‘En invitant Marcus Miller à Essaouira, le festival Gnaoua a réussi un coup de maître. La rencontre entre l'un des plus grands bassistes du monde et l'incontournable Maâlem Baqbou était explosive. Un moment singulier, bouleversant et une fusion improbable et réussie qui a envoûté le public, ébloui par les performances impressionnantes et le génie des musiciens.' L'Observateur du Maroc : Vous tentez pour la 1ère fois une fusion avec un Maâlem gnaoui (Baqbou). Quel est votre sentiment ? MARCUS MILLER : Ce n'est pas une musique facile, il faut suivre le rythme, mais une fois qu'on l'a joué pendant 30 minutes, ça devient très facile, c'est très similaire à la Samba du Brésil, au Calypso des Caraïbes, au zook de la Guadeloupe, à la musique latine, au funk, il faut juste pratiquer. En fait, le gembri est l'ancêtre de mon instrument, la guitare basse. C'est une réalité que j'ignorais totalement et que je viens d'apprendre il y a 2 ans. C'est incroyable pour moi et mes musiciens (Alex Han – saxophone, Lee Hogans – trompette) qui sont jeunes de découvrir l'histoire et les racines de la musique africaine. Et je trouve que Maâlem Baqbou est très doué. Que pensez-vous de la fusion ? Je me suis toujours considéré comme un musicien de fusion. D'ailleurs, toutes les musiques créés en Amérique sont des musiques de fusion : le blues, le jazz, le R&B. Lorsque les africains ont été amenés aux Etats-Unis, ils ont ramené avec eux leur musique, leur sensibilité, puis, ils ont interprété la musique venue d'Europe à leur façon, et c'est ce qui a donné le jazz et le blues. Le jazz est une fusion par définition et la musique afro-américaine aussi, c'est le passé et le futur de notre musique. D'ailleurs, le musicien a besoin de nouvelles influences pour perdurer. Selon vous, la musique a des effets positifs sur la société Aux USA, la musique a réussi à changer les choses, notamment en ce qui concerne les droits civiques. La musique gnaoua rassemble les gens. J'étais nommé artiste pour la paix par l'Unesco et je pense que la musique est importante pour répandre la paix dans le monde. Elle permet d'exprimer ce qui difficile à dire avec les mots. La musique est un langage universel : l'amour, l'amitié,...sont des sentiments communs à tous. Vous comptez faire des collaborations futures avec Gnaouas ? Oui, très prochainement. J'ai déjà écrit trois chansons dans ma tête avec les sons gnaouis, je suis venu ici, parce que je sais que ça va m'inspirer. J'ai écrit mon premier morceau il y a 40 ans, à force de composer très longtemps, on se rend compte qu'on se répète. Il faut se mettre dans une situation différente pour être inspiré. Pour ce qui est de mes racines africaines, je vais enfin découvrir d'où je viens. Vous avez rendu un hommage particulier au géant à Miles Davis à l'Olympia, quel souvenir en gardez-vous ? Miles était comme un père musical pour moi. Avec Wayne Shorter et Herbie Hancock, on ne voulait pas juste reproduire sur scène les morceaux de Miles, parce c'était un homme du futur et il aurait détesté. On a longtemps discuté des choses qu'il aimait, la bouffe, les voitures, les femmes, le concert reflétait un peu cette conversation à propos de Miles. C'était un grand succès, une expérience magnifique ❚