Les Sahraouis doivent renoncer à leur indépendance : la conclusion rendue publique par Peter Van Walsum, l'envoyé spécial des Nations unies en charge du dossier, mardi au Conseil de Sécurité, a fait l'effet d'une bombe en Algérie. La presse marocaine a ouvertement critiqué les positions de l'ambassadeur sud-africain de l'ONU qui s'est prononcé contre le rapport de Van Walsum, tout en saluant de vive voix les propos tenus par ce dernier. En revanche, les médias algériens ont pris à parti le médiateur hollandais qu'ils accusent de « rouler pour Mohamed VI », le roi du Maroc. Des deux côtés de la frontière, Algériens et Marocains s'affrontent par voie de presse, à l'issue des déclarations controversées de Peter Van Walsum mardi. C'est la première fois qu'un représentant de l'ONU chargé d'une médiation entre le Polisario et le Maroc se prononce contre l'indépendance du Sahara occidental, annexé par Rabat en 1975. Le conflit dure depuis 32 ans. Mais la question sahraouie empoisonne toujours autant les relations algéro-marocaines et davantage aujourd'hui depuis que l'Afrique du Sud a affiché son soutien, après l'Algérie, à la République Arabe Sahraouie Démocratique. Le Maroc salue le rapport et piétine l'AFS L'Etat sud-africain, par la voix de son représentant à l'ONU Dumisani Kumalo, a aussitôt réagi à l'issue des commentaires de M. Van Walsum, déclarant que « si nous nous engageons dans cette voie, nous devrions aussi dire aux Palestiniens de renoncer » à l'indépendance. Une position qui a fait couler beaucoup d'encre au sein des médias marocains. « L'Afrique du Sud, disqualifiée du dossier », titrait mercredi Le Matin. « Elle qui revendiquait un siège permanant au Conseil de sécurité pour représenter l'Afrique », c'est raté, explique le quotidien marocain pour qui l'Afrique du Sud a affiché « pour la énième fois son hostilité au Maroc ». Le pire, c'est qu'elle « a violé les règles de bienséance diplomatique » qui prévallent à chaque réunion du Conseil, estime l'agence marocaine de presse MAP. En tant que Président de celui-ci, l'Afrique du Sud aurait dû se retenir. En revanche, les éloges en faveur de M. Van Walsum abondent. « Jamais, auparavant, un responsable onusien n'a été aussi pertinent et pragmatique sur le dossier du Sahara occidental », explique le quotidien Aujourd'hui Le Maroc. « Sa position incarne le réalisme, la raison et surtout exprime le point de vue de la communauté internationale », ajoute t-il, faisant ainsi allusion aux Etats-Unis et au Royaume-Uni qui ont salué le rapport. Une « pitrerie juridique » pour l'Algérie Du côté algérien, on est moins tendre avec le représentant hollandais : « M. Van Walsum roule pour Mohamed VI », juge L'expression . Un point de vue repris par l'ensemble des médias du pays. En accordant mercredi une interview au quotidien El Watan, Ahmed Boukhari, représentant du Front Polisario auprès de l'ONU, était en terre conquise. Il y affirme que « Van Walsum a miné le principe de neutralité et de l'impartialité » en jugeant l'indépendance de la région « irréaliste ». Tout ceci n'est qu'« une tentative de coup de force contre la légalité internationale », selon le site Algérie-dz. Lorsque des résolutions de l'ONU sont en passe de ne pas être respectées, les Etats se doivent d'exprimer leurs divergences, explique t-il. L'allusion est faite sur la résolution qui permet d'organiser un référendum d'autodétermination au Sahara occidental. Mais « la légalité internationale doit-elle faire les frais du "réalisme" ? », se demande le site algérien. L'Afrique du Sud aurait donc bien fait de réagir. Dans un commentaire intitulé « Pitrerie juridique », le quotidien Jeune Indépendant parle finalement du rapport comme d'une « bouffonnerie tout juste bonne pour la cour chérifienne ». Quant au Quotidien d'Oran, il y voit une manuvre de l'Occident : « sa sortie est délibérée et obéit clairement aux desiderata des Occidentaux : que le Polisario se plie aux exigences du Maroc ». Il est clair que le dossier sahraoui continuera à faire couler beaucoup d'encre de part et d'autre de la frontière. Ban Ki-Moon aura fort à faire pour trouver une solution acceptable aux yeux des parties concernées.