Durant toute l'année 2010, l'intervention de Bank Al-Maghrib a été sollicitée et manifestée à travers des opérations permanentes d'avances sur appels d'offres à 7 jours ou de baisse du taux de la réserve obligatoire. L'objectif étant d'alimenter le marché en liquidité nécessaire et maintenir les taux à un niveau compatible avec les objectifs de la politique monétaire. De ce fait, en 2010, la position structurelle de liquidité des banques s'est appréciée de 0,5% pour atteindre 20,8 milliards de DH au lieu d'une baisse de 46% en 2009. Pourtant, le rythme de progression des crédits bancaires est resté en décélération, passant de 9,7% à 7,6%. Par objet économique, les crédits bancaires ont été tirés essentiellement par les crédits à l'équipement (+16,9%), et dans une moindre mesure par les crédits immobiliers (+8,7%), les crédits à la consommation (+8,1%) et les crédits de trésorerie (+5,9%). S'agissant du nombre de dossiers agréés, on compte seulement 92 dossiers en 2010, pour un montant de crédits de 430 millions de DH, contre 116 dossiers en 2009 (698 millions de DH ), précise Bank Al Maghrib. Par secteur, près de 95% des dossiers relèvent du secteur du textile-habillement, qui a contracté près de 923 millions de DH sur les deux années 2009 et 2010. Face à cette situation, Bank Al Maghrib vient de fixer le taux d'intérêt conventionnel maximum à 14,14%. Comparé à celui de l'année précédente (14,4%), on remarque qu'il s'agit d'une très légère baisse de -0,26%. Pourquoi donc la banque des banques resserre le robinet? Certainement faute de liquidité. Mais quel serait l'impact sur le rythme de l'octroi des crédits? La baisse n'est que «trop légère» et d'après Abderrahim Rhiati, administrateur directeur général d'Eqdom, il n'y aura pas d'impact. Par contre, ce sont les taux réels pratiqués par les banques qui jouent le jeu. Et ces taux varient généralement entre 8% et 14%. A ceux qui se demandent pourquoi les taux d'intérêt pratiqués au Maroc sont élevés? Les banquiers affirment que le taux d'intérêt interbancaire a atteint 3,43% à cause de la tension observée sur les devises. Les importateurs de matières premières, principalement les pétroliers mais aussi les importateurs de céréales, ont procédé à des achats de devises plus importants que d'habitude en raison de la flambée des cours mondiaux des matières de base. Cette demande sur les devises a exercé une pression sur le marché, ce qui s'est traduit par une augmentation du loyer de l'argent. De ce fait, et après une année 2010 de stabilité, les taux d'intérêt démarrent l'exercice 2011 sur une tendance haussière. Sur le marché monétaire, le Taux moyen pondéré interbancaire, qui sert de base pour les prêts entre banques et constitue la nouvelle référence pour l'évolution des taux variables, a progressé de 14 points de base par rapport au début de l'année, atteignant au 14 février le niveau de 3,43%. Reste à savoir comment se comporte le consommateur marocain face à ces taux jugés élevés. Happés par la frénésie de la société de consommation, les Marocains cèdent au chant des sirènes. Personne ne peut nier la grande évolution qu'a connue le recours au crédit à la consommation dans notre pays durant les vingt dernières années. Selon les statistiques de l'Association professionnelle des sociétés de financement, le volume de crédits a progressé de +4,4% par an. Des chiffres éloquents qui confirment la tendance haussière et en disent long sur l'engouement des Marocains pour le «crédit conso». «Nous sommes dans une phase de baisse du taux maximum depuis 3 ans.» Abderrahim RHIATI, Directeur Général d'Eqdom Entretien réalisé par f-z jdily L'Observateur du Maroc. Pourriez-vous nous éclairer sur la notion de taux maximum d'intérêt conventionnel ? Abderrahim RHIATI. Il s'agit du taux, fixé par BAM, au delà duquel aucune banque, aucune société de crédit à la consommation, ne peut prêter. C'est le taux maximum qu'on peut appliquer à notre clientèle. Ce taux a été fixé par Bank Al Maghrib à 14.14%. Sur quelle base a-t-il été calculé et sur quels critères ? Ce n'est pas la première fois que BAM fixe ce taux. Cela fait déjà plusieurs années qu'un système a été élaboré par la Banque du Maroc. C'est un système transparent, à la fois chez BAM et chez les sociétés de crédit à la consommation et les banques. On peut nous mêmes le calculer à l'avance. C'est un coût qui tient compte du coût des ressources de la banque et de ses financements, plus une marge qui couvre le risque et les charges, et qui varie en fonction du comportement de ce taux de crédit sur le marché pendant l'année passée. Si le taux moyen est en baisse, on baisse également le taux maximum, et inversement. C'est une équation qui est connue et qui change chaque année, du 1er avril au 31 mars. A combien avait été fixé ce taux les années précédentes ? Ce taux a été par le passé fixé à 14.40%, il est passé à 14.16% l'an dernier et, cette année, il est fixé à 14.14%. Nous sommes dans une phase de baisse du taux maximum maintenant depuis 3 ans. Bien que le taux d'intérêt maximum baisse légèrement, le taux de crédit au Maroc est jugé très élevé… Il s'agit du taux maximum. Dans la réalité, vous trouverez des taux largement inférieurs. Actuellement, la majorité des crédits octroyés par les banques et les sociétés de financement se fait à un taux largement inférieur à ce taux maximum. Vous trouverez du 7 ou du 8%. A mon avis, ces taux sont peu élevés par rapport à l'environnement marocain et au coût des ressources au Maroc. Comment se sont portés les crédits en 2010 ? Ce fut une année quelque peu contrastée. C'est une année où le crédit s'est mal comporté. D'abord les crédits octroyés pour l'achat de véhicules ont fortement baissé parce que les ventes du secteur automobile ont baissé pour la deuxième année consécutive et parce qu'il y avait une légère augmentation du risque. Donc les sociétés de financement ont revu leur conditions d'octroi des crédits. Globalement, les financement du secteur automobile ont baissé et ont tiré la production globale à la baisse. Pour ce qui est du crédit personnel, non affecté, on peut dire qu'il s'est comporté de la même façon que 2009, donc nous n'avons pas vu une forte augmentation. La moyenne était de 4 à 5% d'augmentation. Pourtant à la veille de 2010, vous avez tablé sur une reprise ? Tout à fait. Tout le monde tablait sur une reprise parce qu'au niveau mondial on sentait les prémices d'une reprises, l'économie marocaine se portait bien. Ceci dit, les risques qui ont été enclenchés en 2009 ont un peu refroidi le secteur qui a durci les conditions d'octroi de crédits et ce qui a freiné leur évolution. Quelles sont vos prévisions pour 2011? Janvier s'est bien déroulé et on était optimistes, mais en février, malheureusement, on a ressenti une baisse. C'est toujours le même facteur, c'est-à-dire le secteur automobile, qui joue des tours puisqu'au mois de janvier, les ventes automobiles ont bien progressé mais en février il y a une baisse. Il y a donc une très grande incertitude sur le comportement de ce secteur qui représente tout de même 25 à 30% de l'activité des sociétés de financement. Le crédit personnel poursuit la même tendance avec une légère augmentation par rapport à l'année dernière. Mais je peux vous assurer qu'il y a beaucoup d'incertitudes sur l'environnement économique en général au Maroc et à l'extérieur du Maroc. Je pense que les mois d'avril et de mai vont être des mois d'attentisme qui vont nous éclairer sur le bon ou le moins bon déroulement de l'année en cours.