Dans une note que vient de publier le Haut-Commissariat au Plan, son chef de la Division des indices statistiques, Mohammed El Maliki, décortique les variations des prix du carburant et montre où vont les dépenses publiques consacrées aux subventions du butane. L'une de ses principales conclusions est que depuis la libéralisation totale des prix des carburants, leurs prix moyens ont augmenté de plus de 9%. Autre conclusion : les subventions du gaz butane sont sont pro-riches. Détails. Evolution des indices des prix des carburants et de l'électricité L'évolution des prix des carburants entre 2007 et 2017 s'est caractérisée par trois phases principales. La première phase avant 2011 a été marquée par une croissance modérée de 0,4 %. La deuxième phase de 2012 à 2014 a connu une hausse moyenne de 8,3 % des prix des carburants et la troisième phase depuis 2015 s'est caractérisée par des fluctuations relativement plus accentuées. Depuis l'année 2016 (date de libéralisation totale) les prix moyens des carburants ont augmenté de 9,1 %. Evolution des indices des prix à la consommation des carburants Les prix à la consommation de l'électricité et du gaz représentent, respectivement, 3 % et 1,7 % de l'indice global des prix à la consommation. L'indice des prix de l'électricité a connu des évolutions relativement plus marquées à partir de l'année 2014, suite à l'entrée en vigueur du contrat programme entre le gouvernement et l'ONE. Au cours de la période 2014-2017, la croissance moyenne annuelle des prix à la consommation de l'électricité a atteint 3,7 %. En revanche, l'évolution des prix à la consommation du gaz butane est restée relativement stable vu le système de compensation de ces produits. Forte corrélation des prix à la consommation du gas-oil aux cours du pétrole Depuis l'année 2016, les prix à la pompe du gas-oil ont poursuivi leur tendance haussière, s'approchant de la barre des 10 dirhams à fin mai 2018, au lieu de 7 dirhams au début de 2016. Avec une capacité de stockage des principaux distributeurs relativement limitée (47 jours) et une raffinerie à l'arrêt, les distributeurs s'approvisionnent à 100% sur le marché international. Les importateurs ont tendance à augmenter relativement leurs achats quand les prix baissent et réduire leurs importations quand les prix augmentent. Les prix du raffiné sont ainsi déterminés sur les marchés internationaux et les prix à la pompe dépendent du taux de change du dollar et des coûts de revient des importateurs, des distributeurs, du stockage et des marges commerciales. Les prix à la consommation du gas-oil, élaborés par le HCP, deviennent très corrélés à partir de 2016 aux cours mondiaux du Brent (93%), tandis que leurs variations restent, relativement, moins corrélés (90%). Les hausses et les baisses des prix du raffiné importé sont répercutées sur les prix interne à la pompe, avec un décalage de 15 jours, mais pas avec la même ampleur. Ce décalage tient compte du temps nécessaire pour le transport, le stockage et la distribution. Les baisses et les hausses des cours des produits raffinés ne se répercutent pas exactement sur les prix à la pompe. Selon les opérateurs du secteur, le prix de vente du gas-oil est constitué de près de 50% du prix d'achat, 35% de taxes et 15% de marges commerciales. Coefficient de corrélation entre le cours du Brent et les prix internes des carburants La répartition des subventions du gaz butane selon les déciles de dépenses témoigne de l'inégalité des gains tirés de la compensation. En 2014, les 20% les moins aisés n'ont profité que de 13,9% des subventions de gaz butane, au lieu de 26,9 % pour les 20 % les plus aisés. Ce schéma inégalitaire de la répartition des subventions a été observé dans les deux milieux de résidence. Structure des gains triés des subventions du gaz butane par classe de dépenses, 2014 (en %) Bien que les classes moyenne et aisée tirent plus profit des subventions du butane, leur effort redistributif contribue à l'équité verticale en réduisant les inégalités sociales. En 2014, les inégalités de dépenses, mesurées par l'indice de Gini, auraient été de près de 40,3% sans les subventions du butane au lieu de 39,5 %, suite à leur incidence redistributive. Dans ces mêmes conditions, la pauvreté monétaire aurait été de 6,1 % au lieu de 4,8 % au niveau national, de 11,5 % au lieu de 9,5 % en milieu rural et de 2,5 % au lieu de 1,6 % en milieu urbain. Effets redistributifs des subventions du gaz butane Globalement, les dépenses publiques consacrées aux subventions du butane sont pro-riches. Les plus aisés, qu'ils soient citadins ou ruraux, tirent bien plus profit de ces subventions que leurs homologues les moins aisés. Le budget alloué à la compensation a connu une évolution soutenue durant les dix dernières années, avec un pic en 2012 (56,4 milliards de dirhams) : il est passé de 8 milliards de dirhams en 1998 à 31,5 milliards de dirhams en 2014, situant la croissance annuelle moyenne à 18,4%. L'essentiel des subventions de la compensation était destiné, en 2014, aux produits pétroliers et au gaz butane, soit 80,3% de l'ensemble des subventions (25,3 milliards de dirhams en 2014). Source : Note du chef de la Division des indices statistiques du HCP, Mohammed El Maliki