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Compensation : La filière des produits pétroliers 43,4 MMDH de subventions, soit plus de 90% du budget d'investissement
Les prix, non indexés sur le coût réel d'acquisition, peuvent être surévalués et alourdir la compensation
Le système de subvention de certains produits de grande consommation instauré par l'Etat en vue de soutenir le pouvoir d'achat des catégories de populations pauvres et à revenu limité ne répond pas aux objectifs pour lesquels il a été mis en place. Détournées au profit des couches à pouvoir d'achat élevé et aux industries pour lesquelles elles constituent une manne, ces subventions grèvent lourdement le budget de l'Etat dont le déficit culmine à des niveaux insoutenables. Cette situation est d'autant plus critique que les prix domestiques dépendent des cours internationaux des matières subventionnées qui atteignent aujourd'hui des niveaux élevés. Les pouvoirs publics envisagent de procéder à la réforme du système de compensation afin que les aides de l'Etat bénéficient aux populations ciblées. Dans ce cadre, le Conseil de la Concurrence a reçu une saisine sur les possibilités de libéralisation des quinze produits qui demeurent régulés par les pouvoirs publics, y compris bien sûr ceux qui sont subventionnés dans le cadre de la compensation. Il a, à cet effet, réalisé une étude portant sur les scenarii de libéralisation des prix de la farine nationale de blé tendre, du sucre et des produits pétroliers en se référant à un benchmark international en la matière, précise-t-il. Le conseil de la concurrence rappelle que les subventions constituent l'un des goulots d'étranglement majeurs à l'objectif de préserver les équilibres fondamentaux, particulièrement au niveau des finances publiques. Il ajoute que les soutiens ne concernent pas seulement le consommateur à travers les catégories sociales défavorisées, mais également toutes les autres catégories sociales ainsi que les opérateurs économiques agissant dans le cadre des filières de blé tendre, du sucre et des produits pétroliers. Le montant global des subventions concernées, indépendamment des arriérés, a atteint 51,8 milliards de DH en 2011 (43,3 milliards pour les produits pétroliers, 3,4 milliards pour les farines et 5,1 milliards pour le sucre), soit un montant supérieur au 48 milliards prévus la même année pour le budget d'investissement. La charge de compensation a atteint l'équivalent de 6,2 points du PIB cette année. La subvention des produits pétroliers (essence, Gasoil, Fuels et Butane) absorbe la majeure partie des dépenses de compensation. Leur part a atteint 43,3 milliards de dirhams en 2011, soit près de 83,6% de l'ensemble des charges de compensation et 90,2% du budget d'investissement qui s'élève à 48 MMDH. Cette part devrait être plus importante dans un contexte de renchérissement du pétrole si le système de la compensation actuel était maintenu. En effet, ce système étant basé sur un prix fixe de vente au public, les hausses des cours mondiaux se répercutent non seulement sur la balance commerciale du Maroc dont les besoins sont quasi totalement couverts par les importations, mais également sur les charges de compensation des prix à la consommation. Monopole de la Samir Le cadre juridique et réglementaire régit le fonctionnement de l'ensemble de la filière: importation, raffinage, distribution et commercialisation des produits pétroliers subventionnés. Ainsi, bien que l'importation de pétrole brut et son raffinage sont libres, un seul opérateur est présent sur le marché pour ce segment à savoir la société SAMIR, et le caractère fortement capitalistique de ce type d'industrie contribue à renforcer le monopole de fait dont jouit cette société et limite la concurrence à ce niveau. Concernant l'importation de produits raffinés, libre, elle était jusqu'en 2002 essentiellement réalisée par la SAMIR qui était soumise à des droits à l'importation réduits. Depuis 2002, toutes les sociétés de distribution bénéficient de l'exonération des droits à l'importation. Tout le fonctionnement de la filière, à savoir le mode de fixation des prix, des frais, des marges de vente en gros et au détail et le niveau des stocks de