Il y a quelques années, Mohamed Saïd Afifi revenait d'une expédition au fin fond du bled avec la fierté du gosse qu'il est resté jusqu'à son dernier souffle. Photos à l'appui, il rendait compte de la série de représentations théâtrales qu'il venait de donner et diriger en plein air dans des contrées où le théâtre ne s'est jamais invité. Une première pour ce sculpteur de premières. Au début des années cinquante, il était parmi les premiers comédiens marocains à narguer le protectorat français qui se faisait à son tour plaisir à le recevoir dans ses geôles. Afifi sévissait alors au sein de troupes de quartiers avant le grand saut du Théâtre Maâmoura en 1952 puis en 1953. Véritable tremplin qui le fait ensuite illustrer parmi les porte-drapeaux de la troupe du Théâtre Populaire. Mais le troublion contracte un début de boulimie qui le pousse à co-fonder en 1956 la troupe du Théâtre National. Le navire prend l'eau en 1963 et Afifi le remet quatre ans plus tard à flot. Cette fois, il retourne à ses vieilles amours en optant pour le nom Troupe Maâmoura. Entre-temps, le comédien se convertit à la mise en scène en montant en 1964 «Othello», traduction de Tahar Ouaziz, costumes de Larbi Yacoubi. Ce nouveau métier, il l'exerce avec férocité, surprenant à chacune de ses livraisons. Afifi excelle également en tant que mime, expression rare au Maroc au moment où il s'y attelle. Dans la foulée, l'artiste est sollicité comme acteur de cinéma. On cite, entre autres, «Assarab» («Mirage») d'Ahmed Bouânani sorti en 1979 avec Fatéma Regragui et Mohamed El Habachi. Ou encore «? la recherche du mari de ma femme» de Mohamed Abderrahmane Tazi (1993) et dans lequel il est déroutant de justesse, faisant jouer son corps sans piper mot. Il est aussi l'un des protagonistes de la seconde partie de «Elle est diabétique » de Hakim Noury et de «Oud El Ward» de Lahcen Zinoun. Afifi a connu quelques affiches de films étrangers et a mis son talent au service de la télévision. C'est un grand homme qui vient de raccrocher.