En marge du Festival Essaouira Gnaoua et Musiques du Monde, le célèbre photographe contemporain Hassan Hajjaj, a réalisé en collaboration avec le jeune maâlem gnaoui Marouane Lbahja, une série de portraits destinée à préserver la mémoire et la culture gnaouie. Exposées pour la première fois à Dar Loubane dans la médina d'Essaouira, les photographies grand format d'une dizaine de mâalems font partie d'un projet global que l'artiste a débuté en 1999 après sa rencontre avec le maâlem Marouane Lbahja : « A travers ces portraits, nous voulions Hassan et moi, revaloriser les maâlems ganoua, en les immortalisant sur du papier ; nous confie Marouane Lbahja, le dernier qu'on a photographié, c'est Ba Larbi, il y a un mois. On voulait que les gens se rappellent des gnaouas, et que l'arbre qu'ils constituent fleurisse un peu pour qu'on puisse, nous les jeunes en profiter. L'arbre de ces gnaouas n'est plus irrigué, il est délaissé, du coup, ses feuilles commencent à se faner et tombent une par une. On s'est dit qu'on allait sauver les feuilles restantes et préserver les saveurs qui s'en dégagent ». Lbahja qui s'est longtemps intéressé à la signification des couleurs dans la culture gnaouie nous explique que « Les couleurs utilisées émanent de nos ressentis et le mélange du vert et du rose par exemple renvoient à deux rois, le vert symbolisant Cherif Moulay Abdelkader Jilali, et le rose évoquant « Malika », sans oublier que le vert, c'est aussi la couleur dont l'œil et le cœur se nourrissent ». Par ces clichés colorés résolument Pop-Art, Hassan Hajjaj, plus engagé que jamais, souhaite ainsi faire de la culture gnaouie un patrimoine reconnu. « Au-delà de l'aspect esthétique, c'est avant tout un travail de documentation qui vise à faire revivre cette culture dans sa forme la plus brute et qui permettra par la même occasion, aux générations futures de se souvenir des gnaouas, nous précise le photographe. Ce sont eux qui ont formé de grands artistes comme Hamid El Kasri ou le maâlem Bakbou. Dans 40 ans, je veux que leurs petits enfants gardent ces photos, qui sont témoins d'une époque. C'est pour cette raison que les maâlems pourront récupérer leurs portraits après l'exposition ». Connu mondialement grâce à sa touche fraîche et colorée, ses trames et cadres uniques ainsi que pour son penchant pour les matériaux recyclés, l'artiste marocain installé à Londres admet puiser son inspiration dans les couleurs des souks marocains « En Europe, ils étudient les couleurs et leur agencement, ici, les couleurs nous envahissent de partout, allez juste chez le marchand de légumes et vous verrez cette ambiance Pop Art ». Présenté comme le « Andy Warhol de Marrakech », Hassan Hajjaj a déjà exposé au musée de Brooklyn, au British Musuem de Londres ainsi qu'à Los Angeles, à Dubai, aux Etats Unis, etc. En 2011, il a remporté le prix « Sovereign Middle East and African Art Prize ». Juste après Essaouira, il s'envolera pour Memphis (USA) pour son exposition « My rock stars » au Memphis Brooks Museum.