sécurité, répondent à une réglementation stricte afin d'assurer l'approvisionnement du marché à des prix maxima fixes pour l'ensemble des consommateurs et de réguler le prélèvement des diverses taxes par les pouvoirs publics. Evolution de la consommation en produits pétroliers au Maroc La consommation nationale en produits pétroliers, à l'instar de celle de tous les produits énergétiques, est en hausse continue répondant aux besoins de développement socioéconomiques du pays. Le rythme d'augmentation de cette consommation pourrait s'infléchir à l'avenir grâce aux ambitieux programmes et investissements dans le domaine des énergies renouvelables mis en œuvre actuellement. Le tableau suivants montre l'évolution de la consommation nationale pour les quatre produits pétroliers subventionnés. Le Fuel est constitué de trois types : le Fuel industriel, ou Fuel N°2, le Fuel destiné à la production d'électricité, nommé Fuel ONE, et le Fuel Spécial, destiné également à l'ONE pour le fonctionnement des turbines. En 2011, la consommation de Fuel est répartie à 39% pour le Fuel N°2, 39% pour le Fuel ONE et 22% pour le Fuel Spécial. Si la part des produits raffinés au Maroc dans la consommation globale peut atteindre 80%, elle est variable selon l'évolution des cours et les capacités de stockage de la raffinerie nationale. En 2009, par exemple, la SAMIR a répondu à travers le raffinage du brut importé à 58,2% de la demande en Super, à 37% de la demande en Gasoil, 73,1% en Fuel et 5,4% en butane. Tout le reste de la consommation est provenu de produits importés raffinés. Depuis 2010, le gaz butane commercialisé provient totalement des importations, la production de la SAMIR étant utilisée par la compagnie même. La production nationale ne devrait être distribuée qu'à partir de 2013. Evolution des prix Les prix de vente publics sont fixés par les pouvoirs publics et restent relativement stables sur de longues périodes. Ainsi, si l'on considère les trois dernières années, les prix du Super et du Gasoil n'ont pas été modifiés depuis avril 2009, et ceux du Fuel n'ont subit qu'une seule hausse en juillet 2010, et le prix de vente public du butane est resté fixe alors que les cours mondiaux ont enregistré des fluctuations importantes avec une nette tendance à la hausse. L'accentuation de la différence entre le prix de reprise et le seuil hypothétique de subvention, impliquant un poids de plus en plus élevé des dépenses de subvention pour les finances publiques. Importation et production des produits pétroliers L'approvisionnement du marché national en produits pétroliers est assuré par l'importation de pétrole brut ou de produits déjà raffinés. Le pétrole brut, importé par la SAMIR, est raffiné avant d'être vendu aux sociétés de distribution qui en assurent la vente en gros (fuel) ou au détail. Quant aux produits raffinés, ils peuvent également être acquis directement sur les marchés internationaux par les sociétés de distribution. Dans les deux cas d'importation, pétrole brut ou produits raffinés, la réglementation est identique. Le mode de fixation des prix à l'importation se base sur les cours des produits raffinés sur le marché de Rotterdam, quel que soit le cours réel d'acquisition, et le coût du raffinage par la SAMIR n'est pas pris en considération. Ce cours de référence, fixé chaque quinzaine pour le Super, le Gasoil et le Fuel, et chaque mois pour le Butane, est augmenté des frais d'approche, de fret, de stockage et d'assurance pour former le prix de reprise qui sera le prix de cession aux sociétés de distribution et servira de base de calcul des prix de revient de chaque produit et du montant de la subvention du prix à la consommation correspondante. Par ailleurs, il convient de signaler, à ce stade, que les importations de ces produits pétroliers liquides profitent toujours de l'exonération des droits à l'importation mise en oeuvre au lendemain de l'incendie de la SAMIR. Cependant, le mode de fonctionnement des importations diffère pour le gaz Butane. Les importations sont le fait de 14 centres emplisseurs qui disposent d'infrastructures de stockage propres ou en sous-traitance à la SOMAS (Société Marocaine de Stockage) et qui fournissent les sociétés de