décision souveraine d'écarter cette mesure car il ambitionne d'atteindre une immunité collective au mois de mai. En effet, selon le ministre de la Santé, Khalid Aït Taleb, le Royaume ambitionne de vacciner pas moins de 60% de la population, sur la base d'un calendrier vaccinal de 12 semaines, pour atteindre la fameuse immunité collective et sortir rapidement de cette pandémie l'ayant impacté socialement et économiquement. D'autant plus que le Maroc mise gros sur la prochaine saison estivale, pour compenser les pertes colossales causées par la crise sanitaire. Or, l'obligation des consultations pré-vaccinales pourrait ralentir le calendrier mis en place par la tutelle. L'exemple de la France corrobore bien cette hypothèse. Alors que les critiques se multiplient contre la lente mise en route de la campagne vaccinale dans l'Hexagone, certains professionnels de Santé proposent de supprimer lesdites consultations et y voient un frein à la vaccination. Toutefois, il convient de noter que les autorités sanitaires marocaines ne négligent pas l'aspect des antécédents d'allergie. Contacté par nos soins, Moulay Mustafa Ennaji, directeur du laboratoire de virologie de l'université Hassan II de Casablanca et membre du Comité de vaccination, nous confie que les personnes vaccinées au Maroc seront placées sous surveillance, pendant 30 minutes, dans le but de s'assurer de leur état de santé et prévenir les éventuelles complications aussi anodines soientelles (voir 3 questions à ...). En outre, Jaâfar Heikel rassure que cette mesure demeure exclusivement préventive, « sachant que dans la majorité des cas, la vaccination ne provoque aucune complication ou effet secondaire, à l'exception d'une petite rougeur ou des réactions semblables, ce qui est tout à fait normal». 3 questions à Moulay Mustapha Ennaji « Quoique facultative, la consultation pré-vaccinale demeure extrêmement importante » Moulay Mustapha Ennaji, directeur du laboratoire de virologie de l'université Hassan II de Casablanca et membre de la Commission consultative d'enregistrement du vaccin, a répondu à nos questions sur les démarches pré-vaccinales à suivre lors de la campagne de vaccination. - La campagne de vaccination démarrera dans quelques jours, les candidats au vaccin devront-ils faire une consultation chez leur médecin avant de se faire vacciner ? - En effet, la vaccination ne peut se faire arbitrairement sans consultation médicale, laquelle est d'autant plus importante qu'elle permet de s'assurer que la personne candidate est en bonne santé et ne risque aucune complication liée à l'injection vaccinale. La consultation pré-vaccinale est salutaire surtout dans les cas des personnes ayant des maladies chroniques ou des femmes enceintes, puisqu'elle permet de savoir si elles disposent d'assez d'immunité pour supporter le vaccin. Je rappelle que l'inoculation du vaccin requiert un effort immunitaire, donc le rôle du médecin dans ce cas est de s'assurer que le patient est suffisamment apte à supporter le vaccin. Pour les personnes jugées à risque, elles peuvent attendre jusqu'à ce que leur état de santé s'améliore pour prendre un rendez-vous. - La consultation pré-vaccinale peut-elle devenir obligatoire ? - En principe, ce type de démarche reste facultatif, toutefois elle reste très importante pour que l'opération de vaccination se déroule dans les meilleurs conditions. Je tiens à rappeler tout de même que nous avons besoin de vacciner au minimum 70% de la population pour réussir cette campagne et se débarrasser ainsi de la pandémie. Par conséquent, nous aurons intérêt à prendre toutes les mesures nécessaires pour vacciner les gens convenablement. - S'agissant des personnes présentant des risques d'allergie au vaccin, en seront-elles dispensées ? - C'est ici qu'intervient la consultation pré-vaccinale, il se peut que des personnes soient allergiques à des composantes particulières du vaccin ou à son liquide. Dans ce cas, les personnes doivent rester sous observation médicale au moins 30 minutes après l'injection du vaccin pour s'assurer qu'il n'y ait aucune réaction allergique. Dans le cas contraire, il suffit de prendre des anti-allergiques pour atténuer son ampleur. Recueillis par A. M. Encadré Procédure vaccinale : Les méthodes changent, selon les pays Ayant entamé leurs campagnes de vaccination au mois de décembre, les pays européens ont commencé à vacciner leurs ressortissants à grande échelle, en dépit des retards de livraison du vaccin de Pfizer, commandé par la Commission Européenne au profit de l'ensemble des 27 pays de l'Union Européenne. Le débat sur la procédure vaccinale n'a pas manqué et notamment sur la question des démarches préalables à la vaccination, dont fait partie la consultation médicale. En France, la question du consentement du patient est nécessaire et ne pourrait avoir lieu qu'après une consultation médicale effectuée cinq jours avant la vaccination. L'objectif est de s'assurer de l'état clinique du patient avant la prise du rendez-vous, surtout pour les personnes âgées ou celles des Ephad. Pourtant, face aux appels à la simplification des procédures pour accélérer le rythme de la campagne, le ministre de la Santé Olivier Veran s'est engagé à réduire le délai de cinq jours, en se basant sur des recommandations de la haute autorité de Santé. En Allemagne, « la machine vaccinale » s'est déployée, avec des équipes médicales mobiles, pour vacciner en priorité les maisons de retraite où les consultations médicales se font sur place. La procédure de vaccination dépend de chaque région, et non du Gouvernement fédéral. Quant aux Etats-Unis, l'un des premiers pays à amorcer la machine de la vaccination, 22,4 millions de doses de vaccins ont été administrées, dont la majorité dans des hôpitaux, les Etats songent à associer désormais les pharmacies. Selon le « Center of Desease Control and Prevention », la procédure est simple, les patients reçoivent une fiche sur leur état de santé qui indique le vaccin adapté pour chaque personne, sur la base d'un avis médical. Ensuite, le suivi de l'état de santé des personnes vaccinées se fait à l'aide d'une application mise en place par les autorités. A. M Repères La vaccination a débuté pour les frontliners Selon le communiqué du ministère de la Santé, les personnes ciblées par la première phase de la campagne de vaccination sont les professionnels de la Santé âgés de plus de 40 ans, les autorités publiques, les Forces Armées Royales, le corps enseignant de plus de 45 ans et les personnes âgées de plus de 75 ans. Les personnes appartenant à ces catégories prioritaires sont invitées à prendre rendez-vous ou à le vérifier, à partir du dimanche 24 janvier à 12h soit via l'envoi d'un SMS gratuit au numéro 1717, soit sur la plateforme « www.liqahcorona. ma ». Le dimanche 24 janvier, la plateforme était ouverte et fonctionnelle en milieu de journée. F.A.Q désormais disponible Face aux multiples questions que se posent les Marocains, le portail «www.Liqahcorona.ma», mis en place par le ministère de la Santé, vient rassurer en apportant des éléments de réponses dans l'objectif d'éclairer l'opinion publique, notamment sur les vaccins choisis par le Maroc ainsi que sur l'opération de vaccination. Population cible ? A qui la priorité sera-t-elle donnée ? Comment prendre un rendez-vous ?, le portail répond à toutes ces interrogations.