L'initiatrice du #MeToo français, qui avait lancé le mot-dièse #balancetonporc, emblématique de la vague de libération de la parole des femmes dénonçant agressions et harcèlements sexuels, a été condamnée mercredi pour avoir diffamé l'homme qu'elle accusait de harcèlement. Le tribunal de Paris a condamné Sandra Muller pour diffamation à 15.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral, selon la décision. Le tribunal a estimé que qualifier le plaignant de harceleur était diffamatoire et condamnable. La journaliste de la Lettre de l'audiovisuel, l'une des « briseuses de silence » désignées par le magazine Time comme « Personnalités de l'année » 2017, a également été condamnée à verser au plaignant 5.000 euros au titre des frais de justice, à retirer le tweet litigieux et à publier des communiqués judiciaires sur son compte Twitter et dans deux organes de presse. Son avocat Francis Szpiner a indiqué qu'il entendait faire appel, dénonçant lors d'un point presse une décision « hors du temps », « une régression« . Le plaignant, Eric Brion, « accueille la décision avec une certaine forme de soulagement, il a toujours répété qu'il n'a jamais harcelé Sandra Muller », a réagi son avocat Nicolas Bénoit. Le 13 octobre 2017, Sandra Muller tweetait le message suivant: « #balancetonporc !! toi aussi raconte en donnant le nom et les détails un harcèlent (sic) sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends ». Message suivi quatre heures plus tard par un second tweet: « Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit Eric Brion ex patron de Equidia #balancetonporc ». Ces propos, retweetés plus de 2.500 fois, avaient été tenus à une soirée cannoise de 2012, en marge du Marché international des programmes de télévision où ils se trouvaient tous deux pour le travail. La parole de milliers de femmes dénonçant harcèlement ou agressions sexuelles s'était libérée sous ce mot-dièse #balancetonporc, rapidement devenu viral en France, et sous son équivalent en anglais #MeToo (#MoiAussi) lancé par l'actrice Alyssa Milano. Brion, consultant et ancien directeur général de la chaîne de télévision Equidia, avait attaqué Sandra Muller en diffamation pour le tweet le visant nommément. Lors de l'audience devant la 17e chambre civile du tribunal de Paris, le 29 mai dernier, Mme Muller avait défendu la libération de la parole initiée par #balancetonporc, tandis qu'Eric Brion et ses avocats avaient dénoncé une forme de « délation ».