L'accord de réconciliation entre les frères ennemis du Fatah et du Hamas était à peine conclu, le 27 avril, que Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, annonçait que l'Etat hébreu ne reverserait pas à l'Autorité palestinienne 60 millions d'euros de taxes qui lui reviennent de droit. Une décision inacceptable qui va empêcher le paiement des salaires le mois prochain. Pour Benyamin Netanyahou, il s'agit de «punir» Mahmoud Abbas qui agit contre les intérêts d'Israël. «Auparavant le Hamas ne voulait pas d'Etat palestinien ; aujourd'hui, il veut l'utiliser pour nous détruire» a-t-il déclaré à ses interlocuteurs français, la semaine passée, à Paris. Pour le chef du gouvernement israélien, dans cet accord mille fois repoussé et finalement conclu - quoique non signé par les deux responsables, Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne et Khaled Mechal, le leader du Hamas basé à Damas – ce n'est pas le Fatah qui influencera le Hamas dans le sens de la paix mais l'“organisation terroriste” qui entraînera dans son funeste sillage les Palestiniens. Rien de très nouveau sous le ciel d'Israël. Hormis que la méfiance israélienne s'est accrue ces dernières semaines. La droite au gouvernement à Jérusalem est tétanisée par les révolutions arabes. Elle a bâti sa stratégie sur la «glaciation» d'Etats arabes autoritaires, peu soucieux de Palestine et encore moins de démocratie. Lorsque les peuples arabes, unanimement révoltés par l'occupation de la Palestine, revendiquent pour prendre la parole et leur vie en main, Israël est pétrifié. Les révolutions égyptienne et syrienne, en particulier, tétanisent Israël. Car le Proche-Orient ne sera plus comme avant quelle que soit l'issue des «printemps arabes». C'est la raison pour laquelle Mahmoud Abbas et Khaled Mechal se sont réconciliés. Une façon de prendre les devants avant de se voir fragilisés par la contestation à Ramallah et à Gaza. Le Hamas, surtout, n'est pas en bonne position. En s'emparant du pouvoir à Gaza en 2007, le mouvement islamique s'est enfermé dans une impasse politique et économique. Bombardements et blocus israéliens, le niveau de vie des Palestiniens de la bande s'est effondré contrairement à celui de la Cisjordanie. Une majorité des Gazaouite veut le changement. Isolé sur la scène diplomatique, en particulier depuis que son grand allié, la Syrie, connaît, elle aussi, la contestation populaire, le Hamas a donc accepté de se réconcilier avec le Fatah et de ne pas siéger au gouvernement d'union qui sera constitué de technocrates. Mieux encore, Khaled Mechal, dont l'organisation n'a pas reconnu Israël (c'était le cas de l'OLP jusqu'en 1988), a déclaré vouloir donner une « nouvelle chance à la paix » et parlé d'un Etat palestinien dans les frontières de 1967. Dernier aggiornamento : le Hamas vient de déclarer qu'il veut intégrer l'OLP, qui, elle, a signé des accords répétés avec l'Etat hébreu depuis 1993. Plus encore, le Hamas a donné son accord pour laisser Mahmoud Abbas conduire les futures négociations avec l'Etat hébreu. Difficile de dire, dans l'immédiat, que c'est le Hamas qui a pris le pas sur le Fatah. Paris a décidé de tenir compte de la réalité des faits, et vient de débloquer 10 millions d'euros pour soutenir l'Autorité palestinienne et compenser - un peu - le gel financier israélien. Une façon aussi de faire capoter l'arrière-pensée de Netanyahou : profiter de l'accord Hamas-Fatah pour dissuader les Etats Unis et l'Europe, de reconnaître une Etat palestinien en septembre.