distribution. Pour garantir l'approvisionnement régulier du marché et des prix fixes et accessibles pour ce produit de base, le système de compensation intervient dès le stade des importations du butane. En effet, si le prix réel d'acquisition, majoré des frais d'approche, de fret, de stockage et d'assurance, ainsi que des droits à l'importation (2,5% de la valeur imposable) diffère du prix de reprise du mois en cours, la différence est régularisée par la Caisse de Compensation : si le prix réel est supérieur au prix de reprise, il s'agit d'une subvention, dans le cas contraire, assez rare, il s'agit d'un prélèvement au profit de la Caisse. Cette subvention s'est élevée à près de 520 millions de dirhams en 2010, et elle est estimée à près de 650 millions de dirhams en 2011. Afin de contrôler cette charge de subvention, le ministère de l'Energie lance des appels d'offre auprès des importateurs et ceux qui présentent les prix occasionnant le moins de subvention à l'importation sont sélectionnés et reçoivent l'approbation préalable à toute importation. De plus, et afin d'assurer un prix de reprise identique à toutes les sociétés de distribution, les frais de transport des centres emplisseurs ou de la SOMAS vers ces sociétés de distribution sont pris en charge par la Caisse de Compensation, et sont en partie financés par la « provision pour transport en vrac », prélèvement opéré sur la vente du gaz Butane. Le montant de ces frais de transport était de 244 millions de dirhams en 2010 et de 195 millions en 2011. Le tableau suivant montre un exemple de formation du prix de reprise pour chacun des produits pétroliers pour la période du 1er au 15 mai 2012. Pour le Super par exemple, le prix d'acquisition était de 9.553,16 DH/T entre le 1er et le 15 mai 2012. S'y ajoutent les coûts de fret, les taxes portuaires, les frais d'approche, la taxe parafiscale à l'importation et les frais de stockage, ramenant ainsi le prix à 10.051,93 DH/T. La multiplication de ce prix par la densité du produit permet d'obtenir le prix au m3 (10.051,93 * 0,748= 7518,84 DH/m3), puis à l'hectolitre (7.518,84/10= 751,88 DH/hl). Distribution des produits pétroliers subventionnés La distribution des produits pétroliers est assurée par 13 sociétés pétrolières et 14 sociétés de distribution de gaz disposant de centres de stockage et de points de vente au détail ou en gros (fuel). La structure du prix de chacun des produits pétroliers subventionnés est identique pour tous les opérateurs, empêchant toute concurrence par les prix. En effet, les taxes (Taxe Intérieure à la Consommation, crédit de droit, TVA), les frais (distribution et autres...) et marges (distribution et détail, qui représentent une part du profit des intervenants dans la filière) de ce processus sont fixés par voie réglementaire à chaque stade. Un prélèvement supplémentaire pour la péréquation du prix du gaz butane est opéré sur le prix du Super et Gasoil. Ajoutés au prix de reprise, il en résulte le prix de revient de chacun des produits. Les prix de vente publics (PVP) maxima sont fixés par les pouvoirs publics (conformément aux dispositions de la Loi 06-99 modifiée et complétée par la Loi 30- 08) en concertation avec les opérateurs du secteur à des fins sociales et économiques. Si la différence entre le PVP et le coût de revient est positive, elle est prélevée au profit de la Caisse de Compensation. Si la différence est négative, elle est comblée par une subvention de la Caisse de Compensation. Les tableaux suivants présentent le mode de calcul du coût de revient et de la subvention de chacun des produits pour la période du 1er au 15 mai 2012. Il est à noter que la structure du prix du butane diffère selon la charge de conditionnement. Les frais et marges de distribution sont plus élevés pour les charges inférieures à 5kg, c'est-à-dire pour les bouteilles de 3kg de gaz butane. Toutefois les prix de vente au détail sont identiques s'ils sont ramenés au kg (3,33 DH/KG), ce qui induit une charge de compensation plus élevée pour la bouteille de 3kg. Les deux phases, l'importation et la distribution, et le processus de formation des coûts de revient et le calcul de la subvention peuvent être schématisées comme suit.