En décidant du maintien de son taux directeur à %1,5, Bank Al-Maghrib a montré son assurance quant à la résilience de l'économie marocaine. Une décision confortée par le HCP qui s'attend à un regain d'activité tous azimuts. Face aux contrecoups économiques causés par l'épidémie Covid -19, Bank Al-Maghrib (BAM) se veut rassurant en maintenant son taux directeur à 1,5%. Une décision qui souligne la confiance du Conseil de la Banque centrale dans l'orientation de la politique monétaire jugée « accommodante et assurant un financement adéquat » de l'économie. Cette décision devrait ainsi permettre à BAM de s'offrir une marge de manœuvre pour l'exercice 2021, vu l'incertitude qui entoure tant l'évolution de la situation sanitaire que ses répercussions économiques. Outre les effets de la pandémie Covid, la Banque centrale a pris en compte la stabilité de l'inflation à moins de 1% lors de l'exercice précédent et table même sur une moyenne de 1,3% pour 2022. Des projections optimistes partagées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP) qui tablent sur un PIB de 1,1% pour l'exercice en cours. Le département de Lahlimi conforte, en effet, les scénarios de reprises de BAM qui tablent sur un regain d'activité en 2021, lié à une amélioration de l'économie internationale, suite au début des campagnes de vaccination qui devraient entraîner une réouverture des frontières, un regain de confiance des ménages et celui des investisseurs. Au niveau financier, l'impact négatif de la détérioration des recettes touristiques et le gel des entrées en investissements directs étrangers sur la génération de devises ont été compensés par un repli des importations, un marché commercial mondial à faibles prix, une résilience au niveau des transferts de fonds des MRE ou encore au recours à d'autres instruments financiers. A l'image de la Ligne de précaution de la liquidité (LPL) et de la mobilisation de fonds sur les marchés financiers. Selon le HCP, les réserves en devises du Royaume se seraient renforcées se rapprochant de la barre des 300 milliards de dirhams en 2020, contre 263,8 milliards de dirhams en 2019. Ce qui équivaut à une couverture de près de 7,4 mois d'importations pour l'exercice précédent, contre 5,4 mois enregistrés en 2019. Parallèlement, les crédits bancaires ont connu une amélioration de près de 4,5% liés aux accroissements des crédits de trésoreries. Il n'empêche que les crédits à la consommation ont de leur côté eu une contre-performance avec une baisse de 2,5%. Le maintien du taux directeur à 1,5% devrait avoir un effet levier sur l'accès au crédit, notamment de consommation et immobilier. En clair, les établissements bancaires pourront revoir leurs offres de crédit en fonction d'un taux bas, leur permettant de proposer des taux à la baisse vu la marge de manœuvre que leur offre un taux de moins de 2%. Le HCP s'attend ainsi à un accroissement des crédits bancaires pour l'année en cours avec un taux de 4%. Une amélioration qui devrait s'opérer sous l'effet de la reprise prévue des activités économiques et de l'impact attendu des programmes de soutien des ménages et de relance des entreprises. 3 questions à Mohamed Kettani "Le taux directeur se fait ressentir sur les offres de financement du secteur bancaire" Nous avons contacté Mohamed Kettani, membre du Bureau Exécutif de l'Alliance des Economistes Istiqlaliens, pour nous expliquer les effets du maintien du taux directeur sur l'économie nationale. - Que représente ce maintien du taux directeur à 1,5% ? - Le taux directeur de BAM est un outil de régulation et de gouvernance de l'offre crédit qui se base sur différents critères et qui influe notamment sur la capacité des établissements bancaires à transmettre leurs propres taux. En décidant d'un taux, la Banque centrale influe sur l'attractivité des crédits proposés par l'écosystème bancaire, en le rendant accordable ou pas. Un outil qui permet ainsi d'accompagner l'économie quelle que soit son état, en permettant aux banques de mieux paramétrer, par exemple, les facilités de paiement accordées. Le maintien d'une inflation à un niveau bas favorise également le maintien d'un taux directeur à un niveau bas. - Quelle répercussion cela peut avoir sur l'économie ? - La répercussion la plus importante du taux directeur se fait ressentir sur les offres de financement du secteur bancaire. Un taux directeur bas se traduit par des portefeuilles de crédits à des taux intéressants tant pour les particuliers que pour les professionnels. Quand BAM décide d'une baisse du taux directeur, cela ne signifie pas que cette baisse sera entièrement répercutée au niveau de l'offre bancaire. D'ailleurs, certains s'interrogent sur la possibilité de baisser encore plus le taux directeur. - Comment un secteur comme celui de l'immobilier peut-il profiter de cette donne ? - L'immobilier est, en effet, un secteur qui dépend énormément des offres de financement par crédit. Il n'empêche que quand la Banque centrale décide d'un taux directeur, cela ne signifie pas que l'on retrouvera le même chiffre en taux d'intérêt. Cela dépend des banques et comment elles vont traduire cette baisse en fonction du volet fiscal, des risques encourus et de la marge que l'établissement se réserve. La concurrence entre les différentes banques est également un facteur dont il convient de tenir compte, notamment avec un taux directeur bas. L'on peut se retrouver avec des taux d'intérêts qui diffèrent d'une banque à une autre, notamment au niveau du crédit acquéreur. Recueillis par A. A. Repères BTP : bientôt la reprise ? Après une chute de 9,8% de son activité en 2020, le secteur des BTP devrait enregistrer un regain de 5,1% lors de l'exercice en cours. Un pronostic optimiste du Haut-Commissariat au Plan s'appuyant sur une hausse attendue de l'investissement public qui devrait avoir un effet levier sur le dynamisme de l'activité, notamment sur les projets d'infrastructure. Concernant la branche du bâtiment, le HCP table sur une reprise de la demande pour l'année en cours. Celle-ci serait poussée par la politique publique mise en œuvre en 2020 et les effets de « la digitalisation et de la gestion collective et inclusive » des espace urbains. Des solutions boostées par les problématiques liées à la crise de la Covid-19. Le Fonds Mohammed VI en renfort Mis en place, courant 2020, le Fonds Mohammed VI pour l'investissement dispose d'un budget de 45 milliards de dirhams. Cette structure devrait s'attaquer aux secteurs jugés prioritaires, notamment la restructuration industrielle, le soutien aux PME, les infrastructures ou encore au tourisme. Un chantier considérable qui devrait nécessiter un volume global d'investissement public de 230 milliards de dirhams pour l'exercice en cours, contre 182 milliards de dirhams en 2020. Ce qui représente une hausse de 26% de l'effort public et devrait être pris en charge par le Fonds.